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Philippe Pellet ("Les Forêts d’Opale") : « Mon dessin convient mieux à un public d’adultes »

Par Jean-Sébastien CHABANNES le 9 janvier 2016                      Lien  
Alors que la série vient de s'achever avec la parution début décembre du neuvième tome "Un Flot de lumière", Philippe Pellet dresse pour nous un premier bilan de son travail et de ses quinze dernières années consacrées à ne dessiner que "Les Forêts d'Opale", composante importante pour les lecteurs dans l'univers développé par Arleston.

Le temps a passé, son scénariste a multiplié les séries autours du monde de Troy et a pu donner parfois le sentiment d’avoir perdu en route l’esprit initial de certains personnages. De tous les dessinateurs qui ont débuté avec Arleston, Pellet est celui qui a le trait le plus réaliste. Comme ils ont avec eux un bon nombre de lecteurs, il est plus que probable que la collaboration avec Arleston ne soit pas terminée...

Vous vous êtes fait connaître avec « Les Guerriers  ». Quel regard avez-vous maintenant sur cette série ?

C’était le début de ma carrière, c’était très sympa. Ça s’est un petit peu fait par hasard avec Dominique Latil. Il commençait lui aussi dans la bande dessinée, comme moi. On s’est super bien entendus. Je repense souvent à nos escapades en dédicaces dans son AX qu’il a gardée. Il était un peu baroudeur, troubadour. Je n’ai fait que les quatre premiers tomes de cette série, mais ça m’a permis de démarrer dans la BD. C’était aussi un bon apprentissage et dans de bonnes conditions ! Mais au bout de quatre ans, j’ai eu un gros besoin de passer à autre chose.

Philippe Pellet ("Les Forêts d'Opale") : « Mon dessin convient mieux à un public d'adultes »

Que s’est-il passé graphiquement entre le premier et le second album des « Forêts d’Opale » ? On voit arriver des vignettes plus grandes, un dessin plus aéré...

Un album des « Guerriers » je le faisais en six mois ; le tome un des « Forêts d’Opale » je l’ai fait en dix mois ; le tome deux, en un an et demi. Donc ça m’a laissé la moitié de temps en plus pour revenir sur le dessin, peaufiner la mise en scène, etc. Et à partir de là, il m’a été difficile de revenir à des délais plus courts. C’est pour ça que mes albums sortent maintenant tous les un an et demi, voire même tous les deux ans. Je mets trop de choses dans mon dessin. Ou alors il faudrait que je fasse un tout autre dessin. À partir du tome deux, j’ai donc pris le temps de faire ce que j’avais envie de faire. Et finalement ce n’est pas plus mal, car ça a plutôt plu. De toute façon, quand on ne rend pas les pages, l’éditeur est bien obligé d’attendre.

La couverture du second tome avait été retenue pour un catalogue Soleil. Cela avait contribué à faire connaître la série et à mettre aussi en avant sa réelle ambiance d’Heroic Fantasy ?

Oui il y a ça, mais il ne faut pas oublier aussi le nouveau coloriste : il a amené beaucoup, car sur le premier tome, on avait pris quelqu’un qui débutait. Malgré toute sa volonté, elle avait été un petit peu effrayée par l’ampleur du travail. Notamment à cause de mon dessin où il y a beaucoup de détails. C’était compliqué pour elle. Sur le tome deux, on a prix un professionnel, Christian Goussale, qui a amené une autre dimension et de la modernité par son travail sur ordinateur. C’est quelqu’un qui a travaillé dans les comics. Alors, même s’il y a eu en effet des modifications dans mon dessin, je pense que visuellement c’était plutôt ça l’ingrédient principal de ce changement.

Est-ce que justement la mise en couleur n’est pas un peu froide ? Cela convient pour des armures, peut-être moins pour des visages.

On aime ou on n’aime pas ! Mais moi je trouve qu’il y a un bon équilibre. Les couleurs sont peut-être un peu trop synthétiques ou trop éclatantes. J’aime le réalisme, donc c’est vrai que, par moments, j’aurais peut-être aimé un peu plus de modération. Mais, même si j’aurais pu voir certaines choses autrement, ça ne m’a jamais déplu. J’ai vu des coloristes gâcher le trait d’un dessinateur mais, avec Goussale, franchement ça allait. J’ai axé tout mon travail sur le dessin et donc je ne veux pas me disperser à faire la couleur moi-même. Il y en a qui sont meilleurs que moi dans ce domaine (et de loin), donc je préfère partager le travail. Je ne donne pas trop d’indications aux coloristes, à part pour les uniformes et les drapeaux. Je lui laisse beaucoup de champ libre, tout comme j’apprécie que mon scénariste me laisse le champ libre pour mon dessin. J’essaye de faire pareil avec les autres. Quand on me montre les planches, même si je ne voyais pas les choses comme ça (et tant que ça n’est pas rédhibitoire), je laisse. Il faut bien que les gens s’expriment !

L’univers des « Forêts d’Opale » est lié de très loin à celui de « Lanfeust », est-ce un élément qui a compté pour vous ?

Disons que le scénariste reste cohérent. Il est dans ses univers, dans sa façon de voir les choses. C’est du Arleston. J’ai eu par moment le sentiment de faire du sous-Lanfeust. Il y en a même qui me l’ont dit ! Mais ce sentiment s’est rapidement détaché, car mon dessin n’est pas le même. J’ai même volontairement influencé le ton du scénario pour m’en détacher encore plus puisque mon dessin réaliste le permet.

À l’arrivée « Opale » est un bon compromis. Alors c’est vrai que si on cherche vraiment la petite bête, on peut faire un parallèle notamment sur les cinq personnages principaux : Ghörg c’est Hébus, Urfold c’est Nicolède... Il y a aussi le héros naïf, la blonde, la brune... Ça reste un schéma mais les histoires sont complètement différentes, le dessin est différent et on n’a pas du tout le même public. Moi c’est des trentenaires, je n’ai pas d’adolescents ! Quand j’ai commencé « Les Forêts d’Opale » c’était l’explosion de « Lanfeust  » mais j’ai veillé à ce qu’il n’y ait pas trop de similarités.

Ghörg est le personnage le plus truculent de la série mais il n’est finalement pas tant exploité que ça !

Je trouve aussi qu’on aurait pu l’exploiter davantage ! Mais c’est le choix du scénariste. En fait, Arleston a du mal avec ce personnage et je me suis même demandé s’il ne fallait pas arrêter la série. Car si le scénariste n’est plus en phase... Moi, c’est un de mes personnages préférés ! J’y ai mis tout mon cœur. J’ai pris le temps de l’améliorer, de le perfectionner, de le rendre plus mystérieux. Ghörg c’est un pote, mais il faut s’en méfier. Il reste une menace, il faut le prendre avec des pincettes. C’est un peu un « Bacri » : le gars qui a l’air sympa mais qu’on ne va pas toucher de trop près quand même, on ne sait jamais. Ce personnage illustre le mieux ce que j’aime faire dans le côté fantastique. Arleston a décidé de lui mettre des dialogues en décalage avec son apparence. Il y en a qui adorent, et ça marche bien en effet... Mais on aurait pu l’exploiter mieux.

Il y a aussi d’autres personnages comme Urfold qui sont un peu de côté, alors que certains lecteurs les adorent. Il faudrait presque faire un album spécial pour chacun des personnages préféré des lecteurs... ( Rires )

Du coup, Ghörg a presque été remplacé en terme de prestige par Kamphre
d’Yrkhone. Ce personnage est un régal, graphiquement !

Je l’aime beaucoup aussi ! ( Rires ) J’aime bien tous ces personnages mystérieux et fantastiques. Kamphre est arrivé au bon moment, il a apporté quelque chose à la série. Et puis, graphiquement, il est en effet très intéressant. C’est difficile de dire d’où lui vient son aspect physique. De plein de choses vues et mélangées. Ghörg c’est plus facile à dire : c’est un personnage lourd (mais véloce) et qui a été inspiré du film « Predator » ! Pour les autres... les idées viennent parfois d’un mauvais croquis où finalement on se dit « Haa ça, c’est pas mal ! ». Comme pour ce morceau de vêtement en cuir qui remonte derrière la tête de Kamphre : je ne sais même pas comment on pourrait appeler ça. Mais plein de gens m’ont dit qu’ils trouvaient ça génial. Voilà ! C’est plus facile pour moi de dessiner ce genre de personnages que des petits animaux à fourrure. Il y en a un dans la série, « Og » et j’ai pas mal galéré. Dessiner la petite "bébête", c’est pas dans mes gênes. Dessiner un Schtroumpf, je ne saurais pas faire !

Quel est justement votre personnage préféré dans la série ?

Moi j’aime bien Urfold ! Graphiquement, je l’aime bien. J’adore dessiner les personnages qui ont les traits marqués. C’est plus intéressant qu’un personnage lisse. Tara est très sympa à dessiner mais ça reste compliqué de dessiner les filles. Il suffit d’un trait de travers pour que, tout de suite, elle prenne vingt ans ou qu’elle soit moche ! ( Rires ) Alors qu’un vieux, s’il est moche, c’est pas grave, c’est même mieux.

En fait j’aime bien tous les personnages secondaires ou ceux qu’on pourrait même appeler des personnages de décors. Je ne les dessine qu’une fois et j’y mets un maximum de choses parce que je sais que je n’aurai pas à le reproduire x fois. Je peux lui mettre trois boucles d’oreilles et je n’aurai pas à me poser la question si je risque d’en oublier une par la suite. Et sur ces personnages "passants", je n’aurai pas de sentiment de lassitude comme je pourrais l’avoir sur des héros. Par moments, Darko j’en ai un peu marre de le dessiner. Je pense que c’est normal. Quand ça fait quinze ans, on a envie de changer.

Le général Tara donne l’impression de monter à cheval mais les montures sont des sortes de "chevaux à barbe" ?

Les chevaux, c’est bien mais je voulais faire autre chose que des chevaux. Seulement, il faut avouer qu’un cheval c’est quand même bien foutu ! Je n’ai pas trouvé graphiquement une monture équivalente. Je n’étais pas assez satisfait de moi (Cf. Planche 9 - Volume 2) donc j’ai décidé de garder le cheval. J’ai pris comme base de travail le cheval de trait, le percheron, et je leur ai ainsi mis une crinière devant, un peu à la manière d’un lion. En fait, j’aime bien les changer de monture... comme quand ils sont à un moment sur une espèce de Yak. Mais je sais aussi que certains lecteurs adoreraient voir mes personnages sur des dragons plutôt que sur des chevaux.

Pourquoi vous ne réalisez pas des couvertures dans un style différent. On a parfois l’impression d’une simple vignette agrandie.

Parce que je ne sais pas faire ! Déjà, moi, je ne fais pas de couleur... Et puis si les gens aiment ce qu’il y a à l’intérieur, pourquoi changer de style ? Je ne vais pas essayer de faire de la peinture alors que je sais d’avance que ça va être moche. C’est vrai qu’une couverture, c’est comme une affiche et si c’est l’auteur qui fait cette couverture mais dans un autre style, OK, je reconnais que ça peut être bien. Mais le pire, ce serait de faire faire mes couvertures par quelqu’un d’autre. Je sais que ça se fait mais là, je suis contre ! Ce n’est pas ma tasse de thé ! En général, on essaye d’avoir une idée de visuel avec le scénariste, on se met d’accord sur la composition, les éléments qu’on veut voir en couverture. On n’en fait qu’une et c’est même en réalité Arleston qui prend la décision, car c’est lui qui a écrit l’histoire. On fait un travail en commun, on fait des compromis et quand je fais une couverture,. c’est que je suis complètement en accord avec Arleston.

Opale est la planète des arbres mais cet environnement est finalement peu mis en avant : est-ce un élément dans lequel vous êtes moins à l’aise ?

On en avait discuté il y a pas longtemps, justement avec mon scénariste et c’est vrai que pour une planète des arbres, ça n’a pas été exploité comme on l’avait prévu au départ. Mais si on me dit de dessiner un château, je ne vais pas dessiner un arbre à la place ! Pourtant, j’adore dessiner des arbres mais beaucoup de scènes se passent en ville. L’idée de départ était de faire un album avec, à chaque fois, une végétation différente. L’histoire a fait qu’on est parti sur d’autres choses mais c’est en effet un aspect que l’on peut se reprocher.

La carte (très Heroïc-Fantasy) et ses repères n’est là non plus pas très essentielle alors que pourtant elle avait été refaite...

Oui c’est un visuel sympa et une base nécessaire pour débuter une histoire, mais c’est vrai qu’en quinze ans, on a le temps de changer d’idées. Les tomes sont écrits au fur et à mesure et c’est donc le fil de l’histoire qui va orienter la géographie. Je sais juste qu’Arleston a besoin de beaucoup de noms, de repères sur une carte pour installer son histoire. Tenez, on entend beaucoup parler d’Oryampe et bien vous constaterez qu’on n’y est jamais allés !

Est-ce que la cruauté de Xarchias n’est pas difficile à représenter ? Vous aviez eu par moment la décence de masquer ces scènes dans des ombres noires...

On m’avait reproché sur « Les Guerriers » d’avoir été cru, visuellement. Il est vrai que je n’avais pas hésité à faire des scènes particulièrement violentes et ensuite je me suis dit que ça avait peut-être été un peu gratuit. La suggestion c’est nettement mieux, et l’idée qu’on s’en fait parfois plus forte. C’est également valable pour toutes les fois où mes héroïnes auraient dû être plus dévêtues. Je ne suis pas un adepte du "fan service", alors je n’ai jamais voulu qu’on les voie nues. J’évite à présent de tomber dans l’extrême violence, sauf si vraiment mon scénario me le demande. Par contre, afficher la violence de Xarchias ça fait partie du personnage, pour montrer que lui, c’est vraiment un bel enfoiré ! Quand Darko tue quelqu’un, là, c’est plus propre, ça se voit moins. Il faut qu’il reste un héros positif.

Est-ce que vous coopérez au scénario avec Arleston ou est-ce que vous intervenez pour faire corriger des choses ?

On va dire que j’ai peut-être été trop longtemps "exécutant". J’ai commencé à m’impliquer plus, à discuter du scénario avec Arleston assez tardivement. À partir du tome six ou sept !

Philippe Pellet et son interviewer, Jean-Sébastien Chabannes

Est-ce que lui, inversement, s’immisce dans la mise en scène ou dans votre manière de représenter les choses ?

C’est compliqué. En fait c’est un scénariste qui écrit des histoires pour des dessinateurs semi-réalistes. Je suis le seul à faire un dessin plutôt réaliste et Arleston a du mal à s’y faire. « Opale » est un vrai compromis : moi sur un ton avec des moments humoristiques qui ne sont pas naturels pour moi ; et lui sur un style graphique qui le déstabilise un peu. Mais ce compromis a bien marché... Même si, parfois, je me demande encore comment !

Arleston aurait aimé que mon dessin soit plus proche de celui de Tarquin : on avait même fait des essais ensemble sur le story-board. Mais l’expérience n’a pas duré, et je suis resté fidèle à mon trait. Je mentionnais plus tôt la difficulté pour Arleston de travailler avec mon personnage de Ghörg (bien qu’apprécié des lecteurs) car il n’a pas de faciès. Ghörg ne rigole pas ! Ou plutôt, ce n’est pas très visible. Comment veux-tu que Alien te fasse un sourire même s’il a de belles dents ? Ghörg mis à part, je fais plein de concessions, et Arleston s’en rend bien compte.

Comment dessinez-vous ? Avec quel matériel, sur quel format ?

Je travaille sur du layout au format A4 tout simple : facile à transporter et à manipuler. Le crayon bleu c’est parce que je travaille avec des stylos jetables et l’encre supporte assez mal le gommage. Pour éviter que l’encre devienne grise, il ne faut pas que je gomme et donc le crayon bleu se scanne de manière invisible. Pas besoin de gommer ! Mes planches sont un grand A3. En fait une fois que j’ai terminé ma case, je la recadre sur mon layout, un peu plus à droite ou à gauche. Souvent, ma case dépasse un peu, je mets mon cadre, je découpe et je colle mon layout sur mon grand Canson A3 qui a ainsi une grande solidité.

Dessin de l’auteur réalisé pendant l’interview

Souvent mes planches originales sont du collage. Mais je ne fais pas de story-board. Quand je lis le scénario, je visualise la page dans ma tête et j’attaque. Je peux commencer par la case du milieu ou celle de la fin car elle m’inspire plus. Des fois, je me trompe et je recommence : ce n’est pas un gain de temps. Le collage de case, j’ai piqué ça à Didier Tarquin. Je trouve génial de pouvoir reprendre le cadrage indépendamment. Car si c’est dessiné directement sur la planche originale, après tu peux avoir des soucis s’il te manque un visage ou s’il y a un dialogue à rajouter. C’est assez technique, avec des chiffres pour chaque image, mais au moins c’est bien carré. Mes planches finales sont ensuite scannées au Studio Gotferdom à Aix en Provence.

Le combat entre Ghörg et un Démon du onzième cercle à la fin du tome quatre est comme un remake du film "Alien Vs Predator" ?

Ce ne sont que des références visuelles, mais pour l’aspect Alien contre Predator, maintenant que vous me le dites, en effet... Pourtant, franchement, je ne l’ai pas fait exprès ! C’est incroyable, l’inconscient ! Je ne suis pas un grand fan de cinéma. J’en regarde beaucoup mais je ne suis pas un cinéphile comme certains peuvent l’être. Aujourd’hui, je crois que je la ferais différemment cette bestiole...

Vous savez, j’aime bien les voitures mais je ne suis pas un passionné de voitures. J’aime bien la bande dessinée mais je ne suis pas non plus un passionné de bande dessinée. Il y en a qui croient que j’ai surfé sur la vague de l’Heroïc Fantasy alors que c’est un truc que j’ai toujours aimé. Ça me fait un peu mal qu’on puisse penser que je fais ça car c’était la mode. En fait j’ai eu beaucoup de chance car j’aurais pu facilement passer à la trappe vu le nombre de sorties qu’il y a eu juste après « Opale ». Je crois que je suis passé juste avant la surexploitation du genre. Il y en a eu tellement : du bon comme du pas bon. Les libraires me disaient à cette époque : "Les gens ne regardent même plus l’Heroïc Fantasy". Il y en avait trop, c’était à saturation.

Bynöod (dont Sleilo tombe amoureuse) est un personnage rasta qui colle assez bizarrement avec l’univers en question...

Hé oui ! Voilà ! En fait les dreadlocks, c’était pas rasta. Les premières représentations de dreadlocks sont sur les fresques égyptiennes, donc ça date ! En fait, je pense que je les fais trop propres. Bynöod, je lui fais ses dreadlocks un peu trop nickel ! À l’avenir, pour mes personnages futurs, je les ferai en effet un peu plus sales ! Il faut savoir que si on ne soigne pas ses cheveux, quand ils poussent, ils s’agglomèrent. C’est un phénomène naturel qu’on retrouve aussi chez des animaux comme les yaks. Mais quand je l’ai fait pour Bynöod, je n’ai pas du tout pensé au phénomène rasta, c’était une coiffure tribale pour moi.

Le tome six propose un vrai revirement dans l’histoire : Xarchias meurt et il est supplanté par Kamphre ! C’est un tournant qui n’était pas prévu au départ ?

Au départ, on a voulu faire avec Xarchias un personnage méchant mais physiquement attirant, plutôt beau gosse et charmeur. On trouvait amusant de faire un méchant qui a une belle gueule et un gentil qui a une sale gueule. Pour montrer que, parfois, les apparences sont trompeuses. Mais ensuite, au niveau du scénario, ça a dérivé sur le fait que, OK, Xarchias n’est pas un mec super sympa, mais qu’il y avait pire ! Voilà. Mais c’est vrai que j’ai préféré dessiner Kamphre que Xarchias. C’était plus intéressant...

Au début du tome sept, vous avez introduit un personnage assez marquant (celui en planche quatorze), très sombre...

J’adore ce personnage ! Là dedans, je suis fort. J’adore créer ce type de personnage, il est assez charismatique. Mais le problème c’est qu’il faut aussi que je reste dans le ton de l’histoire et que le personnage plaise au scénariste. Je ne peux pas faire des personnages trop sombres tout le temps. Sur certains personnages de la série, il est arrivé que le scénariste modifie un peu l’histoire pour en faire quelque chose. Ce qui ne m’arrange pas forcément car quand j’en invente un, c’est souvent pour ne le dessiner qu’une ou deux fois. Donc si le scénariste décide de l’exploiter, ça me complique la tâche ! ( Rires )

Il y a quand même un paquet de personnages et il y en a même certains que j’oublie car ils ne font que passer. Tiens ! Comme par exemple les deux personnages des deux premières planches de l’album « Onze racines » ! Une espèce de lapin avec des flèches dans le dos et son copain, petit et avec des grosses cornes... Ha ! Vous les avez oubliés ceux-là ! ( Rires ) Vous savez, c’est presque un besoin pour moi de créer ces personnages, j’aime avoir une scène où je peux m’éclater à faire de la "créa". Ha si je pouvais vivre en ne faisant que des codex, je serais super-content. Mais ça ne marche pas ! ( Rires )

Ne faire qu’inventer des personnages, des décors, des architectures, ce serait génial. Tiens d’ailleurs, si j’ai un reproche à faire à la bande dessinée, c’est qu’on dessine trop souvent les personnages principaux ! C’est trop répétitif ! Mais c’est comme ça, c’est la BD.

Le tome huit est presque décevant. On devine une fin accélérée, on sent une certaine démotivation...

C’est vrai que j’avais imaginé les choses différemment en arrivant dans les cercles des enfers. Là où je projetais un truc grandiose pour lequel les décors se bousculaient dans ma tête, je me suis retrouvé avec des démons habitant dans des maisons victoriennes. Alors, face à cette "immense" différence de vision, j’ai en effet entrevu la fin prochaine de la série...

Le neuvième album paru début décembre est donc une fin prématurée ? Il était question que la série soit plus longue à une époque...

Vous savez, ça fait quinze ans que je suis sur cette série et j’ai vraiment envie de faire autre chose, de dessiner d’autres personnages maintenant ! Je ne suis pas sûr que le format-fleuve soit encore la norme aujourd’hui. D’abord, financièrement pour le lecteur, neuf tomes, ça fait beaucoup, et puis avec un album tous les deux ans, faut vraiment que le public soit super-cool. Merci à eux d’ailleurs soit dit en passant ! Et surtout, les gens qui suivent la série attendent une fin quand même à un moment ! Il en faut une (même au risque que le lecteur soit déçu). Et avec « Opale » je pense qu’on aurait même pu faire plus court. Plus concis aussi, je pense !

Êtes-vous également un amateur d’Heroïc Fantasy à travers le cinéma, les livres, les jeux vidéo, les jeux de rôle ?

J’ai fait des jeux de rôles pendant longtemps. Les jeux vidéo aussi, j’en ai fait quelques-uns mais c’est hyper-chronophage. Je n’ai plus le temps. Il y a un moment où il faut travailler. Par contre, je surfe beaucoup sur le Net pour chercher des images qui pourraient m’inspirer. Même le cinéma : je regarde tout ! Et même les films les plus nuls, on ne sait jamais ! ( Rires ) Mais là où il y a le plus à prendre, ça reste quand même dans l’univers des jeux vidéo. Il y a des équipes incroyables qui bossent sur des projets énormes. Ils ont du budget, du talent. Mais je regarde surtout, je ne joue pas. Ou sauf certains jeux comme « Skyrim » : ça parlera peut-être à certains...

Comment s’organise votre futur maintenant ?

Hé bien, il est un peu vague. Je ne fais que bosser sur un projet perso quand je vais à l’atelier. Je me bats particulièrement sur le scénar, un exercice que je découvre et que j’appréhende.

Propos recueillis par Jean-Sébastien Chabannes
http://pabd.free.fr/ACTUABD.HTM

(par Jean-Sébastien CHABANNES)

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Lire notre article associé à la conclusion de cette série : La Lumière s’éteint sur "Les Forêts d’Opale"

Lire les chroniques des tomes précédents des Forêts d’Opale : tomes 4, 5, 6 et 8 ainsi que notre analyse des Codex des Forêts d’Opale.

 
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