C’était annoncé, c’était attendu. Un titre pareil, né sur les braises de l’après Mai 68, pétri d’esprit de provocation, miraculeusement surgi des décombres en 1992... Forcément donc, ce numéro 1000 créerait l’événement.
Eh bien non. Outre une couverture qui lance un clin d’œil plutôt lourdaud au passé, pas l’ombre d’une surprise à l’intérieur. Les rubriques habituelles n’ont pas bougé : "les unes auxquelles vous avez échappé" en dernière page, la rubrique de Patrick Pelloux, le coup de gueule de Bernard Maris, les instantanés voyeurs de Sattouf, la demi-page de Wolinski. Tout au plus peut-on noter une présence accrue de Cabu, conscience suprême.
En cherchant bien, on a quand même droit en pages centrales à quelques unes historiques, depuis la reprise des années 90 à aujourd’hui. Assaisonné d’un édito assez riquiqui de Charb’.
Cet anniversaire décevant et morose pose question : pourquoi donc si peu d’éclat ? Charlie n’aurait-il plus les moyens d’offrir plus de pages à cette occasion ? L’équipe a-t-elle manqué d’imagination ? À moins que les journalistes et dessinateurs n’aient pas réussi à accorder leurs violons... Tout ces constats rendent ce millième épisode tristounet. Et laissent des interrogations coincées dans les rotatives...
On peut rappeler que Charlie Hebdo est né des traces d’Hara Kiri en 1970, avec déjà une liberté de ton inédite et une équipe de choc réunie par Cavanna. En 1981 la première page de son histoire est tournée : fin de la parution, avec en toile de fond la candidature de Coluche à l’élection présidentielle.
Le retour de 1992 arrivera, également derrière un autre titre, La Grosse Bertha, sous l’impulsion de Philippe Val. Une période stable jusqu’à aujourd’hui, malgré les remous suscités par le limogeage de Siné en 2008 et le départ de Philippe Val l’année suivante. Sa ligne politique édulcorée et ses prises de position publiques avaient beaucoup déplu.
Depuis le leadership assuré par Charb et Riss, la dose de provocations et d’engagement a sensiblement augmenté.
Ce numéro 1000 semble vouloir faire l’impasse sur un certain passé mais pas l’imposant ouvrage qui sort en septembre, recueil de 330 pages des « 1000 Unes de Charlie Hebdo » qui ont jalonné son histoire depuis 1992. Une histoire qui se retrouve sur les cimaises du Musée Raymond Lafage à Lisle-sur-Tarn qui sera ponctuée d’évènements durant tout le mois de septembre.
(par David TAUGIS)
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