La liste a été révélée le 8 janvier 2014, trois jours après la date symbolique de la "Fête des rois".
Qui remportera la fève de la bande dessinée en 2014 ? L’un des 25 "nominés" sortis du chapeau des organisateurs : Binet - Christophe Blain - Charles Burns - Pierre Christin - Daniel Clowes - Richard Corben -Bernard Cosey - Étienne Davodeau - Nicolas de Crécy – Edika - Emmanuel Guibert – Hermann - Alejandro Jodorowsky - Manu Larcenet - Milo Manara - Lorenzo Mattotti - Alan Moore - Katsuhiro Otomo - Quino - Marjane Satrapi - Joann Sfar - Jiro Taniguchi - Jean Van Hamme - Chris Ware - Bill Watterson.
Un prix largement international, ouvert aux scénaristes (une première, depuis l’année dernière !) mais qui garde, en ce qui concerne les dessinateurs, une écrasante majorité d’auteurs "complets", c’est-à-dire qui sont à la fois dessinateurs et scénaristes.
Qui sont les électeurs ?
"Tou-te-s les auteur-e-s édité-e-s en langue française,
quelle que soit leur nationalité." Tous les auteurs ? Voire. Comment la Hongroise Miriam Katin, l’Israélien Asaf Hanuka, le Finlandais Ville Ranta ou la Tchèque Lucie Lomova sont-ils au courant qu’ils ont un droit de vote sur ce scrutin francophone ?
D’après nos renseignements, le FIBD s’est rapproché des éditeurs pour qu’ils fournissent la liste de leurs auteurs au Festival. Ceux-ci ont reçu par mail de la part des organisateurs la liste des 25 nominés et un lien Internet avec un identifiant et un mot de passe.
Parallèlement, les membres de l’Académie feront également un choix limité à trois noms.
Comment s’est constituée la liste des nominés ?
D’après nos renseignements, il s’agit de la liste des 20 noms recueillis auprès des membres de l’Académie des Grands Prix par Benoît Mouchart l’année dernière, des noms qui tournaient depuis plusieurs années auprès des membres du jury, auxquels on a opportunément ajouté des scénaristes et des auteurs-hochets pour satisfaire les grands éditeurs en place.
Une fois sur le site, les auteurs-électeurs (combien seront-ils ? On espère que le FIBD le communiquera) se trouvent face à une liste nominale de 25 créateurs où ils peuvent cocher trois noms, quitte à en choisir un et à revenir trois jours plus tard pour compléter les deux autres. Une fois le champ des trois noms rempli : clic, et le vote est forclos. On entre dans la suite de la procédure.
"Un second tour soumettra les 3 noms issus du premier tour au vote des deux collèges séparément, les résultats étant pondérés à 50/50". Pourquoi un second tour ? Le premier ne suffit pas ? une fois encore, l’organisation du scrutin par le FIBD s’enfonce dans l’à-peu-près...
Coupes sombres dans les budgets
Est-ce que ce nouveau mode d’élection résoudra le problème du Grand Prix ?
Pas si sûr. En réalité, ce qui est dans le viseur des organisateurs du Festival, c’est l’Académie des Grands Prix et son financement. Réunir les académiciens a un certain coût : une vingtaine de personnes à faire venir à Angoulême, à loger et à nourrir. Mais cela avait une certaine gueule de voir régulièrement des grands auteurs comme jadis Eisner, Fred ou Bilal, venir à Angoulême pour élire un de leurs pairs. Mais le choix d’élire des auteurs de plus en plus jeunes (Zep, Dupuy-Berberian, Baru, etc.) et la longévité des auteurs de BD a augmenté la charge de ce prix pour le Festival qui réussit de moins en moins à se faire financer par les sponsors. Il nous semble évident que ce qui faisait la spécificité du FIBD, à savoir son Académie, est en train de vivre ses derniers jours.
Au profit de quoi ? D’un suffrage de la profession dont le profil sera de toute façon contestable (sur les quelque 1300 auteurs repérés par Gilles Ratier, combien vivent vraiment de la bande dessinée ? Très peu), et les choix, j’en fais le pari, ne seront pas moins problématiques que dans les années précédentes.
"Pourquoi on fait un Grand Prix ?"
Telle est la vraie question qui mérite d’être débattue aujourd’hui. Il ne nous semble pas que ce nouveau mode de scrutin réponde à ces questions. Sous leurs oripeaux démocratiques, ces réformes ne résoudront rien. Elles obtiendront seulement de faire perdre plus encore son identité à un Prix qui n’avait pas démérité jusqu’à présent, en dépit de l’activisme récent de jeunes excités trop pressés de dégommer leurs aînés.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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