Après la magnifique somme de Paul Gravett, Mangas, soixante ans de bande dessinée japonaise (Éditions du Rocher, 2005), et l’exaltant Culture Manga de Fabien Tillion (Nouveau Monde, 2006), deux nouveaux ouvrages somptueusement illustrés viennent garnir notre bibliothèque de références.
Le premier, Mille ans de manga de Brigitte Koyama-Richard (éditions Flammarion, 2007) redonne une perspective particulièrement profonde à un art nous semble-t-il un peu hâtivement qualifié de millénaire. Une mise au point préalable introduite par l’auteure nous amuse d’entrée : elle s’étonne de la généralisation de l’usage du mot « manga » en Occident, alors qu’au Japon ce terme évoque désormais « des estampes de l’époque d’Edo et non des B.D. », le vocable « comics » étant davantage utilisé, selon elle, par les éditeurs et les libraires pour désigner les mangas en tous genres : « Paradoxalement, l’Occident a choisi le mot manga que le Japon n’utilise plus. » Avec un tel préalable, nous sommes prêts à toutes les remises en cause !
Néanmoins, en dépit de la richesse inouïe de l’iconographie et de l’application de l’auteure à nous offrir d’éclairantes rimes d’images qui ont du émoustiller son conseiller scientifique, le spécialiste Xavier Hébert, le parcours reste très scolaire et s’attache, certes avec intelligence et sérieux, aux grandes dates de l’histoire du genre : de Hokusaï à Bigot et de Tezuka à Clamp et Taniguchi. Le manque vient peut-être du fait que l’approche des analyses reste davantage cantonnée dans le domaine esthétique, alors que la véritable révolution des mangas réside plutôt, nous semble-t-il, dans la qualité et la diversité de ses histoires. Quand la spécialiste, d’ailleurs, se met à sortir de ce registre, notamment dans les pages consacrées à l’économie de ce médium, les informations se font plus confuses et moins bien référencées.
Ce qui n’empêche pas de faire de cet ouvrage une outil incontournable. Quelques intéressants entretiens avec plusieurs mangakas parmi lesquels Jirô Taniguchi ou Leiji Matsumoto viennent donner un utile contrepoint japonais à cette analyse.
Avec Manga, histoire d’un empire japonais de Benoit Maurer (Timée éditions, 2007), nous sommes dans une approche plus simple et, à tout dire, plus journalistique. Destiné à un public moins universitaire, ce volume propose un parcours agréable et efficace dans l’univers de la bande dessinée nipponne et se concentre sur la plupart des grandes séries publiées en France, de Dragon Ball à Naruto, en passant par les mangakas Shigeru Mizuki ou Clamp. Intelligemment structuré, s’attachant à l’essentiel, ce manuel pratique est une sorte de « mangas pour les nuls » qui devrait permettre à tout néophyte d’entrer dans cet univers avec les bases requises. Du très bon travail.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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