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Renart : "L’arrivée de Manolosanctis était une aubaine pour moi."

Par Baptiste Gilleron le 27 novembre 2009                      Lien  
Jeune lyonnais de 22 ans, sorti de l'école Emile Cohl, Renart fait partie des premiers auteurs édités par la jeune maison Manolosanctis. Il présentait son premier album, {Base Neptune} en avant-première lors du festival Quai des Bulles de Saint-Malo. L'occasion de le rencontrer et de le questionner sur l'évolution actuelle de la BD et sur ses premiers pas dans cette édition communautaire.

« Depuis des temps immémoriaux, les deux principales puissances de la planète, Neptune et Pluton, se livrent mutuellement une guerre sans merci. Séparés par une frontière naturelle riche et mystérieuse appelée Terre Neutre, les deux pays redoublent d’efforts afin de mettre au point la technologie qui saura définitivement évincer l’adversaire. Lorsque le journaliste Haufmein enquête sur la Base Neptune, il apprend que le Roi serait en possession d’une force capable de réduire Pluton à néant. »

Comment en es-tu arrivé à publier sur le site Manolosanctis ?

J’ai reçu un mail d’Arnaud (ndr : Arnaud Bauer, président de Manolosanctis) qui disait « voilà, on va lancer un nouveau site en ligne de bandes dessinées ». Il m’expliquait un peu le concept et ça m’a semblé assez intéressant parce que justement le principe était qu’il n’y ait aucune sélection, donc pas de refus du genre « ah bah non, ça va pas, t’es pas trop connu, ça va pas être vendeur ». Non, là c’était vraiment très libre, donc ça m’a donné envie de monter cette bande dessinée, Base Neptune, dont je n’allais rien faire si le site n’était pas né. C’était une aubaine pour moi, en fait.

Mais tu avais quand même déjà approché les éditeurs traditionnels ?

J’avais approché Delcourt, toutes les boîtes d’édition assez connues, sauf Casterman parce que j’était déjà en train de faire une BD pour eux. Et ça avait été assez accepté, enfin, dans le dessin. Les gens trouvaient ça pas mal mais ils pensaient que ça n’allait pas vraiment se vendre parce que je n’étais pas un nom, en fait. Du coup j’avais un peu laissé tomber.

Il a été question d’une édition papier assez rapidement, avec Manolosanctis ?

Je pense que, si on en a parlé aussi rapidement, c’est que la bande dessinée était bien avancée quand elle est arrivée sur le site. Du coup, oui, c’est vrai que ça s’est passé assez rapidement, en effet. Et j’ai eu aussi le soutien de Diglee, qui y a joué aussi pour pas mal dans le fait que ça a été beaucoup vu, puisqu’elle m’a fait un peu de pub.

Renart : "L'arrivée de Manolosanctis était une aubaine pour moi."
Extrait de Base Neptune
© 2009 Renart / Manolosanctis

La vocation de ce projet Base Neptune au départ était donc professionnelle ? Cela n’était pas un simple exercice personnel ?

Justement, en fait c’était le contraire. À la base, c’était un truc complètement pour m’amuser. En fait, je voyais que les blogs BD, ça marchait bien, moi je voulais faire un blog BD mais il ne se passe tellement rien d’intéressant dans ma vie que je me suis dit, ben je vais faire une BD où tous les jours les gens pourront voir des planches. J’avais le scénario dans la tête, donc au début je l’ai fait pour m’amuser justement et, petit à petit, je voyais que ça avançait bien, et au final c’est Bengal, dessinateur de Naja, qui m’a dit : « Il faudrait vraiment que tu le proposes parce que tu pourrais en faire quelque chose ». Le truc m’a trotté dans la tête et, après oui, j’ai vraiment bossé ça sérieusement.

Tu joues dans un univers de type science-fiction, mais avec une approche assez différente de ce qu’on a l’habitude de voir. D’où t’es venu cet univers ?

En fait, j’ai toujours rêvé de faire un genre de bouquin d’action où, au final, l’action serait vraiment ce qui importe le moins possible dans l’histoire. Si tu as vu Evangelion, c’est vraiment faire des mechas, des trucs qui vont plaire aux Japonais, pour au final passer un tout autre message. C’est un peu se servir du public et j’ai beaucoup aimé cette idée. J’avais envie de me développer là-dedans, de faire de la fausse science-fiction un peu à la Frédérik Peeters.

© 2009 Renart

Ce mélange graphique spontané et en bichromie semble nourri de nombreuses influences. Quelles sont celles qui se sont greffées sur ton style ?

Alors, graphiquement y’a un dessinateur que j’adore, et donc forcément ça se ressentira dans le dessin, c’est Blutch. Pour moi, c’est le meilleur dessinateur du monde, donc forcément, dès que je vois un dessin, j’ai envie de faire pareil. Il y a Frédérik Peeters aussi. Mais c’est vrai que, comme à côté je faisais une BD pro chez KSTR qui me prenait tout mon temps et qui était un peu laborieuse, j’avais envie d’avoir un trait plus lâché, quitte à faire des erreurs de proportion, quitte à ce que les décors ça soit deux arbres au fond. Du coup, ça m’a permis de plus me lâcher et de trouver des nouvelles approches graphiques avec le Pentel, qui est l’outil que j’utilise. Et au final, je trouve ça même plus joli que ce que j’ai pu faire pour KSTR et que ce que j’ai pu faire avant. Enfin, c’est un avis personnel, hein. L’autre plaira plus aux gens je pense, parce que c’est plus grand public, y’a des vraies couleurs partout, alors que ça c’est plus personnel.

Étais-tu lecteur de BD numérique/en ligne avant de rejoindre Manolosanctis ?

J’avais découvert, un peu avant, 30joursdebd, donc je suivais un peu certaines personnes, Johan Troïanowski, tout ça. Et donc j’ai déjà posté là-dessus et j’étais un fan de blogs, donc j’avais déjà une petite connaissance de la BD numérique. Par contre, j’ai vraiment découvert ces dernières semaines la bande dessinée sur iPhone et tous ces trucs-là, et pour ça, c’est vrai que je suis resté un peu out. Pour moi le numérique c’est vraiment la solution pour s’exprimer maintenant, ça s’est prouvé. S’il y a des gens qui n’y croyaient pas il y a 10 ans, ils ne peuvent plus nier que maintenant Internet, c’est le monde, quoi. Donc forcément, pour se faire connaître, ça passe forcément par Internet.

Selon toi, l’avenir de la BD passe donc obligatoirement par le numérique ?

La bande dessinée numérique qui recopie un album existant en papier, j’y crois pas du tout. Parce que ça s’adapte mal et on perd tout l’intérêt du truc en fait, par rapport à une belle BD que l’on dans la main, on perd même le graphisme finalement, c’est plus que de l’histoire pure. Surtout, quand on a du case à case, ça casse tout l’effet. Ça casse tout l’intérêt de la bande dessinée par rapport au cinéma. Par contre, il y a par exemple Balak qui a développé des bandes dessinées vraiment pour le numérique, donc ça devient limite interactif, y’a un jeu d’animations, et ça, ça me semble vraiment très intéressant et ça me trotte vraiment dans la tête. Je pense que cette solution de BD numérique a de l’avenir.

Renart, il est plutôt e-book ou bouquin physique ?

Bouquin physique, à n’en pas douter. Je ne sais même pas si on trouvera un auteur qui soit plus e-book que bouquin papier. Parce qu’on a tous été bercés dans notre enfance par des livres papier donc, heu... On sera plus e-book dans les prochaines générations. Je pense que, pour l’instant, c’est pas possible, je m’avance en disant ça, mais moi c’est papier papier.

Illustration pour Succube
© 2009 Renart

Tu as d’autres projets actuellement, un album à paraître chez KSTR, on peut en parler un peu ?

J’ai été contacté à la sortie de mon école par Antoine Ozanam. Enfin, c’est même moi qui l’ai contacté. C’est un scénariste assez connu de Casterman et, tout de suite, on a lancé l’idée de faire une bande dessinée autour de son sujet qui était Femme fatale, en fait. Et l’idée c’était que ce soit de l’écriture spontanée et du dessin spontané. Du coup, c’est allé vraiment vite dans la réalisation. Au final, on avait peur que ça ne soit pas très cohérent et finalement, je pense que ça a pris une bonne tournure et ça sera très fun à lire. Ça ne sera pas de la grande littérature mais ça sera vraiment assez cool. Ça va sortir en mai. Ensuite, cette année, j’attaque une bande dessinée complètement différente à la plume et au lavis pour Les Enfants Rouges, avec une scénariste. C’est une histoire beaucoup plus intimiste, complètement différente et ça va vraiment me changer.

Penses-tu renouveler l’expérience Manolosanctis ?

Oui, c’est même déjà en projet et ça va commencer dans un mois avec une nouvelle bande dessinée. Ca s’appelle Succube et ce sera en gros une adaptation du livre Le grand dieu Pan d’Arthur Machen. Enfin, c’est pas vraiment une adaptation, y’a presque plus rien de pareil, mais c’est quand même l’idée de base. Et ça parle d’une succube.

(par Baptiste Gilleron)

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2 Messages :
  • Renart a dit : "...ça m’a semblé assez intéressant parce que justement le principe était qu’il n’y ait aucune sélection"
    Ce qui est faux, puisque, sur le site de manolosanctis on peut lire : "...des albums... seront choisis par le comité de sélection pour être édités en version papier. "
    Donc il y a toujours une sélection...

    Répondre à ce message

    • Répondu par Baptiste Gilleron le 1er décembre 2009 à  12:51 :

      Il ne parlait pas de l’édition d’albums mais de la possibilité de mettre sa BD en ligne.
      Tout le monde peut publier en ligne sur Manolosanctis, c’est ensuite que se font les choix pour les albums papier.

      Vous pouvez en savoir plus sur leur fonctionnement dans l’article que nous leur avons consacré.

      Répondre à ce message

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