À un mois de l’attentat contre Charlie Hebdo le 7 janvier dernier, une réplique a eu lieu à Copenhague au Danemark hier. Une fusillade est survenue samedi vers 16h dans le centre culturel Krudttønden à Østerbro, au nord du centre-ville historique de Copenhague où se tenait un débat intitulé "Art, blasphème et liberté d’expression" en hommage à Charlie Hebdo. Le dessinateur suédois Lars Vilks, déjà menacé pour avoir caricaturé Mahomet avec un corps de chien en 2007 et dont la tête était mise à prix, participait également à cette rencontre, de même que l’ambassadeur de France François Zimeray, très sollicité par les médias danois depuis le 7 janvier dernier, et la chef de file des Femen, Inna Shevchenko. Une personne de 55 ans est morte et trois autres assurant la sécurité ont été blessées.
Quelques heures plus tard, c’est une synagogue proche qui est attaquée. Une personne assurant la sécurité des lieux a été tuée. Ce matin, la police aurait abattu un homme qui venait d’ouvrir le feu après une sommation. On pense qu’il s’agissait de l’auteur des deux attaques.
Le Danemark est sous le choc. On se souvient que c’est la publication des premières caricatures en septembre 2005 dans le Jyllands-Posten qui avait déclenché cette affaire. "Ils ne se sont absolument pas douté du phénomène et de l’ampleur que prendraient ces dessins... Pour eux c’était tout a fait normal, la liberté d’expression est très forte ici. Cela dit, le Jyllands-Posten commence maintenant a reculer après tous ces événements et ne désire plus publier de dessins..." nous dit Thierry Capezzone, un dessinateur français qui habite et publie au Danemark depuis 21 ans [1]. Mais aujourd’hui, il y a un fort sentiment de rage. La Première Ministre Helle Thorning affirme que le Danemark ne changerait rien à sa politique de liberté de la presse.
Mais des nuances commencent à faire jour : dans le feu des événements, un journaliste interroge un homme politique : "Enverriez-vous votre enfant assister à un débat sur la liberté d expression... N’avez vous pas peur ? "Le politicien quelque peu embarrassé est resté ferme", raconte Capezzone. Il y voit une situation qui va donner encore du grain à moudre aux partis extrémistes danois, déjà très populaires dans ce pays.
Une grande partie de la population n’avait d’ailleurs pas sur-réagi en 2007 lorsque Charlie Hebdo publia les caricatures du Jyllands-Posten : "Cela n’avait pas eu de retentissement particulier, nous explique Capezzone, mais aujourd’hui, après ces différents événements, les Danois ne peuvent s’empêcher de se sentir coupables. C’est pourquoi lors des derniers attentats parisiens, le soutien a été particulièrement important ici avec une couverture médiatique 24h sur 24 et une grande manifestation de soutien, malgré le froid."
Nous reviendrons sans doute encore sur cette affaire dans les prochaines heures.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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En médaillon : Portrait du suspect diffusé par la police danoise. DR.
[1] Cet ancien assistant de Kox sur L’Agent 212 (Dupuis) était venu au Danemark par curiosité et y est resté. On lui doit plusieurs BD sur Hans C. Andersen junior et une biographie sur la reine du Danemark. Il réalise actuellement plusieurs BD pour la France.
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