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Roma, une saga historique en hommage à Gilles Chaillet et à la Ville éternelle

Par Charles-Louis Detournay le 17 février 2015                      Lien  
À raison d'un tome tous les six mois, les éditions Glénat débutent une saga de treize albums évoquant l'histoire de Rome, de l'Antiquité à 2030 ! Se basant sur le travail préparatoire de Gilles Chaillet, ses proches, auteurs et amis se sont rassemblés pour transmettre sa passion pour l'Histoire en général et la Ville éternelle en particulier.

Nous avions à juste titre salué la mémoire de Gilles Chaillet lors de sa disparition en 2011. Nous écrivions alors : "...la santé de l’artiste s’était détériorée ces dernières années, le triumvirat de ses pensées : la bande dessinée, l’Histoire et Rome continuait [cependant] de le passionner." C’était sans savoir qu’outre Dioclétien paru chez Cognito et sa série des Boucliers de Mars->art15268] publiée chez Glénat, Gilles Chaillet travaillait également sur un gigantesque projet autour de cette même thématique :

Roma, une saga historique en hommage à Gilles Chaillet et à la Ville éternelle
Le premier cycle de cinq albums

« Gilles voulait raconter l’éternité de Rome à travers une grande fresque historico-fantastique de treize albums, de l’Antiquité jusqu’à un épilogue plus science-fictionnel basé en 2030, explique Didier Convard. La grande destinée de Rome est induite par le conflit des deux familles depuis leurs origines, mais colorée par ce fantastique lié à la statue du Palladium et qui symbolise sa malédiction. »

À la disparition de son époux, Chantal Chaillet avait souhaité que son dernier projet puisse être mené à son terme. Elle s’est donc tourné vers Didier Convard, qui a lui-même rassemblé autour de lui Éric Adam et Pierre Boisserie afin de finaliser les scénarios de cette saga. Quant au choix des dessinateurs, il avait été conduit par l’ambiance qu’il fallait conférer à chaque récit indépendant. Le premier tome a été confié à Régis Penet.

Un premier tome qui donne le ton de la saga

Et ce premier album qui vient de paraître débute l’histoire de Rome avec ... Troie ! C’est donc le siège homérique qui est évoqué tout au long de La Malédiction, le titre de cette entrée en matière.

On y fait notamment la connaissance de deux amis, Léonidas et Aquilon, deux officiers troyens qui dissimulent un lourd secret. Alors que Troie se rit des armées grecques amassées devant ses murs imprenables, deux jeunes ravissantes et mystérieuses jumelles arrivent aux portes de la cité fortifiée, tenant dans leurs bras une magnifique idole d’orichalque : le Palladium.

Celle-ci montre sa puissance en repoussant une escouade grecque qui allait les mettre en pièces. Il n’en faut pas plus pour que Troie l’élève au rang de culte, et que Léonidas et Aquilon n’épousent chacun une des jumelles, fondant ainsi deux familles. Mais les années passant, la malédiction du Palladium commence à faire son œuvre, précipitant Troie vers son destin

« Je n’avais encore jamais traité d’Histoire, dans le sens où je m’étais jamais confronté à des impératifs de documentation, explique Régis Penet, le dessinateur de La Malédiction. Heureusement, le premier tome de "Roma" était une bonne transition car la base du récit se partage entre Histoire et mythologie. J’ai donc pu aborder ce premier récit sans que la documentation soit écrasante, ce qui n’est par contre plus le cas pour le cinquième tome. »

Tome 1 "La Malédiction" - dessiné par Régis Penet

La force de Penet est effectivement de poser un contexte à mi-chemin entre le mythologique et l’historique. Mais son expérience dans le fantastique, surtout dans des récits plus sombres, lui permet de donner toute l’ampleur nécessaire aux pages qui mettent en scène la malédiction qui va frapper les deux familles et Rome, sur plus de trente siècles d’Histoire.

« Roma est le genre d’album qui vous fait dessiner pour partie de choses déjà exploitées auparavant, continue Penet, Vos temps forts, mais également vos temps faibles, à savoir des éléments que j’ai toujours contournés ou refusés de réaliser. C’est donc un bon mélange, une alternance de ce qu’on sait dessiner et de ce qu’on doit apprendre ou réapprendre à dessiner. »

Tome 1 "La Malédiction" - dessiné par Régis Penet

En mêlant habilement petite et grande histoire, ce premier tome de Roma tient le lecteur en haleine. Le travail de découpage et cadrage proposent des perspectives dynamiques afin de jouer sur l’émotion et la violence de certaines séquences, tout en évoquant la puissance de personnages-clés !

« Je travaille beaucoup en champ/contre-champ, tout en suivant bien entendu les indications scénaristiques, explique Penet. J’aime beaucoup ces scènes-clés de milieu d’album, ce qu’on peut appeler scénaristiquement parlant des "climax médians". Cette scène est d’ailleurs la plus longue du récit, car elle est très importante : c’est le moment où la malédiction se met vraiment en place. Comme cette scène dramatique doit éveiller des sentiments à la lecture, je travaille beaucoup mon storyboard afin de vérifier que les émotions percolent bien jusqu’au lecteur. Dès que je pense avoir atteint le bon niveau, je me lance alors dans le dessin, en tâchant de ne pas trop intellectualiser mon travail, afin que les sentiments demeurent nets. »

Tome 1 "La Malédiction" - dessiné par Régis Penet

Malgré une ficelle un peu trop grosse qui permet de raccrocher la chute de Troie à la création mythologique de Rome par Romulus et Rémus, ce premier tome de Roma convainc d’emblée. Les fans d’Histoire devront certainement attendre des épisodes plus authentiques pour être comblés, mais le cadre de la saga est posé, et on attend maintenant que l’habilité des scénaristes nous entraîne dans une passionnante aventure historique et éditoriale.

Tome 1 "La Malédiction" - dessiné par Régis Penet

Un deuxième tome qui sort en été

Le projet de Roma repose effectivement sur une publication semestrielle. Luca Erbetta qui a dessiné le tome 2 lève pour nous un coin du voile de la suite de cette saga :

« Le prochain opus traite de la conquête d’Hannibal, en pleine période sénatoriale, et sa grande marche vers Rome. Le scénario alterne de grands plans cinématographiques ainsi que des séquences plus denses et plus rythmées. J’ai surtout voulu privilégier la grandeur des batailles avec des milliers d’hommes qui s’affrontaient, mais aussi les moments plus intimes qui mettent les personnages en avant et permettent de faire vivre leurs émotions. Le lecteur sera donc incorporé dans la mêlée humaine de la bataille, mais je désirais également lui donner du recul afin qu’il comprenne bien ce qui était en train se passer. »

Féru d’Histoire, et surtout de Rome, Gilles Chaillet truffait ses scénarios de détails historiques. En quittant la partie quasi-mythologique de Troie, les auteurs des prochains tomes ont donc dû accumuler beaucoup de documentation pour respecter le ton donné par l’auteur de Vasco.

Tome 2 - dessiné par Luca Erbatta

« Heureusement, beaucoup de documents et de films existent sur cette partie de l’Histoire, explique Luca Erbetta. Pour ma part, je me suis renseigné surtout sur les costumes militaires, afin de donner du crédit historique à mon album. Outre le plan historique, nous allons continuer à suivre la descendance de ces deux familles, ainsi que leur évolution face à la malédiction du Palladium. Tout ceci influence la vie des personnages. »

Jules César et Cléopâtre : amour et stratégie politique

Si le quatrième tome traitant de Caligula a été confié à Christian Gine avec qui Gilles Chaillet avait d’ailleurs réalisé la série des Boucliers de Mars, c’est Annabel qui dessine le troisième tome de Roma centré sur des personnages tout aussi emblématiques, ainsi qu’elle nous l’explique :

« Je me suis surtout axé sur l’histoire d’amour entre César et Cléopâtre. Comme les deux personnages et leur passions sont très connus, voire emblématiques, j’ai un premier moment d’inquiétude lorsque j’ai dû les mettre en scène. Mais finalement, grâce à l’appui du scénario, César et Cléopâtre se sont mis à vivre assez naturellement sous mon crayon. Concernant César, un personnage devenu presque un archétype, je me suis surtout axé sur son caractère humain, et son histoire d’amour. J’ai aussi voulu donner de la profondeur à Cléopâtre, dans ce que je pouvais interpréter du scénario. Je me suis surtout demandé ce qui l’avait motivé : la stratégie politique ou l’amour ? C’est ce que je trouvais fascinant dans cette histoire, et notre album apporte sans doute une réponse possible à cette question troublante. J’ai beaucoup travaillé les regards et les visages dans les scènes où ils ne sont qu’à deux : afin qu’on puisse identifier s’ils étaient dans la retenue et la réserve, ou s’il y avait au contraire de la profondeur dans leur relation. Ni l’un, ni l’autre ne se livre ou ne s’abandonne complètement, mais on passe par différentes étapes. J’espère que ces nuances et ces ambiguïtés transparaîtront à la lecture des différentes séquences. »

Tome 3 - dessiné par Annabel

Le motif central du Palladium et des deux familles demeure bien entendu dans chaque album de façon à maintenir l’intérêt du lecteur. C’est logiquement le cas avec ce troisième opus.

« Dans cet esprit de la petite histoire dans la grand Histoire, je me suis aussi attaché à une petite vestale qui m’a beaucoup touchée, nous confie Annabel. Faisant partie d’une des deux familles, elle a le courage de s’opposer à la volonté du Palladium, ce qui rend ce personnage attachant et le récit en devient passionnant. De par son rôle de servante du Palladium, cette jeune femme a des visions, elle va tenter d’avertir César des désastres implacables qui l’attendent. J’ai été intéressé par le destin de cette gamine dans la Rome antique (une place pas toujours enviable). Cette interaction entre les personnages historiques et fictifs est passionnante. Même si tout le monde connaît les destins tragiques qui attendent César et Cléopâtre, l’interprétation, l’approche et la symbolique du Palladium font de "Roma" une belle saga. »

Tome 3 - dessiné par Annabel

Un récit néanmoins historique

Si le concept original de cette saga qui embrasse toute l’histoire de Rome est assez inédit, la série assume son aspect fantastique sans renier l’Histoire, la grande passion de Gilles Chaillet. Ainsi, chaque tome contiendra un dossier de huit pages réalisées par l’historien Bertrand Lançon.

« Le premier dossier traite de la passion que Gilles [Chaillet] portait à l’Histoire et à Rome en particulier, explique Didier Convard. On se rappelle en effet de ce qui constitue la pièce maîtresse de son œuvre : l’imposant Dans la Rome des Césars (Glénat). Les dossiers de tous les albums suivants seront des compléments réellement historiques des faits traités dans le récit poursuit Convard,. En tant que scénaristes, nous utilisons les dates et les faits pour servir la trame. Dans son dossier, Bertrand Lançon remettra en situation historique les éléments que nous aurons évoqués. »

Une partie de l’équipe au service de "Roma" (de g. à d.) : Luca Erbatta, Didier Convard, Chantal Chaillet (arborant l’aigle), Régis Penet & Annabel

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Lire également notre interview de Chantal Chaillet & Gilles Convard : « Pour réussir la saga de "Roma", il faut faire preuve d’humilité, afin respecter le projet de Gilles Chaillet »

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