Apprenti Chevalier concourant pour l’armure d’or du Sagittaire, Sisyphe a pour unique horizon la figure de son frère, Illias, Chevalier d’or du Lion, considéré comme le plus grand héros du Sanctuaire. Mais cette admiration sans bornes menace sa propre destinée et il lui faudra rendre visite à l’oracle de Delphes pour tenter de tracer son propre chemin.
Très introspectif, ce volume met l’accent sur les errements de l’apprenti, prisonnier d’un idéal incarné par une figure tutélaire trop forte, ici celle du grand frère. Le motif, classique au sein de la mythologie Saint Seiya, se voit ici encore une fois habilement investi par Shiori Teshirogi, parfaitement à l’aise quand il s’ agit de creuser la psychologie des personnages.
On peut y voir en outre deux autres facettes de son travail sur la licence : l’approfondissement de cette mythologie puissante mais laissée en jachère par son auteur, Masami Kurumada, combiné à une dimension réflexive sous-jacente.
Du côté de la mythologie, c’est la figure d’Ilias, chevalier disparu avant même le début de la Guerre Sainte qui emporte le morceau et renvoie le récit toujours plus loin dans le passé. Comme si la mangaka cherchait, par les aventures qu’elle narre, à remonter le temps, passant de l’élève au maître, du petit frère au grand. Les générations antérieures de chevaliers se succèdent, ne se contentant pas de demeurer de simples mentions et prenant corps au contraire au cours de ces histoires.
Mais le parcours de Sisyphe, qui porte pleinement le poids de la grandeur de son frère, et se trouve tiraillé entre son sentiment de filiation et une aspiration à l’émancipation, envisagé dans cette perspective particulière de relation entre maitre et élève légèrement décalée, peut également suggérer une lecture reposant sur la dimension réflexive de ce schéma.
Au-delà des deux chevaliers, ce seraient alors les situations de Shiori Teshirogi et Masami Kurumada qui pourraient se donner à lire, la première devant trouver sa propre voie dans la gestion de l’héritage du second. Ou encore les liens entre la mangaka et ses anciens assistants, volant désormais de leurs propres ailes, mais venus l’aider exceptionnellement sur ce volume, à qui elle rend hommage dans le mot ouvrant le tome.
S’il y a donc bien des choses intéressantes dans ce Lost Canvas Chronicles dédié au Sagittaire, il y a aussi cependant un véritable souci, sorte de point aveugle de ce projet précis : il y manque quelque chose de l’ordre de l’action, simple et directe, permettant l’explosion attendue du cosmos des protagonistes.
Perdu dans les sentiments, le relationnel et l’intériorité, ce récit en oublie presque le plaisir de la pure confrontation que l’on ne fait qu’entrapercevoir à la fin du tome, ce qui laisse de l’ensemble une impression mitigée.
(par Aurélien Pigeat)
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Saint Seiya The Lost Canvas Chronicles T10. Par Shiori Teshirogi. Traduction Pierre Giner. Kurokawa. Sortie le 24 juin 2015. 208 pages. 6,80 euros.
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