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Seth, Dupuy & Berberian au Centre Culturel du Canada à Paris

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 21 janvier 2004                      Lien  
Belle initiative du Festival d'Angoulême que ce débat entre le dessinateur canadien Seth et les dessinateurs Dupuy et Berbérian en présence de Chris Ware au Centre Culturel du Canada à Paris.

La réunion était sans façon et les auditeurs avaient du mérite d’être venus alors que la circulation parisienne était paralysée par la pluie et les grèves du service public. On y découvrit le dessinateur Seth, un élégant dandy aux lunettes rondes semblant sorti tout droit d’une revue des années vingt. Il était présenté au public par ses découvreurs en France, Philippe Dupuy et Charles Berbérian, qui avaient convaincu Sébastien Knaedig, alors aux Humanos, d’accueillir le jeune auteur publié par l’éditeur canadien Drawn and Quaterly dans la nouvelle collection Tohu-Bohu. Depuis le départ de Sébastien pour Marcinelle, Seth a signé pour ses nouvelles publications au Seuil et chez Casterman.

Un air de famille

L’introduction au débat faite par Julien Bastide a aussitôt orienté la conversation sur cet « air de famille » qui semble unir ces auteurs venus d’un côté et de l’autre de l’Atlantique. Charles Berbérian évoqua une « génération Chaland », à laquelle il associe Joost Swarte, Serge Clerc ou Ever Meulen, passionnée de ligne claire, forgeant une esthétique en référence aux codes inventés par Hergé. Mais, dans le même temps, il revendique un héritage semblant opposé à l’école belge : celui de Crumb. Berberian dit qu’il a redécouvert Hergé au travers du travail de Chaland, de même que les grandes signatures de la publicité comme Willemot ou Savignac, des gens qui « en faisaient le moins possible pour exprimer le plus possible ». Ce sont ces codes-là que Berbérian semble avoir retrouvés chez Seth.

Seth, Dupuy & Berberian au Centre Culturel du Canada à Paris
Seth, Charles Berberian & Philippe Dupuy
soumis à la question par Julien Bastide

Des influences parallèles

De son côté, Seth parle d’une ligne claire présente également dans les Peanuts de Charlie Schulz, mais également ce Chaland qui « traite la ligne claire avec le pinceau », conservant malgré tout une perspective d’un fascinant réalisme. Il confirme qu’il a étudié Chaland de très près. Mais il revendique aussi l’héritage de ces cartoonists qui publiaient dans le New Yorker entre 1920 et 1959 capables d’entreprendre un dessin complexe avec une ligne très pure.

Les vertus de l’édition indépendante

Le co-auteur de Monsieur Jean fit également le parallèle entre L’Association et une structure semblable comme Drawn & Quaterly défendant une approche de la BD radicalement différente des « glénateries » qui tenaient alors le haut du pavé, reproduisant à l’envi des séries ressemblant aux albums de Juillard. De l’autre côté de l’Atlantique, le petit label éditeur de Seth prêchait lui aussi dans un désert. Quelques années plus tard, les graphistes issus de ces deux petits labels sont courtisés par les plus grands éditeurs.

Une simplicité enfantine

Sur une question du public concernant le caractère autobiographique de son travail, une tendance propre aux auteurs de l’Association, Seth temporise son appartenance à ce mouvement en constatant qu’il est irréaliste de bâtir une œuvre profonde qui soit le reflet de la vie ou de soi-même avec un vocabulaire graphique qui est celui du livre pour enfants. Philippe Dupuy rebondit sur cette idée pour évoquer toute l’ambiguïté de ce style de dessin qui souffre de reconnaissance à cause de sa simplicité car, dans l’esprit des gens, « simple veut dire enfantin ». Or, dit Philippe Dupuy, on sait que les enfants sont des êtres complexes. Ces a priori lui paraissent entretenir un vieux malentendu qui affecte la bande dessinée.

Entourant Chris Ware,
Philippe Dupuy, Seth, Charles Berbérian et Jean-Marc Thévenet, le directeur du Festival d’Angoulême.

Le « troisième continent » de la Ligne Claire : Osamu Tezuka

Charles Berberian conclut le débat en évoquant « le troisième continent » de la ligne claire qu’est le travail du dessinateur japonais Osamu Tezuka, un dessinateur qu’il a découvert l’année dernière, et qui suscite chez lui la même séduction que chez Hergé, alors que chez lui, la nostalgie ne joue aucun rôle. « Il n’y a aucun effet madeleine constate-t-il. Il y a, chez Tezuka, comme une mélancolie de l’adolescence ». Et un style graphique qui prouve que la ligne claire n’est pas le simple fait d’une persistance des souvenirs d’enfance.

Hergé, Chaland, Tezuka, en passant par Swarte , Ever Meulen, François Avril, Dupuy & Berberian et Seth… Il s’agit bien là d’une famille dont la généalogie reste encore à étudier.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Photos : D. Pasamonik

 
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