On avait vu dans le procès intenté par la LICRA contre Siné une atteinte à la liberté d’expression ou dans celui des Islamistes contre Charlie Hebdo une tentative de poser un acte de censure. Ce n’était ni l’un, ni l’autre, juste l’expression d’une liberté, celle pour tout citoyen de saisir un tribunal pour lui demander si tel ou tel acte est répréhensible et qu’il en obtienne ou non la condamnation. C’est ainsi que se construisent les équilibres dans une société : par l’expression de forces contradictoires sanctionnées par la loi.
Charlie Hebdo a été relaxé dans le procès que lui firent les Islamistes. Claude Askolovitch le sera probablement dans le procès que lui intente Siné pour diffamation alors qu’il avait déclaré sur les ondes de RTL, à la suite d’un article du dessinateur publié dans Charlie Hebdo le 2 juillet 2008 : « C’est un article antisémite, dans un journal qui ne l’est pas » [1] car, comme le souligne la Procureure de la République dans son réquisitoire : « Le débat n’est pas de savoir si M. Sinet est antisémite, ni de savoir qui des pro-Siné et des pro-Val détiendrait la vérité, ni si M. Askolovitch a une responsabilité dans le licenciement de M. Sinet », mais bien de savoir si oui ou non Askolovitch a diffamé Siné. Elle conclut que non : il émettait là « une opinion » et que son expression était nécessaire à la liberté de la presse.
C’est paradoxalement la même logique qui régit l’arrêt rendu par le tribunal de Lyon qui relaxe le dessinateur du procès que lui faisait la LICRA pour « incitation à la haine raciale ». Le Tribunal suit la réquisition du parquet de Lyon qui, le 28 janvier dernier, avait expliqué que, même si les propos du dessinateur pouvaient être considérées comme « violents », ils ne se situaient pas sur « le terrain de la provocation à la haine, mais sur celui de l’outrage ».
Un partout ? Non. C’est la liberté d’expression qui gagne dans les deux cas. Le scandale aura fait un heureux : Siné qui, grâce à lui aura créé son propre journal Siné Hebdo dont les ventes en kiosque ont probablement écorné celles du journal de Philippe Val.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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En médaillon : Siné. Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD).
[1] Voir [notre dossier réalisé à propos de L’Affaire : Siné contre Charlie Hebdo.
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