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Sparte T1 : Ne jamais demander grâce – Par Patrick Weber & Christophe Simon – Le Lombard

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 13 septembre 2011                      Lien  
Elle est séduisante, la nouvelle série de Weber et Simon au Lombard qui situe son récit dans le grand siècle de Sparte. Les complots et les intrigues ne manquent pas dans cette partie de l’antiquité. Pour un scénariste-historien, il suffit d’ouvrir les livres pour déborder d’idées. Mais est-ce suffisant pour faire une bonne série ?

La recette avait été initiée par Jacques Martin, et avant lui les grands auteurs de romans historiques du 19e : Scott, Dumas, Sienckiewicz, Bullwer-Lytton sans oublier le Flaubert de Salammbô ! Tout le charme de ces récits épiques réside dans la reconstitution de ces civilisations d‘autant plus fascinantes qu’elles ont disparu malgré leur raffinement et la munificence de leurs apports à notre culture.

On sent la compétence dans le scénario de Patrick Weber, sa profonde connaissance de l’histoire antique et sa capacité d’en sortir des personnages qui ont marqué leur temps. Le scénariste, journaliste, homme de télé et de radio, auteur d’essais et de romans à succès, surnommé « le Stéphane Bern belge » en raison de son attachement à la royauté et de sa présence au moindre mariage princier, commence à avoir de la bouteille y compris dans la bande dessinée où il aligne projet sur projet. Normal pour ce Belge qui débuta il y a vingt ans dans les pages de Spirou et qui accompagna les dernières créations de Jacques Martin, notamment sur Alix.

C’est d’ailleurs là qu’il rencontre Christophe Simon qui œuvra dix ans avec le maître de Bruxelles sur ses séries Orion, Lefranc et Alix. Faisant cavalier seul, Simon, dont le dessin est pétri d’académisme, se détache peu à peu de la gangue maniériste du style Martin. Excellent dessinateur, Simon n’a pas son pareil dans l’évocation des scènes de gymnase qui ne manquent pas dans cette histoire, dont le secret réside précisément dans le corps.

Solidité des références historiques comme du dessin, donc. Mais pourquoi donc alors l’histoire n’accroche-t-elle pas ? Difficile à dire. L’intrigue est correctement ficelée mais à la différence du modèle martinien, la lenteur n’y a pas sa place. Les dialogues du fondateur de l’école belge étaient, comme ceux de Jacobs, ampoulés et abondants, mais ils avaient le mérite de faire s’attarder le lecteur sur l’image dans laquelle le dessinateur pouvait faire abonder le détail. Comme dans une visite guidée, le spectateur peut s’interrompre pour regarder un objet de près en faisant un instant abstraction du commentaire.

Idem pour le dessin de Christophe Simon. Si l’on peut apprécier la qualité de ses anatomies, on aimerait que ce même effet de réalité et son aptitude à la sensualité se porte également sur les décors, les costumes, les matières…, non pas dans leur justesse, mais dans leur ressenti.

Sparte est une lecture décevante, en dépit de ses promesses et de l’indéniable talent de ses auteurs. Peut-être ont-ils simplement manqué d’ambition.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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4 Messages :
  • C’est une des critiques les plus dures lues sur ce site depuis longtemps.

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    • Répondu par Frencho-id le 13 septembre 2011 à  19:06 :

      À mesurer à l’aune d’autres critiques qu’ici même on est tenté, parfois (pas souvent, il est vrai), de juger complaisantes. Tant qu’il n’y a pas d’attaques ad hominem, le jugement reste libre, et il me semble bien avoir lu sur ActuaBD des textes autrement plus acides, sous la plume de Didier Pasamonik notamment.

      P.-S. C’est peut-être pas l’endroit mais ça me semble le moment (ou jamais) : tous mes bravi pour Animal Lecteur, ainsi que pour l’ultime Jojo, qui était drôlement chouette.

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  • Je ne trouve pas la critique dure, mais assez juste. Je pense que Patrick Veber en fait trop (livres historiques, roman, BD, télévision, il fait même des articles pour la revue d’Electrabel) et n’a pas le temps de "peaufiner" ses divers travaux. C’est dommage. A mon avis, il n’est pas dénué d’un certain talent, mais s’il se dispersait moins, il ferait de bien meilleures choses. Quand à Christophe Simon, je préférais l’époque où il était cornaqué par Jacques Martin du temps de sa gloire. Son Orion était je trouve excellent. Ses Lefranc furent hideux (excusez-moi, mais je n’ai pas d’autres mots), ses Alix passables (trop de gros plans, pas tellement dans l’esprit Jacques Martin je trouve).
    J’ai acheté cet album, mais je le regrette : on retrouve tous les défauts de ses Alix, mais de manière encore plus flagrante. Oserais-je parler d’académisme pompier ? Je ne supporte pas ces corps surmusclés offerts en pâture à chaque page. Pourtant je suis sûr que lui aussi pourrait nous faire quelque chose de chouette, s’il pouvait être suivi par un éditeur qui en tirerait le meilleur parti. Il a la technique, c’est sûr, ne reste plus qu’à la faire oublier ...

    Richard

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  • Très bonne critique, argumentée, à propos d’une BD qui ne mérite vraiment pas mieux. Je dois dire que ça change des "critiques" d’un autre site BD (commençant par la même lettre ) qui ne sont que le résumé de l"intrigue dans un style passe partout et avec une langue de bois qu’envieraient beaucoup de politiciens ;-)
    Actua BD est un site crédible car journalistique au sens noble du terme.

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