Le principe d’écriture de The Activity est à présent fermement posé : de nombreux théâtres d’opération, pour des bouts de missions, diverses dans leurs procédures, mais à chaque fois cruciales et périlleuses. Et une action le plus souvent amorcée in medias res pour renforcer le réalisme des situations ainsi que le sentiment d’immersion.
La préface attribuée à un ancien membre de ce type d’unité, devenu conseiller de Nathan Edmondson dans l’élaboration des épisodes, vise d’ailleurs à assoir la légitimité des auteurs dans leur entreprise.
De la République Démocratique du Congo à l’Ouzbekistan, en passant par la Somalie, les Philippines, la Biélorussie ou encore Minneapolis, les membres d’Omaha sillonnent le monde pour fournir des soutiens à certaines factions rebelles favorables aux intérêts américains, éliminer ou récupérer des cibles désignées ou bien obtenir des renseignements particulièrement sensibles dans le domaine du terrorisme international.
Deux aspects frappent particulièrement à la lecture de ce tome. Le premier concerne la peinture de la psychologie des personnages. On découvre, de façon directe, l’étendue des sacrifices personnels que leur engagement les conduit à effectuer. Qu’il s’agisse de leur vie privée, soumise aux mêmes contraintes que leur vie professionnelle, la première étant inféodée à la première, ou de leurs états d’âmes et préoccupations éthiques.
Deux épisodes explicitent ainsi les choix qu’ils doivent opérer, la pleine connaissance qu’ils ont des conséquences, parfois dramatiques, que leurs actes vont avoir sur la vie d’individus qui les auront pourtant aidés. La mise en scène sert d’ailleurs directement ces questionnements, par le poids du silence d’une part, par les dialogues contradictoires d’autre part.
Se dégage, de manière très crue et violente, une dimension tragique, propre au dilemme, qui fait parfois froid dans le dos : Justice et morale se retrouvent en certaines occasions sacrifiées sur l’autel d’intérêts supérieurs ou simplement opérationnels.
Le second aspect touche à la résonance particulière d’une des intrigues avec les événements que nous venons de vivre à Paris. Il s’agit d’ailleurs de la seule qui se passe sur le sol américain. L’Effet Papillon détaille le déroulement d’une intervention pour empêcher la réalisation d’une attaque terroriste dans une grande ville : trois kamikazes, équipés de ceintures d’explosifs, et cherchant à se faire sauter dans un stade au début d’un match. L’écho avec ce qui s’est produit le 13 novembre dernier au Stade de France saisit, même si le reste de l’épisode offre bien entendu un développement, globalement idéalisé, bien différent de ce que nous avons connu.
Sombre, The Activity creuse les ténèbres du monde dans lequel nous vivons, côté ressources militaires. Et après deux volumes constitués d’opérations déconnectées les unes des autres, la série amorce une forme de fil rouge à travers une questionnement, plus classique, et peut-être romanesque, sur le potentiel double jeu de certains agents. À suivre avec intérêt dans le tome 3.
(par Aurélien Pigeat)
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The Activity T2. Par Nathan Edmondson (scénario) et Mitch Gerads (dessin). Traduction Thomas Davier. Urban Comics, collection "Indies". Sortie le 09 octobre 2015. 168 pages. 15 euros.
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