Indéniablement, la collection "WTF ?!" d’Akata porte bien son nom. Car avec Tu seras un saumon, mon fils, on se situe effectivement dans le plus grand n’importe quoi possible. Le manga, série courte en deux volumes, débute par une olympiade bien particulière au cours de laquelle une bande de collégiens concourt pour savoir qui éjacule le plus loin, mesurant la distance de jets propulsés par des techniques plus grotesques les unes que les autres.
Et à ce petit jeu Shion est un expert. Ce qui lui vaut l’admiration sans borne de ses copains. Mais patatras : tout bascule le jour où sa mère se remarie. Petits frères et sœurs en vue, déménagement à la campagne et nouveau nom, qui devient, accolé à son prénom, véritable marque d’infamie, mais ne pouvait pas mieux tomber non plus : Masterba (Shion) ! Les moqueries s’ensuivent dans sa nouvelle école, au point que le garçon se soulage dans la rivière afin de passer ses frustrations et d’extérioriser son mal-être.
Et d’être mal formé il va être question puisque des œufs de saumons tapissant le lit de la rivière naît un hybride mi-homme, mi-saumon, qui après un périple en Alaska revient pour découvrir l’identité de son père. Une rencontre en provoquant d’autres, Shion va en fin de compte réapprendre à communiquer.
Tu seras un saumon, mon fils est avant tout extrêmement drôle, du fait d’un humour potache totalement assumé qui multiplie les situations gênantes et n’hésite pas à placer ses personnages dans des postures particulièrement embarrassantes. Exhibitions, éjaculations et autre bastons rythment le volume dans un registre plutôt situé sous la ceinture pour un comique sans retenue assez jubilatoire, porté par un personnage de monstre tout à fait incroyable, vraie trouvaille de Shohei Sasaki.
Mais le manga se révèle aussi plutôt malin dans la façon de décrire l’adolescence, ses errements et ses ridicules traités avec indulgence pour ne pas dire affection. Entre ses soucis de camaraderie, son tiraillement entre romance et pulsion et son dysfonctionnement familial, Shion a fort à faire et son aventure aura une portée cathartique majeure, qui confère un certain sens, sans grande prétention ni beau discours, ce n’en est que plus louable, au récit.
Objet atypique s’il en est, Tu seras un saumon, mon fils, constitue donc une réelle curiosité à côté de laquelle il serait dommage de passer.
(par Aurélien Pigeat)
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