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Une rentrée 2015 particulièrement spirituelle chez Fluide Glacial

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 24 août 2015                      Lien  
Avec Daniel Goossens et Romain Dutreix comme apôtres, la bonne parole glaciale de Marcel Gotlib, le messie de l'humour, devrait recruter encore bien des adeptes à la rentrée, d'autant que de nouveaux arrivants pratiquent avec ferveur...

Jésus revient, OUI, mais il n’est pas seul, il est accompagné de son prophète Daniel Goossens qui, sous ses airs d’intello est un sacré déconneur. On a tous un combat à mener dit le prophète (Goossens, on vous l’a dit), aussi a-t-il, en Prométhée de l’humour, décidé de répertorier pour cette rentrée tous les combats à mener, les petits, les grands, les prestigieux, les dérisoires...

Une rentrée 2015 particulièrement spirituelle chez Fluide GlacialSurtout les dérisoires. Et l’air de rien, les combattants sont nombreux, même s’ils laissent tomber au premier moment d’abattement, Dieu le père le premier, soit dit en passant et sans chercher à cafter. Alors, combat perdu pour combat perdu, il se dégage de cette litanie une petite philosophie de la vie qui Goossens synthétise dans une logique implacable soulignée par un petit sourire têtu. Chef-d’œuvre évidemment, parfait antidote de la rentrée à prendre immédiatement après l’absorption malencontreuse d’une info de BFM TV ou d’un dessin de Plantu.

Berstein et Pluttark ont passé une partie de l’année à s’empiffrer d’hamburgers et en ont tiré, dans Fastefoode ® un précis sociologique de la vie dans les établissements de restauration rapide, devant et derrière le comptoir. C’est simple, efficace, intelligent et bigrement roboratif. Mais vu ce qu’il ressort du caractère peu ragoûtant de cette cuisine sans cuisinier, le lecteur en restera après cela, on le suppose, aux nourritures spirituelles, c’est plus sûr.

Space Serenade de Nikola Witko et Claude Comète nous fait découvrir les mille et un territoires, jusqu’ici ignorés, des pratiquants de l’amour : les zombisous qui veulent absolument vous imposer leurs Free Hugs dégueulasses, l’ultraromance à langue baveuse et nouée, l’hétérobot qui compense la pénurie des vrais mâles, mais dont l’usage abusif peut mener à une attirance déviante pour toute mécanique quelque peu vibratoire, sans parler des planètes éloignées peuplées de cyclopes bien membrés aux gênes italiens... Dans une jolie bichromie vintage, ces OVNI de l’amour offrent d’immenses perspectives d’exploration pleine d’humour et de fantasmes.

Émilie voit quelqu’un de Roszjman et Rouquette vous invite à vous caler dans le fauteuil... d’un psy. Émilie, petite prof frustrée, souffre d’un "trouble d’angoisse généralisé", d’une dépression, quoi. Normal me direz-vous en ces temps de rentrée... Entre petit copain lobotomisé par la TV, collègues prévenants-collants et meilleur ami complètement geek, elle n’a personne vers qui vraiment se tourner. Alors pourquoi pas un psy ? Mais la chose n’est pas, au début du moins, une partie de plaisir et ses relations avec son entourage s’en trouvent complètement chamboulées...

Le deuxième volume d’Impostures de l’excellent Romain Dutreix revisite, comme dans une psychanalyse, les moments refoulés des lectures de notre jeunesse : Gaston, Spirou, Rahan, Les Schtroumpfs, Hulk, Le Chat de Geluck, Olrik, Tintin et le Capitaine Haddock, Corto Maltese, Superdupont, mais aussi les personnages de Bilal, de Quartier Lointain ou Le Chat du Rabbin pour les investir dans de drolatiques aventures contemporaines. L’une des séquences les plus drôles est celle où SuperDupont se fait remonter les bretelles en raison de son humour "touchy" : plus de second degré, l’humour sera désormais 1er degré !, lui intime-t-on, point barre ! Mais les délires interprétatifs d’Alain Soral ou de BHL tournent en boucle quoiqu’il advienne... On a beaucoup aimé celle du Chat du Rabbin qui subit les affres d’un dessinateur qui commence à mélanger les 15 séries qu’il fait de front. Jouissif.

Les Bidochon et Binet (qui compose aussi de la musique dans ses moments rarement perdus) font orchestre avec François Sabatier dans Un Jour au concert avec les Bidochon. On y découvre ce que apprendre en s’amusant veut dire, d’autant que 2 CD accompagnent l’album.

En octobre, comme Sarkozy, Lindingre et Aurel entrent en campagne en nous promettant "la politique au ras des pâquerettes". Ça va être dur, la rentrée...

Enfin, Pixel Vengeur et Mo/CDM nous revisitent le conte des Trois Petits Cochons dans "Les 3 Petits Cochons reloaded". Version trash. Petits salopiauds, va !

En octobre encore, un album sur SuperDupont qui sera, comme on vous l’a déjà annoncé, la star de cette fin d’année. Intitulé "Il était une fois SuperDupont", il s’agit d’un collectif en hommage au super-héros de Gotlib, Alexis et Lob. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Les 40 ans de Fluide Glacial continuent de se fêter à travers 12 albums majeurs. Cette rentrée consacre L’Encyclopédie des bébés T. 3 : psychanalyse du nourrisson de Goossens et le T. 3 de Litteul Kévin pour lequel le regretté Coyote avait livré des dessins inédits. Des classiques de l’humour qui rappellent que le terme "spirituel" recouvre d’autres valeurs que les opiums du peuple, qu’ils nous viennent d’Orient ou d’Occident.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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