Il est assez insolite qu’un livre contienne un mode d’emploi. Mais pour Vanille ou Chocolat ?, la démarche se justifie assez aisément : le lecteur tient entre ses mains une BD unique en son genre, sorte de style littéraire inédit inspiré des aventures dont on est le héros. Autant dire que sa lecture requiert une participation active afin de se repérer au sein de la structure complexe de l’ouvrage à base d’algorithmes mise en place par Jason Shiga, sans doute aidé par sa formation de mathématicien.
À partir d’une interrogation très banale à propos d’une crème glacée -vanille ou chocolat ?-, nous voilà plongés dans les aventures de Jimmy à travers un système d’onglets permettant de sauter d’une page à l’autre, et via des tubes de couleur d’une case à l’autre sur une même page, en fonction des choix adoptés au gré des circonstances narratives. À cela s’ajoutent des codes que seuls les plus attentifs parviendront à déchiffrer... Au final, pas moins de 3856 scénarios possibles !
Autant dire que Vanille ou Chocolat est une expérience de lecture sans cesse renouvelée qui, au delà de l’originalité du genre, réserve bon nombre de surprises et de rebondissements à partir de l’instant où l’on parvient à introduire Jimmy chez le professeur K et ses machines tout autant excitantes qu’infernales. Si de rares chemins mènent rapidement au mot « fin », les lecteurs les plus téméraires se réjouiront de tirer les fils d’un scénario dans lequel les récits s’entrecroisent, se choquent ou se superposent. On comprend dès lors bien mieux que Scott McCloud ait proposé l’équation « crazy + genius = Shiga », tant Vanille ou Chocolat ? est une réussite conceptuelle, graphique et narrative incontestable.
(par Damien Boone)
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