Jeudi dernier, le Louvre offrait ses cimaises aux beaux dessins de Nicolas de Crécy, le créateur de Bibendum Céleste (Les Humanoïdes Associés), de Léon La Came (avec Sylvain Chomet, chez Casterman) et de Prosopopus (Dupuis), pour inaugurer une nouvelle collection coéditée par le célèbre musée parisien, en association avec Futuropolis, un label laissé en déshérence par ses fondateurs et relancé à la faveur d’une surprenante association entre Gallimard et les éditions Soleil. « “Période glaciaire” est le premier album d’une série de quatre qui composeront cette collection » , nous confie l’éditeur, Sébastien Gnaedig. « Tous ont comme objet de mettre les chef-d’œuvres du Louvre en scène. L’initiative vient du Louvre qui a contacté Nicolas de Crécy qui nous en a parlé. Ensuite, nous avons réfléchi au concept et nous avons développé une collection dans laquelle quatre artistes s’exprimeront de façon très différente [1]. Marc-Antoine Mathieu succédera à Nicolas, puis ce sera au tour d’Yslaire et enfin d’Emmanuel Guibert. Les artistes qui ont travaillé à ce projet ne l’ont pas accepté avant d’avoir trouvé « la » bonne idée. Vous verrez, le résultat sera étonnant. » De fait, ce premier album tient ses promesses. « Malgré ma formation et mes lectures, dit Nicolas de Crécy, je me suis senti complètement inculte ! » La bonne idée de Nicolas a été de créer des personnages encore plus ignares que lui, comme ces visiteurs du futur qui s’interrogent, sans aucune référence historique, sur la signification de ces oeuvres.
Coup de froid sur le Louvre
À la suite d’un brusque changement climatique provoqué par la pollution, la calotte glacière s’est déplacée sur la zone Euro. Un tombereau d’années plus tard, une expédition scientifique mélangeant des néo-humains et des animaux génétiquement modifiés doués de la parole découvrent un curieux bâtiment qui renferme des tas de représentations à la signification mystérieuse et dont l’ordonnancement hiératique semble témoigner d’un culte de l’image organisée comme une mystique. À la suite du chien-cochon Hulk (plus personne ne sait d’où vient ce nom, ni à quoi il fait référence), l’expédition scientifique explore quelques-unes des salles du Louvre dont les chefs-d’œuvre sont restés miraculeusement intacts, à l’exception de Mona Lisa, effacée à force d’être trop vue, devenue davantage mystérieuse encore. Si le coup de la calotte glaciaire est un vieux standard de la science-fiction que même la BD a déjà utilisée, le talent de Crécy pour imbriquer dans ses récits la réalité et le fantastique, pour ne pas dire le fantasmatique, est intact lui aussi, toujours aussi unique.
Hulk en massepain
Les planches de l’album seront exposées un mois. Venu spécialement de Bruxelles pour soutenir le lancement, Bernard Yslaire promet lui aussi un album hors normes. Également présent lors du cocktail, le critique anglais Paul Gravett, dans la capitale pour faire la promotion de son livre sur les mangas, ne tarissait pas d’éloges à l’endroit de Nicolas de Crécy dont il suit le travail « depuis ses premières publications dans PLG ». Il était accompagné de l’auteur hispano-américain José Villarubia, collaborateur d’Alan Moore sur Mirror of Love [2] et qui travaille en ce moment sur un projet de Paul Pope pour le compte des éditions Dargaud. D’autres personnalités plus parisiennes s’étaient jointes à la fête. Ils ont fait un sort aux figurines de massepain représentant le chien-cochon Hulk offertes aux invités avec une coupe de champagne.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Pour visiter l’expo des dessins de Nicolas de Crécy, qui restera au Louvre pendant un mois, se rendre à la Pyramide, puis se diriger vers "L’Accueil des Groupes". C’est là, au premier étage. Contact : Nelly Giraud - Tel : 01 40 20 56 64
[1] Leurs albums seront publiés d’ici à 2007. NDLR
[2] Un très bel album publié par Top Shelf encore inédit en France.