Jean-Claude, célibataire résigné, étouffe entre son boulot dans une usine de jouets en bois et sa mère castratrice, au dynamisme dopé par la nicotine. Au moment de remplir ses obligations de bon fils et de bon camarade (anniversaire de la mort de son père et match de foot corporatif), il décide de disparaître sans crier gare, s’embarquant pour une croisière de célibataires, "les coeurs solitaires".
Là, il appprend à se connaître, à oser la liberté, malgré un début de séjour angoissant, avec des animations types club med censées rapprocher les uns des autres ces coeurs à prendre venus de tous les horizons.
Grâce à un scénario parfaitement maîtrisé, jouant sur des intermèdes oniriques et des pauses façon témoignage d’enquête de police, Pedrosa nous emmène dans son histoire avec maestria. Il réussit quelques scènes marquantes, comme la découverte des failles de la pimpante animatrice de la croisière, "amoureuse compliquée" comme elle se décrit elle-même, ou le face-à-face entre le médecin et un Jean-Claude déprimé, dans un coin sombre du bateau.
Pedrosa s’intéresse à tous ses personnages, révélant leurs parts d’humanité, de faiblesse ou de désarroi. Son univers très sensible bénéficie de libertés de trait foncièrement modernes, comme ces fantasmes tourbillonnants qui agitent le héros. On pense à Blutch, à l’école indépendante...
Les Coeurs solitaires, au final magistral, révèle un auteur, et possède même tous les atouts pour intéresser le cinéma.
(par David TAUGIS)
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