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Bruno Bellamy : "Le web est un support idéal pour une sorte de fanzine virtuel"

Par Laurent Boileau le 3 février 2007                      Lien  
C'est comme illustrateur de presse que Bruno Bellamy créa ses personnages féminins gentiment coquins, au style clairement identifiable, les "bellaminettes". Du web, il passe au papier avec la sortie de {Showergate} chez Delcourt.

Quel est votre parcours en bande dessinée ?

J’ai fait une première série (trois albums parus, série terminée), Sylfeline, sur un scénario de Marc Bati, chez Dargaud. C’était une série un peu "conte de fées", pour ados, et surtout c’était il y a longtemps (le dernier tome est paru il y a ... 10 ans !). Je crois que j’ai fait quelque progrès depuis, en tout cas j’espère que ça sera visible dans Showergate !

Comment est venu ce projet de Showergate ?

Un peu par hasard... J’avais créé sur mon site web (pour info, mon site perso, bellaminettes.com, date de fin 1995 et est, je crois, le premier ou l’un des premiers sites d’auteur de BD a avoir été créé, en France) une rubrique "croquis de la semaine", et je discutais avec Moebius du fait que j’avais très envie de me remettre à la BD et, surtout, d’assumer plus que le seul rôle de dessinateur, mais que je ne savais pas par où commencer. En grand maître de l’improvisation (son Major Fatal m’avait donné la vocation de devenir auteur de BD...), il m’avait suggéré de faire une case par semaine sur ce site, au lieu de dessin sans queue ni tête. Les prémisses de mon projet sont apparus ainsi, assez spontanément, et quand j’ai eu cette idée de rideau de douche menant vers un univers parallèle, petit à petit, le scénario de toute la série m’est apparu comme une évidence...

Bruno Bellamy : "Le web est un support idéal pour une sorte de fanzine virtuel"
le tome 1 de Showergate

Comment est-il passé du web au papier ?

Avant Showergate j’avais monté une autre série, avec Marc Bati, chez un petit éditeur qui avait coulé en cours de route. J’ai rebondi comme j’ai pu, je voulais toujours autant faire de la BD, mais Marc n’était plus aussi disponible, et je voulais apprendre à faire moi-même mes scénarios. Showergate était un projet un peu pour de rire, je n’y accordais pas d’importance, mais c’est peut-être ça qui a fait qu’il avait une personnalité intéressante, un ton assez léger pour passer plus facilement.
J’ai aussi eu la chance de voir des auteurs et amis s’intéresser à ce projet et m’aider à le défricher. Des gens comme Philippe Caza, ou Frank Giroud, par exemple, ont pris de leur temps pour critiquer mon scénario et m’aider à l’améliorer, c’est drôlement sympa. Quand j’ai soumis ce projet à Olivier Vatine, pour avoir son avis, il s’est enthousiasmé pour Showergate. Il m’a ensuite, lui aussi, beaucoup aidé, en supervisant la réalisation, notamment tout ce qui est story-board et narration visuelle, domaines dans lesquelles il a sacrément de métier. Plusieurs personnes chez Delcourt, y compris Guy Delcourt lui-même, connaissaient déjà mon travail en tant qu’auteur des bellaminettes, et j’ai été vraiment très bien accueilli, quand j’ai débarqué avec le dossier de Showergate sous le bras.

la première case apparue sur le web en 2001

Quel est le succès de votre "Bellaminettes shop" ?

Heu... C’est pas vraiment une "shop", c’est avant tout un site perso où je présente mes travaux d’illustration. Ce site existe depuis une petite douzaine d’années, et doit son succès au fait que les dessins que j’y présente sont, pour beaucoup, issus de ma production dans la presse des jeux de rôle, jeux vidéo, informatique (logiciels libres, Internet, etc), et jeux de cartes à collectionner. Des domaines de prédilection des internautes, qui sont donc, je crois, assez nombreux à connaître et apprécier mes petites nanas, qui sont aussi là pour apporter un peu de douceur dans un monde qui serait sans cela un peu trop froid et cybernétique...

l’art du dessin...

Qu’est-ce qui vous attire dans le fait de dessiner des "bellaminettes" ?

Le corps de la femme n’a-t-il pas inspiré de tout temps les artistes ?
Une chose que j’ai remarquée, c’est que les bellaminettes plaisent beaucoup au public féminin (les témoignages dans ce sens sur mon site sont édifiants, je crois). Ça me rassure quant au fait que mes créatures n’ont pas trop l’air de "pin-ups de camionneurs". Il semble que j’arrive (enfin c’est ce que j’espère) à faire dans le style "grands yeux et petites culottes" sans donner pour autant une image dévalorisante de la femme. Et Showergate représente une étape supplémentaire dans ce sens, en tout cas ça en a l’ambition : c’est une histoire romantique, avec une petite pointe d’érotisme, bien entendu, mais où j’essaye de donner une vraie profondeur à un personnage de bellaminette qui a enfin la possibilité de s’exprimer, de vivre, de partir en quête de son identité, et de se découvrir (dans tous les sens du terme, pour le coup...).

De plus en plus de blogs permettent à des auteurs de se faire connaître. est-ce une voie d’avenir pour un jeune qui débute ?

J’en suis convaincu, depuis que j’ai moi-même démarré un site et expérimenté cette possibilité. Le web est un support idéal pour une sorte de fanzine virtuel. Avant, on photocopiait nos petites BD d’amateurs, et on tentait de les vendre aux potes du lycée. Maintenant on peut les diffuser sur toute la planète, et en couleurs, c’est génial !
Pour autant, est-ce que ça peut fonctionner comme un "laboratoire" au même titre que les revues de BD de jadis, qui n’avaient pas toujours pour tout leur contenu des ambitions de publication en album ?
Je ne suis pas dans la tête des éditeurs, et je ne sais donc pas très bien s’ils surfent sur le web à la recherche des talents de demain. En tout cas, Showergate n’a franchi les portes d’une maison d’édition que parce que j’ai pris la peine de reformater ce projet avec l’ambition d’en faire un album papier.
Il est clair, aussi, qu’en l’état actuel, il est quasiment impossible de gagner sa vie en diffusant sur l’Internet son oeuvre sous une forme dématérialisée. Or la BD est un boulot énorme, à temps plein, donc on ne peut pas faire ça juste pour la gloire, ou en se finançant avec des bannières de pub. A moins de dessiner vraiment très vite, mais malheureusement ce n’est pas mon cas.

la Reine sombre qui donne son nom au tome 1

(par Laurent Boileau)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

photo © DR
illustrations © Bellamy/Delcourt

le site de ShowerGate : http://showergate.net
le site perso de B. Bellamy : http://bellaminettes.com

 
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