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Fabrice Neaud s’intéresse à « la vie d’après »

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 8 mai 2008                      Lien  
Quelle est la raison de la rareté de l’auteur du Journal ? Le goût de la perfection ou le doute qui lui font repousser sans cesse l'échéance d’une nouvelle livraison ? Allez savoir. Il faut une cause impérative pour rompre ce silence. Elle tient en quatre lettres, celles qui forment le mot SIDA.
Fabrice Neaud s'intéresse à « la vie d'après »
"Alex ou la vie d’après" de Thierry Robberecht et Fabrice Neaud
Editions Ex Aequo

Fabrice Neaud est l’un de nos auteurs francophones les plus importants. Son Journal (en 4 volumes, chez Ego comme X) a contribué à imposer le genre de l’autobiographie en France et constitue l’une des plus belles expériences de la bande dessinée contemporaine. Il a été justement acclamé par la critique et a valu à son auteur un Alphart à Angoulême en 1997. Si l’homosexualité est chez cet auteur un thème central, il n’en fait justement pas une caractéristique qui lui attribuerait ce goût exquis qu’une certaine opinion, comme dirait Antoine Pickels, « prête si aisément au pédé, comme au nègre le sens du rythme, au juif celui des affaires, et à la femme l’intuition » [1] Son apport est précisément son incroyable capacité à transposer des sentiments complexes et à nous mener dans les méandres, parfois tortueux mais toujours passionants, de sa réflexion.

Mais ici, il n’est pas dans cet exercice puisqu’il n’est pas le scénariste de cette histoire qui a été écrite par le Belge Thierry Robberecht, auteur jeunesse, notamment de la série de BD La Smala, chez Dargaud. Alex ou la vie d’après est une bande dessinée qui se veut avant tout un ouvrage de prévention. Alex est un jeune homosexuel qui contracte le virus du HIV après un rapport non protégé. Comment vit-on l’expérience de l’après infection ? Quelles sont les relations avec la maladie, avec le médecin, avec les protocoles de soin et surtout avec les autres ? Est-on par exemple capable de vivre une relation amoureuse en étant séropositif ?

"Alex ou la vie d’après" de Thierry Robberecht et Fabrice Neaud
Ed. Ex-Aequo

Le discours sur le Sida est arrivé relativement tôt dans le domaine littéraire, quatre ans seulement après sa découverte par une équipe de chercheurs en 1983. On pense à Mon Sida de Jean-Paul Aron (1987) ou À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie d’Hervé Guibert (1990). On pense aussi au film de Cyril Collard, Les nuits fauves (1992). Dans la bande dessinée, il y a eu très tôt L’avenir perdu d’Annie Goetzinger, Jón Sveinbjørn et Andreas C. Knigge paru aux Humanoïdes Associés en 1992, une BD réussie que son éditeur serait inspiré de rééditer. Si ces œuvres sont parfois assez crues et frappées de pathos, elles eurent le mérite de faire prendre conscience au public de la dangerosité de la maladie. Il faudra attendre les albums de Ralf König chez Glénat pour qu’on puisse lire des histoires où la séroposivité n’était plus vécue comme une malédiction, envisagée dans la normalité. Si le script de Robberecht se veut avant tout pédagogique, suscitant les questionnements sans jamais tomber dans la sensiblerie, ni dans les clichés, il est clair que Fabrice Neaud a puissamment contribué à rendre toute cette histoire non seulement intelligible, mais encore intelligente. Les abîmes de doute dans lesquels Alex est soudain plongé sont parfaitement rendus par un dessin qui passe aisément d’un réalisme émotionnel (exprimé par les visages, les décors) à un schématisme discursif (dans l’expression des sentiments par exemple).

On boudera d’autant moins ce retour de Fabrice Neaud que l’album est délivré gratuitement sur demande à partir du 13 mai, dans la mesure, je suppose, des stocks disponibles. Il est édité par l’association belge Ex-Aequo et est publié en bichromie. Un travail de prévention brillantissime !

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN :

Pour obtenir l’album (à partir du 13 mai 2008)

Association Ex-Aequo
Rue de Locquenghien, 41 – 1000 Bruxelles
+32 2 736 28 61
frederic-arends@exaequo.be
Le site de l’association

En médaillon : Fabrice Neaud - Photo : D. Pasamonik

[1Antoine Pickels, Un goût exquis – Essai de pédesthétique, Ah ! Éditions Cercle d’art, Bruxelles 2006.

 
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