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Le Léopard qui défie Moulinsart

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 14 novembre 2008                      Lien  
« Les aventures de Saint-Tin et son ami Lou », prévues pour paraître en 23 volumes, sont des parodies des aventures de Tintin d’Hergé. « Le Crado pince fort » et « Le vol des 714 porcineys » sont les premiers titres qui viennent de paraître aux éditions du Léopard démasqué. Qu’en pense Moulinsart ?
Le Léopard qui défie Moulinsart
Le Crado pince fort
Ed. Le Léopard démasqué

Érick Mogis est un spadassin de l’écriture : scénarios de film (on lui doit un fameux documentaire sur Henri Vernes, l’auteur de Bob Morane), comédies musicales, romans, etc. Il y a quelques années, avec un copain, il créa les éditions du Léopard masqué, spécialisées dans les parodies. Le félin « mi-piqueur, mi-gratteur » a déjà quelques proies à son tableau de chasse. Un « C’est pas sorcier, Harry », foutage de gueule du jeune magicien Harry Potter qui a déjà vendu 30.000 exemplaires dont une version en poche chez Pocket ; ou encore un « Fais gaffe à ta Gaule » qui plaisante avec un Gaulois à casque ailé. Je ne vous donne pas tous les titres de la collection, mais ils sont plus évocateurs les uns que les autres : « Mozart est là », « Où est le bec ? », « Les 101 politichiens »…

Et voici que notre éditeur de romans humoristiques a jeté son dévolu sur le rival international du Grand Charles : Tintin lui-même ! Dans l’Alphart, Tintin avait déjà rendez-vous avec des faussaires en œuvres d’art. Il y avait les faux monnayeurs de L’Ile noire, les faux semblants des jumeaux Halambique du Sceptre d’Ottokar et les malentendus du Professeur Tournesol… Maintenant, il y a les parodies du Léopard masqué, des Tintin en toc intitulés « Les aventures de Saint-Tin et son ami Lou ». Lou est un perroquet. Le meilleur ami de Saint-Tin est le capitaine Aiglefin, éclusier à la retraite et l’un et l’autre forment une petite famille avec le professeur d’origine russe, Margarine, éminent cryptozooliste inspiré par Bernard Heuvelmans, ainsi que les agents secrets Yin et Yang…

Gordon Zola a signé le premier tome des Aventures de Saint-Tin et de son ami Lou
Derrière lui, on reconnaît : "C’est pas sorcier, Harry", son best-seller. Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

23 titres –comme autant de Tintin- sont prévus : Le Crado pince fort, le vol des 714 porcineys, L’Oreille qui sait, La Lotus bleue… Les couvertures se veulent caractéristiques et les textes sont signés Gordon Zola (alias Érick Mogis) ou encore Bob Garcia, le tintinologue bien connu pour ses démêlés avec Moulinsart.

Le Vol des 714 porcineys par Bob Garcia
Ed. Le Léopard masqué

« L’objectif de cette collection est de faire une œuvre dans une œuvre, nous explique Mogis. Il s’agit de reprendre un référent assez fort et de le recomposer sur 23 romans dans des aventures reconstituées. Saint-Tin est le fils supposé de Tintin. Il le croit. On n’en est pas vraiment sûr, c’est dit en filigrane. Pour la plupart des personnages, il y a cette recherche en filiation. Aiglefin, un Russe blanc, a reçu en héritage un moulin, le Moulin Tsar, et il est persuadé d’être le descendant des Romanoff. Pour cela, il est à la recherche du « Secret d’Eulalie Corn ». Il y a aussi « Le 13 heures réclame le rouge »… Tous les titres sont parodiés.  »

Parodie peut-être, mais les couvertures ont tout l’air d’être des contrefaçons de l’œuvre d’Hergé. Notre éditeur le récuse. « Si une parodie ne ressemble pas à l’original, ce n’est plus une parodie. Une parodie peut être satirique, elle peut se moquer, elle peut magnifier. En l’occurrence, c’est vraiment une parodie-hommage. », plaide notre plaisantin. « C’est important : il s’agit vraiment d’une re-création. La parodie ne peut pas être moins bonne que l’original, surtout que l’on a pas le soutien du dessin. » Il s’attend à une réaction de Moulinsart. Son avocate, Me Florence Watrin aurait acheté, dit-il, deux exemplaires de ces titres.

Bref, le feuilleton « Tintin et les contrefacteurs » rebondit une fois encore, alors que le procès de Moulinsart contre Bob Garcia est encore en appel.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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« Le Crado pince fort » et « Le vol des 714 porcineys » sont à 10 euros chacun.

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En médaillon, Gordon Zola. Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

 
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21 Messages :
  • C’est franchement pitoyable ce comportement de profiteur. C’est le morpion sur le pubis, le champignon sur le chêne, l’oeuf du coucou, c’est profiter du travail des autres pour essayer dans récolter les graines à moindre frais.

    Le manque de talent compensé par le manque de scrupule.

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    • Répondu par Gordon Zola le 14 novembre 2008 à  11:43 :

      Avant d’invoquer le manque de talent, il serait judicieux de lire les oeuvres en question ce qui vous éviterait d’user d’un manque de pertinence !
      Cependant,votre remarque montre combien il est nécéssaire de continuer notre travail...
      Cela dit, je vous trouve un peu dur avec Spielberg !

      bien à vous

      GZ

      Voir en ligne : Touche pas à mon pote !

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      • Répondu le 14 novembre 2008 à  12:59 :

        Même le pitoyable jeu de mot de ce pseudo est du déja vu, déja entendu. Incapable de créer du neuf, juste de bidouiller des lieux communs sur des succès commerciaux comme des profiteurs.

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        • Répondu par arnaud. le 14 novembre 2008 à  13:32 :

          Il faut aussi garder à l’esprit que la satyre, quelle qu’elle soit, est aussi une garantie de la liberté d’expression.

          Si on ne veux pas de ces parodies, alors autant renier ce droit à la parole libre.

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      • Répondu par André Bleu-Gris le 14 novembre 2008 à  16:04 :

        Bonjour,

        La parodie vaut ce qu’elle vaut, elle a toujours existé et a toujours mangé sur le dos des oeuvres de référence. C’est sa nature. Il ne peut pas y avoir de parodie sans référent. Au cinéma, il y a eu des succès colossaux, par exemple récemment la série des Scary Movies...

        Et rappelez-vous Brunel... Etait-ce mauvais ? Bien au contraire, on y sentait tout l’amour qu’il avait pour les séries classiques. La BD a produit énormément de parodies ou pastiches, qui ont souvent rencontré leur public et permis d’avoir sur l’oeuvre originale un regard plus distancié et décalé. Personnellement je trouve ça salvateur et je suis certain que cela contribue à faire revenir aux oeuvres originales, ce qui évidemment est un moindre mal !

        Quant à la réaction de Moulinsart, attendons. Il y a des lois, après tout...

        Amitiés à tous,

        A B-G

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        • Répondu par Simone d’Abreuvoir le 14 novembre 2008 à  23:09 :

          Brunel, c’était déjà mauvais et vulgaire. Ces pastiches en textes me sont tombés des mains. C’est lamentable. Bob Garcia était un compilateur de données, mal mises en page. Il devient un mauvais écrivain... Je l’ai connu mieux inspiré, par exemple dans son livre sur Londres. Qu’allait-il faire dans cette galère ?

          Parfois, des gens ont besoin d’une oeuvre, d’un auteur, pour exister. C’est le cas de toute cette presse, de tous ces ouvrages, sur Hergé et Tintin. C’est valable pour cette nouvelle série superflue, ces auteurs qui gâchent leur talent, comme pour des essayistes renommés qui n’aiment pas plus que ça la Ligne Claire et le classicisme.

          Bref, tout ça sent furieusement le réchauffé. Jan Bucquoy avait quand même plus de panache dans ses parodies X !!!!

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          • Répondu par Gordon Zola le 15 novembre 2008 à  23:00 :

            J’admire tous ces donneurs de leçons qui critiquent derrière leur écran d’ordinateur et qui bien souvent ne font rien... Plus pratique, plus simple, plus confortable de déverser leur bile depuis un fauteuil club pour eux qui n’osent rien !
            Toutes ces plumes internautes avariées et assechées qui n’arrivent même pas à imaginer qu’il peut y avoir des passionnés derrière toute création.
            J’admire également l’élégance de certains propos quant à notre trépas rapide... A la mesquinerie s’ajoute la méchanceté, le tableau est complet !
            Avouez que pareil projet a au moins l’avantage de faire sortir des ornières les mesquins et pisse-froids de tout poil !
            GZ

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            • Répondu par Jerome le 22 novembre 2008 à  16:22 :

              A Gordon Zola,
              On peut être derrière son écran et garder l’esprit critique. J’ai eu ces deux premiers opus en main, je les ai compulsés. Je ne vois personnellement pas l’intérêt de parodies écrites. Frederic Tuten avait donné une version romancée de Tintin, qui faisait appel à Thomas Mann, qui me semblait autrement plus ambitieuse que ces opuscules. Mais ce n’est que mon avis, celui d’un libraire, lecteur, et également auteur... Comme quoi, ce n’est pas parce qu’on est pas auteur parodique qu’on ne fait rien ;-)

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        • Répondu par Serge, le pauvre Martin. le 7 décembre 2008 à  10:08 :

          Rassurez-moi..J’ai peur, d’un coup..." Il y a des lois..." Combien de têtes vont tomber ?
          Ma femme est une jolie fleur dans une peau d’vache...Sera-t-elle poursuivie par les héritiers de Brassens ? ça m’ennuie un peu, nous sommes Sétois...Mon testament était ancien, j’en ai établi un nouveau...Aurai-je des apôtres et le Vatican à mes trousses ?...Et Ray Kurzweil, l’auteur de "La bible du changement" ? Ne risque-t-il pas un procès de Dieu en personne ou de ses ayant-droits ?...........Serge.

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  • Le Léopard qui défie Moulinsart
    14 novembre 2008 12:33, par Flocon

    Question idiote, s’agit il de BD ou de roman ?
    De plus comme Hergé a emporté Tintin dans la tombe,il faut bien des parodies hommages pour qu’on se rappelle de temps à autre que Tintin a existé

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  • Le Léopard qui défie Moulinsart
    14 novembre 2008 15:02, par Pierre Marie Windal

    Pour une critique argumentée de ce nouveau concept, merci de me rejoindre sur mon blog : http://ineditspaszidane.blogspot.com/
    Ma critique est trop longue pour l’exposer ici. Je comprends ceux qui crient au plagiat, mais ils crient un peu vite. Bien faits, la parodie et le pastiche sont des hommages à l’original. Gordon Zola a du talent, pourquoi ne se hisserait-il pas sur les épaules de ceux qui l’ont précédé ? S’il s’agissait d’une bande dessinée, il y aurait contrefaçon, mais il s’agit d’un livre, donc d’une transposition.

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    • Répondu le 14 novembre 2008 à  15:38 :

      Comment un mauvais roman pourrait rendre hommage à un chef d’oeuvre de la bande dessinée ? Ce n’est qu’une verrue disgracieuse sur un joli visage cher Pierre Marie.

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      • Répondu par Pierre Marie Windal le 14 novembre 2008 à  17:20 :

        Un mauvais roman, non, mais un bon ? Avez-vous lu les deux premiers Saint-Tin ?

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        • Répondu le 14 novembre 2008 à  18:20 :

          Oui, les deux, c’est très mauvais, je n’ai pas fini le deuxième.

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    • Répondu par François Prés le 15 novembre 2008 à  17:22 :

      Monsieur Windal, je vous félicite pour votre travail d’analyse, qui permet de mieux comprendre les aventures de Saint-Tin et son ami Lou.

      A la lecture de votre billet sur votre blog et des différentes informations disponibles sur internet (cet article, le site www.saint-tin.com, etc.), il semble que la série en cours relève d’un véritable concept éditorial. Un nouvel univers romanesque se développe, les livres laissent visiblement une large place à l’hommage, les auteurs d’après les extraits présents sur le site de l’éditeur tiennent a priori la route et ne manquent pas d’humour, les personnages sont intéressants.

      Le juge de paix de la démarche sera sans doute comme d’habitude le public qui y trouvera ou non un intérêt et l’occasion de passer un bon moment autour d’un roman populaire... A suivre !

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  • Sans vouloir paraitre réactionnaire, je signale à monsieur Zola
    14 novembre 2008 22:17, par François Pincemi

    que sa verve et son goût affirmé pour le calembour seraient plus à l’aise sur Achille Talon. L’oeuvre de Hergé est suffisamment forte pour tenir debout, seule.

    De plus, les jeux de mots à la Pierre Dac sont un peu passés de mode. La seule chose qui me ferait regretter de ne pas avoir acheté ces livres serait leur retrait de la vente, suite à la procédure que ne manquera pas d’entamer les moules à gaufres de Moulinsart.

    Merci quand même de ne pas être tombé dans les travers favoris des parodieurs underground(drogue et pronographie, notamment).

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  • Le Léopard qui défie Moulinsart
    16 novembre 2008 07:49, par Fred Boot

    Tout cela semble bien tiré par les cheveux, mais c’est plutôt interessant de réussir à raconter une autre histoire en changeant de support et en utilisant la mécanique des bons mots et de gags référencés. Ce genre de chose nous rappelle que les œuvres sont des matériaux que l’on peut s’approprier, malaxer, modifier et avec lesquelles on peut jouer pour créer. Ce que j’ai pu lire n’est pas ma tasse de thé (il manque peut-être la fluidité d’écriture d’un San Antonio par exemple), mais c’est toujours un plaisir de voir les gardiens du temple (quoiqu’aujourd’hui Tintin ressemble plus à la momie surprotégée de Rascal Craspec... euh Rascar Capac) être choqués. En art, il est bon de briser les choses pour créer. C’est un peu ce que ces auteurs font : faire éclater en morceau la sacro-sainte œuvre, en étudier les tessons, les rendre plus coupant, puis composer autre chose.

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  • Le Léopard aime l’argent facile
    16 novembre 2008 19:20

    On voit bien que cette collection n’est qu’une entreprise de piratage de l’univers de Tintin.Sachant qu’ils y a beaucoup de collectionneurs prêts à acheter n’importe quoi en rapport avec Tintin, ils se sont dit qu’il y a de l’argent facile à se faire, et 23 fois 10€ ça fait quand même 230€, ce qui n’est pas négligeable.

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    • Répondu par loulou le 3 décembre 2008 à  23:20 :

      Argent facile dites-vous mais avez-vous pensé que cet éditeur,comme d’autres,paie ses auteurs , ses dessinateurs, ses correcteurs,la marge des libraires,etc, etc....alors ne soyez pas mesquin et souhaitons lui d’en vendre beaucoup.

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    • Répondu par kitpadle le 7 mars 2009 à  17:52 :

      Prendriez-vous les collectionneurs pour des idi*** ? Si cette collection ne leur plaît pas il ne l’achèterons pas. Et des articles (des timbres à la boîte à spaghetti, et j’en passe et des meilleures) sur Tintin il y en a déjà 1000 (ou presque).
      La parodie est un art et en tant que tel sa qualité dépend de son auteur. Pour ce que j’en connais G.Zola est un bon pasticheur.

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  • Le Léopard qui défie Moulinsart
    17 septembre 2011 22:44

    Cher Gordon,

    On comprend bien que les attaques de Moulinsart peuvent ici servir la promotion du livre. Bon, d’accord.

    Mais cette posture-là, celle de l’artiste persécuté, fait sourire plus encore que la lecture des oeuvres.

    Bien cordialement

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