Il y aurait fort à dire sur cette affaire sordide. L’ex-amant est un réfugié kosovar qui s’est avéré être « l’ami » d’une des plus hautes huiles de la région. L’article ne mentionne pas son nom par déontologie.
Mais, pour l’heure, le problème tient au fait que mes livres ont été pris en otage en pleine audience. Donc cette brève a tout à fait sa place ici, précisément parce que mes livres n’ont rien à voir avec les « heurts » présents de ma « vie privée » et qu’ils n’ont pas à être brandis en pleine audience publique dans une affaire qui ne les concerne pas.
Ce qui s’est passé là ne concerne donc pas que ma petite personne mais aussi et surtout mon statut d’auteur, et celui de tous les professionnels de la bande dessinée.
Imaginez que vous avez eu le malheur de créer une œuvre autobiographique et que pour toute affaire judiciaire vous concernant un avocat, la sorte de ses manches, pour un oui ou pour un non, puisant de manière tronquée (évidemment) ce qui pourrait lui servir pour sa plaidoirie contre vous ?
C’est ce qui s’est passé ce Mardi 23 mars 2010 en plein Tribunal.
Il y avait le statut pourtant clairement défini de l’agresseur et de sa victime (moi), pour une plainte parmi quatre autres (dont, heureusement, les deux dernières font l’objet d’une nouvelle audience le 27 mai prochain). Mais l’audience est devenue rapidement un procès à charge contre moi, la défense faisant de moi, comme le dit l’article, un « portrait terrifiant ». J’ajoute qu’elle a surtout fait ce qu’on appelle un procès d’intention, puisqu’elle a fait le reproche à mon œuvre de ce qui n’y était pas et de ce que j’allais être supposé faire dans l’avenir.
J’ignorais que l’on pouvait juger une affaire sur l’hypothèse des intentions d’un auteur, qui plus est victime dans la présente affaire ! Sans compter qu’il est libre de faire ce qu’il veut ultérieurement d’elle et d’en assumer les responsabilités. Mais il est impensable de m’accuser de ce que je n’ai pas fait et ne ferai pas. Et pourtant...
Cette plaidoirie de la défense contre moi, visant uniquement à porter le discrédit à la fois sur mon travail et ma personne, a bien eu un poids, puisqu’aucune des charges (pour homophobie, entre autre) n’a été retenue contre mon agresseur, hormis la plus maigre partie de son agression : une clef au bras. Simplement parce qu’il avait reconnu les faits.
Aucune charge pour le préjudice moral que j’ai subi (incalculable, du reste, tant cela m’a affecté) et une condamnation avec exemption de peine délibérée du bout des lèvres.
Je sais très bien que derrière cette « petite » affaire se dissimule tout un tas de notables locaux qui souhaitent garder secrète leur homosexualité. Mais ça, dans une petite ville de province avec un dangereux auteur, comme moi, qui risque hypothétiquement de les balancer dans ses ouvrages, ça ne peut pas se dire. On préfère lui appliquer directement le « principe de précaution », comme à un OGM, et lui pourrir SA vie privée plutôt que de prendre ce « risque ». Ce n’est pourtant guère de ma faute si des notables paranoïaques fantasment ce que je pourrais dire de leurs « secrets ».