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Jean-Christophe Menu, « dictateur éditorial » de L’Association, répond à ses salariés

14 février 2011 63 Commentaires
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Dans un long communiqué du 13 février 2011, Jean-Christophe Menu, « face à une situation qui s’enlise », répond à ses salariés à propos de la grève desquels, il fait un « commentaire » intitulé Bandelettes.

« Durant tout ce conflit, tout le monde n’a eu qu’un “son de cloche”, celui de la “Masse Salariale” (ainsi qu’elle s’est définie) et de leurs divers soutiens » dit-il.

Faisant un long développement chronologique des évènements survenus dès le début de la grève des salariés, il parle des «  difficultés financières à L’Association [qui] sont apparues dès courant 2009  » qui auraient entraîné le recrutement d’une accompagnatrice-gestionnaire « de grande compétence » un jour par semaine et qui aboutit à la conclusion, dans le rapport d’un bureau d’expertise-comptable, de l’existence de « problèmes structurels » dans l’organisation de la société.

Le succès de Persepolis de Marjane Satrapi a permis à L’Association, selon les propres mots de JC Menu, de «  vivre dans l’opulence » sous la forme d’ «  embauches généreuses, primes exceptionnelles aux Salariés, augmentation des parutions, livres difficiles, fabrications luxueuses, etc.)… » Hélas, un retournement du marché ajouté à une « fin de cycle » du best-seller précité et à un arrêt du distributeur Le Comptoir des Indépendants ont fait que, depuis deux ans, la perte d’exploitation de la société a entamé les réserves constituées par le succès de Persepolis.

D’où une réduction des nouveautés (25 au lieu de 40 les années précédentes), la renonciation par JC Menu de son salaire de directeur éditorial par la voie d’un auto-licenciement dès mars 2010, et une volonté de réduction des effectifs qui a provoqué la grève des salariés.

Après avoir justifié dans le détail les raisons de ces licenciements et des différentes mesures structurelles envisagées, JC Menu s’emporte contre une équipe de salariés qui « se sent soudée dans une sorte de projection mentale de coopérative auto-gérée, qui n’en est pas une », situation, confesse-t-il, «  générée par l’absence d’un véritable encadrement, le Directeur éditorial qui vous parle ayant souvent été absent et n’ayant jamais vraiment assumé son rôle de Directeur Général de fait. »

Un plaidoyer « pro domo »

Faisant une défense pro domo d’une ligne éditoriale dont il se déclare le seul initiateur et le garant, il dénonce ensuite l’attitude des salariés qui n’ont pas, selon lui déposé de préavis de grève et qui ont immédiatement produit un communiqué « calomnieux », « injuste », alors « qu’aucune procédure de licenciement n’est engagée. »

Récusant, d’une façon contestable, «  toute responsabilité juridique », soulignant que celle-ci repose uniquement sur la présidente de l’Association Patricia Perdrizet et de la trésorière Laetitia Zuccarelli (cette dernière étant, comme nous l’avons signalé, solidaire des salariés), JC Menu vitupère contre une action des salariés qui a mené à une pétition « hypocrite » dont le succès (plus de 1300 signataires, parmi lesquels de nombreux auteurs et sympathisants de L’Association) est « essentiellement dû à la malhonnêteté de son texte et de son intitulé : “Longue vie à L’Association”. La plupart des signataires croient sauver une structure en péril, ou combattre une injustice, alors qu’ils ne font que participer à un épisode interne de la structure, hypothèse précisément élaborée pour pérenniser ladite structure ; et épisode qui n’avait nullement à être porté sur la place publique. »

« Putsch »

Il dénonce l’organisation par les salariés de « demandes d’Adhésions en masse, dans le but de réunir des troupes pour une AG Ordinaire, ou pour les prévoir comme Membres d’Honneur éligibles », en clair de tenter une prise de contrôle de l’Association de Loi 1901 qui régit l’entreprise.

Il admet le fonctionnement bancal de celle-ci : « Il est exact que les Statuts de 1993 laissent à désirer, et que vu la masse de travail et de soucis, il n’a pas été convoqué d’AG depuis 2007 (et non 2005 comme le dit le communiqué - mais le PV de celle de 2007 n’a jamais été fait). » Ces carences doivent être résolues, conclut-il en soulignant qu’elles ont quand même permis de constituer « un Catalogue de Bande Dessinée irréprochable  ».

Il nous apprend que Killoffer, Lewis Trondheim et David B, « démissionnaires de L’Association », ont fait officiellement une demande d’Assemblée Générale : « Une connivence salariés / ex-fondateurs et une tentative pour m’écarter de la structure semble, à ce stade, fortement crainte » écrit-il.

Et de détailler ensuite comment il tente de déjouer cette tentative de « putsch » en élaborant une Assemblée Générale Extraordinaire elle-même déjouée par les salariés et une trentaine d’auteurs et de sympathisants menés par la trésorière de L’Association, membre du bureau qui dénonce l’illégalité de cette Assemblée, comme nous vous l’avions raconté dans un précédent article.

Il se décrit ensuite comme l’interlocuteur des auteurs et du distributeur Les Belles Lettres inquiétés par la situation. Oubliant un instant qu’il n’occupe plus officiellement de poste décisionnaire dans l’entreprise, il dénonce les conséquences néfastes de l’action des salariés : « Si je n’avais pas accepté personnellement cette solution, ces postes et de nombreuses structures éditoriales se seraient retrouvés en difficultés. La grève met donc également la structure en délicatesse par rapport à notre nouveau diffuseur. »

Grève levée

Détaillant son ressenti sur la grève d’Angoulême, il décrit ensuite une réunion du Bureau avec l’Expert-comptable et quelques témoins sur un état des comptes 2010 qui laisserait ressortir une perte de 150.000 euros à la suite du dépôt de bilan du Comptoir des Indépendants. Après une discussion sur les statuts, et notamment sur la liste des membres de l’Association, apparemment établie dans le flou le plus total, les licenciements sont gelés et une Assemblée Générale est fixée au 5 mars 2011. En conséquence, la grève est levée le 9 février.

Une réunion a lieu ensuite où les salariés exigent l’établissement d’un comité éditorial . Menu refuse : « On m’intime, assez fermement, de reconstituer un comité éditorial exécutif (pas même un comité de lecture, mais un comité où les projets seraient soumis au vote). Je m’élève contre cette idée : c’est la première fois que les Salariés s’avancent sur le terrain de l’éditorial. Je fais valoir mon bilan éditorial depuis 2006, date à laquelle je suis devenu seul décisionnaire, et affirme que je ne suis pas prêt à risquer de nouveau le type de querelles vécu avec le groupe des Fondateurs. » Les négociations tournent court.

Un communiqué faisant suite à cette réunion où les salariés annoncent la levée de la grève et détaillent l’ordre du jour de l’Assemblée Générale rend Menu furieux : « Tout se passe comme si l’escalade des revendications ne pouvait plus s’arrêter. Désormais, cette équipe salariale donne l’impression de vouloir tout contrôler à l’Association, même ce qui ne relève absolument pas de ses prérogatives, et prétend même influer sur l’éditorial. Face à ces constatations inquiétantes, la levée de la grève devient un problème presque secondaire. »

Il ajoute cette exhortation : « L’éternel problème de L’Association a toujours été de mélanger le professionnel et l’affectif (et d’ignorer le juridique). Cette confusion, qui a fait une grande partie de son charme et de son anti-conformisme (mais aussi la source de sa longue série de querelles) devient l’essentiel de ce qui la menace aujourd’hui. On peut dire que cette grève et la crise qui l’a précédée ne représentent que le paroxysme de trop anciens dysfonctionnements de la structure, ni vraiment entreprise, ni vraiment association, qu’il faut résoudre d’urgence » puis conclut : « Patron, je ne l’ai jamais été, et je ne le serai jamais. Seuls m’intéressent les Auteurs, les Livres, et le Catalogue, et je continuerai quoi qu’il en soit à faire vivre cette structure inimitable, dont je revendique le Projet de base, l’Histoire, et l’Avenir, et qui s’appelle L’Association. »

DP

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