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Lecture en confinement #19 : "Posada. Confession d’un squelette" - Par Samuel Dégardin - Les Éditions Martin de Halleux

4 avril 2020 Commenter
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CONFINEMENT. Nous devenons spectateurs de notre propre monde. Pour beaucoup limités à quelques mètres carrés, nous passons du temps à nous observer nous-mêmes et, ce qui fait davantage de bien au moral, à regarder la planète continuer presque sans nous. Le printemps avance ses pions, par exemple. Rien de neuf évidemment. Seulement, cette année, nous y prenons garde. C’est à la fois rassurant - il y a suffisamment de petits miracles pour que la vie vaille le coup - et effrayant - ces mêmes petits miracles se passent très bien de nous pour éclore. Si la mort ne planait pas constamment sur cette situation, nous ne serions pas loin de pouvoir nous en réjouir...

José Guadalupe Posada : en voilà un qui s’y est habitué, à la mort. Non seulement il a eu le temps de s’y faire, avec la centaine d’années qui nous éloigne de son passage de vie à trépas, mais en outre il l’a abondamment dessinée, sous toutes les coutures et dans tous les costumes. Car s’il y a un artiste que l’on peut assimiler aux calaveras, ces têtes de mort emblématiques de la culture mexicaine, c’est bien lui !

Lecture en confinement #19 : "Posada. Confession d'un squelette" - Par Samuel Dégardin - Les Éditions Martin de Halleux
Posada. Confession d’un squelette © Samuel Dégardin / Jose G. Posada / Les Éditions Martin de Halleux 2019

Posada, né en 1852 à Aguascalientes et décédé en 1913 à Mexico, a travaillé comme un acharné sa vie durant. Il a dessiné et gravé des milliers d’images. Serait-il seulement possible de toutes les recenser ? Il débute alors qu’il n’a pas vingt ans, dans l’atelier d’un graveur et lithographe. Il ne cesse jamais, par la suite, d’observer ses contemporains et de les caricaturer avec le masque de la Camarde. Il se fait alors chroniqueur, parfois engagé, de presque un demi-siècle de remous politiques et sociaux qui ont agité son pays et dont certaines conséquences se font encore sentir aujourd’hui.

Posada a travaillé pour la presse et a illustré de nombreuses œuvres littéraires tout en fournissant, de façon classique, des images religieuses et des illustrations commerciales. Sa carrière est marquée par sa rencontre avec Antonio Vanegas Arroyo, éditeur de livres, de journaux et de feuilles volantes qui a déjà engagé Manuel Manilla, graveur dont l’influence sur Posada a été déterminante. Celui-ci voit l’apogée de son art dans les années 1890 et 1900, alors qu’il privilégie la gravure au burin et la zincographie et affine le style qui le rend reconnaissable.

Posada. Confession d’un squelette © Samuel Dégardin / Jose G. Posada / Les Éditions Martin de Halleux 2019

Nous apprenons tout cela, et bien d’autres choses, dans Posada. Confession d’un squelette. Samuel Dégardin, historien de l’art spécialiste de Frans Masereel, référence absolue pour qui se pique de graver, y donne rétrospectivement la parole à la dépouille de Posada. Cette pseudo-autobiographie, forcément un peu romancée mais appuyée sur quelques solides sources, permet une première approche aisée de la vie et de l’œuvre du graveur mexicain. Elle mérite d’être complétée, par exemple par la lecture de l’épais volume de Lætitia Blanchard paru chez L’Association, beaucoup plus riche d’informations et à l’iconographie bien plus variée.

Confession d’un squelette se concentre sur les calaveras réalisées par Posada. Une grosse centaine est présentée en illustration du texte de Samuel Dégardin. Ces têtes de mort, souvent accompagnées de tout leur squelette, étaient un moyen populaire de railler les petits comme les grands et de brosser un portrait satirique du Mexique dans son ensemble.

Riant, grimaçant, dansant, les morts de Posada sont pleins de vie et étonnamment expressifs. En ce sens, ils acquièrent une double fonction : faire office de vanités ou memento mori, et se moquer de l’humain qui agit comme s’il ne savait pas qu’il allait, forcément, mourir.

FH

Posada. Confession d’un squelette © Samuel Dégardin / Jose G. Posada / Les Éditions Martin de Halleux 2019
Posada. Confession d’un squelette © Samuel Dégardin / Jose G. Posada / Les Éditions Martin de Halleux 2019
Posada. Confession d’un squelette © Samuel Dégardin / Jose G. Posada / Les Éditions Martin de Halleux 2019

Posada. Confession d’un squelette - Texte de Samuel Dégardin & gravures de José Guadalupe Posada - Les Éditions Martin de Halleux - 17 x 24 cm - 96 pages en noir & blanc - couverture cartonnée avec marquage à chaud, reliure cousue, tranchefil - ISBN 978249039046 - parution le 3 octobre 2019.

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