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Lecture en confinement #21 : "La Langue du Diable" - Par Andrea Ferraris (trad. S. Zas) - Rackham

6 avril 2020 Commenter
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CONFINEMENT. Que peut-on encore écrire sur le confinement ? Que l’on espère ne pas avoir à lire une flopée de romans graphiques lui étant consacrés dans les mois qui viennent ? Cela va presque sans dire... Alors passons directement à une lecture qui, encore une fois, n’a rien à voir.

La Langue du Diable, du dessinateur italien Andrea Ferraris, se déroule en Sicile en 1831. Nous y suivons l’émergence puis la disparition d’un îlot volcanique à quelques encablures de Sciacca. Cette fameuse langue du Diable surgit des fonds marins pour darder ses flammes infernales, provoquant curiosité, frayeur et convoitise. Épisode véridique, qui vit le Royaume des Deux-Siciles, la France et le Royaume-Uni avancer leurs pions pour s’approprier un territoire éphémère issu d’un caprice de la géologie.

Lecture en confinement #21 : "La Langue du Diable" - Par Andrea Ferraris (trad. S. Zas) - Rackham
La Langue du Diable © Andrea Ferraris / Éditions Rackham 2018

Deux frères, deux pauvres diables, sont témoins de cette apparition - disparition. Elle bouleverse leur vie déjà difficile. Pêcheurs, ils vivent dans une bicoque en bord de mer et se font journaliers agricoles quand la disette devient trop pressante. Le plus âgé des deux, nerveux, ombrageux et passionné, voit en cet événement l’occasion de sortir de leur condition. Le plus jeune, tempéré, fin et déterminé, tente de raisonner son aîné tout en apprenant à lire auprès d’une jeune femme, qu’ils ont connue enfant, et dont ils sont amoureux.

Les tensions autour de l’îlot volcanique sont fortes. Plus forts encore sont les sentiments contradictoires des deux frères. Entre révolte contre l’injuste destin dont ils sont victimes et crainte de perdre le peu qui leur reste de dignité, ils affirment tantôt leur solidarité, tantôt leur opposition. Leur intégration à la micro-société de leur village sicilien est elle aussi mise à mal. L’arrivée des appétits extérieurs, aiguisés par la possibilité de conquérir un point stratégique entre l’Italie et l’Afrique du Nord, aggrave encore la situation.

La narration classique d’Andrea Ferraris sied bien au drame qu’il construit. En quelques mois et du fait de l’apparition de la langue du Diable, leur vie bascule. L’histoire se concentre sur l’évolution de leur relation et leurs sentiments respectifs. Mais l’aspect historique n’est pas négligé, au contraire, et donne à cette bande dessinée une profondeur bienvenue. Quant au trait charbonneux, il évoque autant la dureté de la vie des frères que la poussière rejetée par le volcan naissant. Comme pour rappeler que les vies humaines peuvent être aussi explosives que les tréfonds de la Terre.

FH

La Langue du Diable © Andrea Ferraris / Éditions Rackham 2018

La Langue du Diable - Par Andrea Ferraris - Rackham - collection Morgan - traduction de l’italien par Sylvestre Zas - lettrage par Matthieu Rougé - 17 x 24 cm - 212 pages en noir & blanc - couverture cartonnée - ISBN 9782878272291 - parution le 9 novembre 2018.

Lire également sur ActuaBD : "La Cicatrice" de Ferraris et Chiocca (Rackham) : comment tue un mur

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