Ne réveillez pas un dinosaure qui dort. Un jour, un scénariste appelé Philippe Chanoinat et un dessinateur portant le nom de Philippe Castazza ont appelé Lautner pour lui demander une préface à leur album Les Teigneux (Editions Soleil) parce que, disaient-ils, ils étaient inspirés par son esprit et sa méchanceté (« Moi qui suis si gentil » se plaint Lautner). Evidemment, la tentation est grande de continuer la collaboration. Ils signèrent donc tous les trois un album chez Soleil intitulé « On achève bien les Cons » vis-à-vis duquel Lautner revendique son intervention « surtout comme conseiller technique de la connerie. »
Et puis, le réalisateur du Monocle rit jaune, de Mort d’un Pourri et de bien d’autres films mythiques qui mettent en scène Alain Delon, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Louis de Funès, Paul Meurisse, Bernard Blier, Francis Blanche, Michel Serrault ou Jean Gabin, dont les dialogues, souvent écrits par Michel Audiard, sont autant d’expressions cultes du cinéma français, prend goût à la BD. A l’instigation et avec l’aide de José-Louis Bocquet, il se lance dans un projet pour les Editions Emmanuel Proust, Baraka, « une comédie policière assez ironique », dont l’album vient de sortir en librairie dans la toute nouvelle collection de cet éditeur Ciné 9. Cette fois, il est seul aux commandes du scénario. « J’assume l’entière responsabilité des dialogues de la mise en scène et du découpage, déclare-t-il au journal A Nous Paris. Le scénariste José-Louis Bocquet dans sa postface témoigne : « Il me posa des questions très précises sur les spécificités de la narration en bande dessinée, axant sa curiosité sur la valeur elliptique de l’espace entre deux cases et la simultanéité des actions dans une même vignette. En somme, comment apprivoise-t-on le temps qui passe avec des images fixes ? Le temps, c’est le rythme. Le tempo, c’est l’art du raconteur d’histoire. »
La conclusion ? Comme le dit José-Louis, c’est que "Même sur le papier, Lautner reste un metteur en scène". Si le dessin de Wilmaury, revenu à la BD après une première expérience sans lendemain chez Soleil, manque encore parfois d’assurance, La Pilule de la Chance est une farce policière du meilleur acabit. C’est frais, sympathique, entraînant, captivant et sans prétention. Cette série s’annonce sous les meilleurs auspices et pourrait bien constituer le premier best-seller des éditions Emmanuel Proust. Chapeau, monsieur Lautner !
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Photo : Didier Pasamonik