Adam est un garçon comme les autres, à l’imagination débordante (ses justifications pour des devoirs non faits sont remplis de ninjas et de dinosaures). À l’occasion d’une visite au musée, il se retrouve coincé dans le bâtiment après la fermeture. Et là, tout bascule : des tableaux sortent des personnages qui discutent le bout de gras, les statues s’animent, en un mot, l’art prend vie. Adam va être entraîné par une charmante statue féminine dans le monde de ces créatures, Chromaland, somme des imaginations des hommes. Le pays vit sous la menace de Grise, le prince du royaume, décidé à uniformiser tout cela, les couleurs éclatantes laissant place à un manteau gris monotone. Bien sûr, Adam est recruté pour sauver ce monde... et les charmes d’une princesse kidnappée l’aident à vite accepter.
Si l’idée de base de Chromaland, celle d’un royaume où se retrouvent les créations de l’imagination humaine, est bien dans la lignée de ce qui pu déjà être fait ces dernières années en BD (on pense par exemple à l’univers de la Ligue des Extraordinaires Gentlemen, de Moore et O’Neill, où vivent tous les personnages de romans), elle semble se focaliser dans ce tome sur la peinture et la sculpture, plus que sur la littérature, ce qui donne des scènes où se côtoient un homme à la pomme de Magritte, des petits monstres de Bosch ou l’invité douteux de Edward Gorey, comme on le voit sur la couverture. Cela dit, l’intrigue de ce premier tome n’est pas particulièrement originale, on espère que Alex De Campi [1] nous réserve quelques surprises. Notons tout de même plusieurs idées humoristiques vraiment amusantes, comme tous ces Jésus bébés déposés par leur Madone de mère chez une nourrice, elle aussi personnage de tableau, vite dépassée par les bambins.
Le dessinateur italien Luigi Di Giammarino a probablement dû bien s’amuser à intégrer à son propre style toutes ces représentations si différentes les unes des autres. En tout cas, il réalise un travail de très bonne tenue, dense et lisible, clairement dans la lignée des esthétiques européennes, où l’influence d’un Moebius nous semble incontournable. Il est superbement secondé par Laura Martin (anciennement DePuy), une coloriste d’exception dont la réputation n’est plus à faire aux USA.
Ce premier tome de Adam au Chromaland est une sympathique introduction à un monde et à des personnages dont on espère qu’ils seront plus largement développés dans les prochains volumes.
(par François Peneaud)
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[1] Scénariste de l’excellent Smoke chez Delcourt, et du premier tome de Messiah Complex chez les Humanos.