1897. Dans le port d’Anvers, on charge et on décharge les vapeurs qui « font le Congo ». Cargaisons d’ivoire et de caoutchouc d’un côté, d’armes et de chaines de l’autre… Car en dépit du nom officiel de cette lointaine possession africaine – E.I.C., pour Etat Indépendant du Congo –, c’est bien le Roi Léopold qui en est l’unique propriétaire légal. Et sa consigne est claire : rentabiliser au mieux et au plus vite cette immense colonie, quitte à y faire régner l’arbitraire le plus absolu.
Loin des regards, un quasi esclavage est imposé aux populations locales, comme l’a constaté depuis sa récente arrivée au Kivu le jeune missionnaire Paul Delisle. En dépit des discours « civilisateurs », éducation et évangélisation ne sont décidément pas les priorités du tyran de Bruxelles…
Nous avions partagé notre coup de cœur pour le premier tome d’Africa Dreams, le deuxième tome prolonge ces révélations bouleversantes tout en changeant quelque peu la donne. On suit toujours ce jeune prêtre, mais sans s’attacher à ce père qu’il a retrouvé, c’est vers les autres pères, ces coloniaux religieux, qu’il va découvrir une autre vision de l’évangélisation.
Tout en présentant dans le même temps les débuts d’une dénonciation bien faible en comparaison aux exactions imposées à la population congolaise, l’album profite d’un merveilleux graphisme, qui tranche avec la noirceur de sa thématique. C’est pourtant un réveil incontournable pour les Belges qui pensent toujours, dans leur grande majorité, que l’on a avant tout apporté les bienfaits de la civilisation occidentale aux Congolais.
Mais en fait de civilisation, ce sont des chaînes qui leur ont été offertes...
(par Charles-Louis Detournay)
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