Ce sont des dessins que vous redécouvrez ?
Il y avait énormément de dessins que j’avais oubliés. Les séries de BD, on a le temps de les mémoriser. Mais par contre, les illustrations, je ne m’en souvenais pas.
Qu’avez-vous pensé de ce premier volume de l’Intégrale ?
Pour moi, c’est très honorable d’avoir un pareil ouvrage consacré à mes débuts. Cela dit, quand je vois mes premiers dessins, je ne suis pas très fier. J’ai envie de les refaire, mais c’est trop tard ! (rires)
En même temps, on remarque vos influences américaines...
Ah, ça oui, elles sont très fortes. Toute mon enfance, j’ai été influencé par cela. À mon époque, il y avait dix ou douze "illustrés", comme on les appelait, dans les kiosques. Ils étaient en majorité remplis de bandes dessinées américaines. le premier journal que j’ai lu, c’est Le Journal de Mickey qui était paru en 1934. J’avais 7 ans.
Quels étaient vos grands auteurs favoris ?
Milton Caniff, Alex Raymond, Burne Hogarth... Ces auteurs paraissaient dans Robinson.
Ce n’est pas faire défaut à René Goscinny que de constater qu’il y avait un Uderzo avant Goscinny...
Comme il y a eu un Goscinny avant Uderzo ! Nous nous sommes rencontrés alors qu’il vivait aux États-Unis et que je vivais en France. Je rêvais des États-Unis et lui rêvait de la France ! Nous étions nourris puissamment de ces bandes dessinées que nous avions connues. Mais on avait surtout envie de rehausser l’humour de la bande dessinée française qui nous paraissait un peu "premier degré". Avec Goscinny, ça y allait, il avait le sens des choses dans le domaine de l’humour. Mais on avait du mal à l’imposer. Ses scénarios étaient considérés comme "trop intellectuels".
Peut-être trop anglo-saxons... Avant Astérix, il y avait Oumpah-Pah, Luc Junior...
Oui, mais surtout " trop intellectuels", tandis que mes personnages, eux, étaient "trop grossiers". Pourtant, quand on a essayé de placer Oumpah-Pah aux États-Unis, cela n’a pas marché. il ne comprenaient pas que l’on se serve de leur histoire à eux. Luc Junior était une sorte d’ersatz de Tintin...
Bel ersatz, quand même !
Oui, mais ce n’était pas notre truc. On s’est vengé avec ce Gaulois qui ne devait pas avoir de compagnon, ni de chien, et puis les choses ont tourné différemment... Comme quoi, on revient toujours aux mêmes choses...
Cette carrière, vous l’avez vue passer ? Il y a une quantité incroyable de dessins !...
J’ai travaillé énormément parce que c’était très mal rétribué. Aujourd’hui, on travaille surtout pour des albums, donc on a le temps de faire l’album. À l’époque, on travaillait pour des quotidiens et des hebdomadaires qu’il fallait nourrir constamment.
Quand j’ai dû fournir de front Tintin et Pilote, cela a été un travail colossal. Je me levais à cinq heures du matin et je bossais sans arrêt jusqu’à minuit. Il n’y avait pas de dimanche et je partais avec ma planche de dessin en vacances pour continuer à travailler. C’était de la folie, il fallait aimer ce métier...
En tout cas, cela vous a apparemment tenu en forme jusqu’à aujourd’hui.
C’est gentil de me le dire.
Propos recueillis par Didier Pasamonik
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Photos : D. Pasamonik (L’Agence BD)
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