Romans Graphiques

Alerte 5 - Par Max de Radiguès - Casterman

Par Charles-Louis Detournay Frédéric HOJLO le 21 janvier 2022                      Lien  
Chaque album de Max de Radiguès subjugue : par cette ligne claire qui bénéficie de plus en plus de détails et de lisibilité à chaque album, et par des thématiques audacieuses, toujours interpellantes. Cette fois, il traite avec réussite de l'isolement et du délit de sale gueule, même si l'on aurait attendu un peu plus d'audace dans la démarche.

Alors que la NASA effectue le lancement d’une navette avec son équipage, celle-ci explose juste après le décollage, à la suite d’un acte de sabotage. L’accident n’est pas fortuit. D’origine terroriste, il déclenche une alerte de niveau 5. Tous les sites et de toutes les missions en cours voient leur sécurité renforcée.

Alerte 5 - Par Max de Radiguès - Casterman

La base martienne où vivent cinq astronautes se retrouve alors encore plus coupée du monde. Toute communication avec l’extérieur lui est désormais interdite. Ils ne sont pas les seuls à devoir restreindre leurs libertés, pour des raisons qui leur échappent, sous prétexte de terrorisme. La station orbitale ISS doit également, et pour la première fois, être totalement évacuée. Ce que refuse l’un de ses occupants.

La vie seul en apesanteur ou à cinq au sein de la mission martienne est-elle vraiment possible lorsque les précautions pour cause de terrorisme s’apparentent à des sanctions voire à de l’exclusion ?

Le talent graphique et l’œil aiguisé de Max de Radiguès ne sont plus à démontrer. Auteur d’une douzaine d’ouvrages, principalement chez Sarbacane mais aussi Delcourt, Casterman et L’employé du Moi pour qui il est également éditeur, il a reçu au Festival d’Angoulême 2028 le Fauve Polar SNCF pour Bâtard. Il en fait une nouvelle fois la preuve avec ce roman graphique - présent dans la sélection du FIBD 2022 - au scénario rondement mené, ménageant de réelles surprises et posant des questions très actuelles. Il n’oublie pas non plus l’émotion et l’humour, s’attachant à dresser des portraits psychologiques fins et complexes et s’attardant sur les relations entre les personnages.

"KETJE" n° 6, fanzine auto-édité où est né "Alerte 5" © Max de Radiguès, mars 2021

Sous couvert d’exploration spatiale, l’auteur traite du respect des règles et du cadre imposé lorsque la sécurité est en jeu. Une thématique certainement induite par les attentats, et qui change doucement d’orbite en cours d’album, pour se fixer sur l’isolement et les contacts avec les autres, dopé par le confinement bien entendu. Préjugés, ambiguïté des rapports humains, pression sociale sont interrogés.

Le dessin de Max de Radiguès est toujours net et précis. S’approchant d’une ligne claire jouant des contrastes entre noir et blanc, il se distingue par sa lisibilité. Dynamique mais sans effets inutiles, il sert autant l’action que les scènes dialoguées. Un style dorénavant très maîtrisé et bien ancré pour l’auteur, qui a assimilé les influences de la bande dessinée franco-belge « classique » et a su leur insuffler une modernité sans tape-à-l’œil.

Si l’on se prend au jeu, mais que l’on comprend rapidement ce que dissimule cette mission martienne, il manque un véritable bouleversement pour être chamboulé par Alerte 5. Restent les personnages, le cadre et les réflexions portés par une belle authenticité. La science-fiction demeure un terrain idéal pour mettre en scène la comédie humaine.

(par Charles-Louis Detournay)

(par Frédéric HOJLO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782203215795

Alerte 5 - Par Max de Radiguès - Casterman - 15,1 x 19 cm - 192 pages en noir & blanc - couverture souple - parution le 2 juin 2021 - 15 €.

Alerte 5 a été prépublié en six épisodes dans le fanzine auto-édité KETJE entre janvier 2020 et mars 2021.

Consulter le site de l’auteur.

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Tous les visuels sont : Alerte 5 © Max de Radiguès / Casterman 2021

Casterman ✍ Max de Radiguès ✏️ Max de Radiguès à partir de 13 ans Policier, Thriller Science-fiction Belgique 🏆 Sélection Prix Fauve des Lycéens 2022 🏆 Sélection officielle Angoulême
 
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4 Messages :
  • Alerte 5 - Par Max de Radiguès - Casterman
    22 janvier 2022 10:43, par Norbert

    Quand vous vous dites qu’on "s’approche d’une ligne claire" avec un dessin "toujours net et précis, dynamique mais sans effets inutiles", je reste dubitatif...
    Effectivement, je confirme l’absence d’effets inutiles, on est quand même très très très loin du modèle, au vu des extraits présentés. Quant à la "modernité" que cela est censé apporter, moi j’y vois plutôt du travail vite fait avec des attitudes de personnages bancales et des visages sans grand caractère.
    Qu’on me comprenne : je ne suis pas contre cette façon de "moderne" de faire de la BD, je suppose au vu de la critique que l’histoire est sans doute passionnante, bien racontée avec le minimum de moyens, je sais bien qu’aujourd’hui on vous demande de produire 192 pages en 3 mois payées au lance-pierres...
    Mais appelons un chat un chat, ça reste du dessin vite tracé qui, d’un point de vue strictement graphique, n’a pas beaucoup d’intérêt sinon de servir l’histoire de façon efficace.
    Ce n’est pas le genre de livre dans les pages duquel on aura envie de se replonger pour admirer le trait.
    Et je me répète : je n’ai rien contre Max de Radiguès et son livre que je lirai probablement avec grand plaisir, mais par pitié ne parlez pas de ligne claire "modernisée", c’est à mon avis inopportun.

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    • Répondu par Frédéric HOJLO le 22 janvier 2022 à  11:23 :

      Bonjour et merci pour vos remarques.
      L’expression était à prendre dans un sens assez simple. « Ligne claire » pour le dessin au contour et l’usage des contrastes. « Modernisée » pour la simplicité des décors, qui ne cherchent pas à tirer vers le réalisme mais le signifiant (i.e. que l’on comprend sans justement s’arrêter sur les détails). L’usage de cette expression reste discutable cependant, bien d’accord avec ça, cela dépend surtout de l’acceptation - large ou restreinte - que l’on en fait.
      Par contre, il faut plus que quelques semaines pour réaliser une bande dessinée comme celle-là. Certes pas autant que s’il le dessin était ultra détaillé et en couleur, mais ne négligeons jamais le travail des auteurs.
      Cordialement,

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      • Répondu par Norbert le 22 janvier 2022 à  12:45 :

        Quand je parlais de 3 mois pour produire un album, c’était une façon de parler et certainement pas pour dénigrer le travail des auteurs mais pour pointer une triste dérive de l’édition actuelle. Je pense qu’ils aimeraient certainement avoir les moyens de dessiner dans de meilleures conditions.
        Je crains que les grandes œuvres graphiques soient de plus en plus rares à l"avenir si le système ne se remet pas en question.

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        • Répondu par Frédéric HOJLO le 22 janvier 2022 à  17:14 :

          Nous sommes bien d’accord (même si finalement nous avons un peu dérivé de notre point de départ). Sans une condition (revenus, sécurité sociale, perspective de retraite...) viable, pas mal d’œuvres risquent de ne jamais voir le jour.

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