BD d’Asie

Angel Heart : un adieu riche en émotions

Par Guillaume Boutet le 2 mars 2018                      Lien  
Après seize ans de bons et loyaux services, Xiang et Ryô tirent leur révérence. Un dernier acte à l’image de la série : une touchante réunion de famille à l’occasion d’un mariage, plutôt bien fichue mais réservée avant tout aux inconditionnels de « City Hunter ».

Série culte de la fin des années 1980, issue du célèbre magazine Weekly Shônen Jump, City Hunter, connue par chez nous sous le titre de Nicky Larson, avait eu droit à sa séquelle, lancée en 2001 sous le titre d’Angel Heart.

Contrairement à d’autres projets du même genre, entre hommage et nostalgie, Angel Heart s’est révélé une série à part entière, dotée d’une identité propre, comptabilisant en tout 49 tomes, répartis en deux saisons, dépassant ainsi le manga original City Hunter et ses 35 tomes (1986-1992).

Tsukasa Hojo a donc dessiné ces nouvelles aventures de Ryô Saeba durant seize ans, de 2001 à 2017. Une œuvre qui semble lui avoir particulièrement tenu à cœur, qui donnait par moment l’impression de pouvoir se poursuivre éternellement, mais à laquelle le célèbre mangaka a fini par mettre un terme, avec des derniers tomes « réglant » plusieurs points d’intrigues, plus ou moins définitivement, permettant de dire adieu à son plus célèbre héros ainsi qu’à sa fille.

Angel Heart ne fut pas exactement une vraie suite à City Hunter car Hojo réarrangea et modifia certains personnages et histoires, comme avec Mikki, la compagne de Falcon dans City Hunter, devenue dans Angel Heart une enfant et sa fille adoptive.

Angel Heart : un adieu riche en émotions
© 2010 Tsukasa Hojo / TOKUMA SHOTEN / Panini Manga

Et c’est là que se situe le projet artistique de la série, qui tenait à cœur au mangaka : des histoires familiales, tragiques, manquées ou recomposées. C’est ainsi que Hojo fit mourir dès le premier chapitre Kaori, la compagne de Ryô, dont le hasard voulu que le cœur soit transplanté chez une jeune tueuse qui avait perdu tout envie de vivre et qui devint par la force du destin la fille de Kaori et de Ryô : il s’agit de Xiang Ying.

Avec cette transformation, la dimension romance se trouva mise de côté, et les deux « héros » de City Hunter devinrent des pères célibataires, élevant leurs filles de leur mieux, avec toutes les péripéties et petites histoires allant avec.

De façon générale les personnages de l’œuvre originale prirent de l’âge, et même la toujours très sexy Saeko, désormais commissaire de police, n’y porta plus de tenues affriolantes. Quant à l’aspect polar, il laissa sa place à des affaires familiales pour lesquelles Xiang et Ryô étaient généralement engagés pour retrouver la trace d’un parent ou d’un ancien amant, même si le monde de la pègre n’était jamais bien loin.

Nous vous en avions parlé il y a trois ans, à l’occasion de la sortie du neuvième tome de la saison 2 : les histoires d’Angel Heart ont eu tendance à se répéter, reprenant toujours les mêmes schémas, jouant beaucoup la carte du larmoyant avec plus ou moins de bonheur.

© 2010 Tsukasa Hojo / TOKUMA SHOTEN / Panini Manga

Dans la quantité - nous parlons d’une série de 49 tomes - certaines histoires sortirent indéniablement du lot, comme celle que nous avions chroniquée il y a trois ans, tandis que d’autres se sont avérées anecdotiques, voire douteuses, à l’image de celle du tome précédent, amenant à un peu d’usure, inévitable sur un titre aussi long.

Dans le cadre des histoires peu réussies, l’avant-dernier tome se révèle en effet emblématique du syndrome. Consacré au vrai père de Xiang, Li Jian-Qiang, un parrain d’une mafia asiatique, cet épisode n’a rien épargné au lecteur côté « mélo », jusqu’à la soudaine maladie du mafieux qui allait l’emporter sous peu !

Avant de partir, Li Jian-Qiang souhaitait passer une soirée avec Xiang pour lui offrir une peluche qu’avait achetée sa défunte épouse et mère de Xiang. Une séquence extrêmement « gnangnan » et mielleuse... Qui pourrait passer si Li Jian-Qiang n’était pas à la tête d’une organisation criminelle qui élève des enfants pour ses commandos d’élite !

Le côté trop plein de bons sentiments passe fatalement mal quand le lecteur réfléchit un peu à cette situation paradoxale. À force de vouloir rendre humains tous ces personnages de l’ombre, Hojo tomba parfois dans une sorte de grotesque.

© 2010 Tsukasa Hojo / TOKUMA SHOTEN / Panini Manga

Le dernier tome - seizième de la saison 2 - qui nous intéresse aujourd’hui propose une ultime histoire plus simple et classique : le mariage de Fang-Yu et de Mao, deux personnages bien connus de la série. D’un côté la mercenaire borgne et de l’autre le prince héritier d’un pays sortant d’une longue guerre civile.

Rien de mieux qu’un mariage pour terminer une œuvre sur la famille comme Angel Heart. Le déroulement et la menace finale ne sont pas spécialement originaux, et tout se devine facilement, mais du côté des émotions et des adieux aux personnages le compte y est : difficile de ne pas verser sa petite larme lorsque arrive le moment de se séparer de cette grande famille.

L’œuvre se termine également sur l’anniversaire des 20 ans de Xiang, elle qui fut adoptée par Ryô à l’âge de 15 ans. Nous aurons donc suivi toute son adolescence, sur cinq années, jusqu’à sa majorité - ainsi au mariage de Fang-Yu et de Mao notre héroïne boit de l’alcool pour la première fois, symbolisant la fin définitive de son enfance.

Une jolie fin, pour une très belle série qui nous a fait partager les joies et les peines d’une galerie de personnages attachants et extraordinaires. La série a sans doute trop tiré en longueur, multipliant presque à l’infini les mêmes schémas, mais elle sut également sonner juste à de nombreuses reprises, même dans sa dernière partie, gardant ainsi une belle qualité durant ses seize années de publication. Une jolie performance pour une « séquelle ».

© 2010 Tsukasa Hojo / TOKUMA SHOTEN / Panini Manga

(par Guillaume Boutet)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782809468809

Angel Heart Saison 2 T16. Par Tsukasa Hojo. Traduction Xavière Daumarie. Panini Manga. Sortie le 7 février 2018. 192 pages. 8,99 euros.

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