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Angoulême 2010 : le Grand Prix va à Baru

Par Morgan Di Salvia le 31 janvier 2010                      Lien  
Comme chaque année, l’Académie des Grands Prix de la ville d’Angoulême s’est réunie ce matin pour choisir celui qui rejoindra le cercle fermé des auteurs récompensés pour l’ensemble de leur œuvre. Le jury a élu Baru, auteur engagé, en dehors des modes. Un choix fondamentalement populaire, tant Baru a choisi de mettre les gens simples au cœur de ses histoires.

Après deux années sous le signe de la Nouvelle Bande Dessinée [1], le Festival d’Angoulême récompense un auteur en dehors des courants et des modes. Baru (Hervé Baruléa) est le nouveau Grand Prix de la Ville d’Angoulême. Il présidera l’édition 2011.

Angoulême 2010 : le Grand Prix va à Baru
L’Autoroute du Soleil, une commande de l’éditeur japonais Kodansha
© Baru - Casterman

Né en 1947, Baru débute en 1982 dans les pages de Pilote. Venu tard à la bande dessinée, cet ancien professeur d’éducation physique qui a grandi dans une famille biculturelle de l’est de la France (sa mère est bretonne, son père italien), a trouvé dans cet ancrage social le terreau de ses histoires. Quand il commence à écrire ses bandes dessinées c’est pour « prendre publiquement la parole sur la manière dont va le monde », cela donne Quéquette Blues , première histoire consacrée à son adolescence à Villerupt.

Depuis, Baru trace ses histoires pour donner aux siens, au milieu modeste, le beau rôle : le premier. Ce n’est pas une histoire de vengeance, c’est une histoire de dignité. De Quéquette Blues aux Années Spoutniks, Baru fait de cette classe populaire dont il est originaire un personnage de roman à part entière.

Le Chemin de l’Amérique, où la boxe sert d’ascenseur social

En presque trente ans de carrière il a publié une quinzaine d’albums et, fait extrêmement rare, a reçu deux fois le prix du meilleur album à Angoulême : en 1991 pour Le Chemin de l’Amérique et en 1996 pour l’Autoroute du Soleil.

Récemment, il a signé L’Enragé , grandeur et décadence d’un boxeur en deux albums, publié par Dupuis entre 2004 et 2006. En 2008, Baru a adapté pour la collection Casterman / Rivages / Noir le roman Pauvres Zhéros de Pierre Pelot.

Le déclic en lisant Reiser

Au début des années 1970, Baru prend Reiser en pleine tronche. Lui qui a choisi d’enseigner, cherche encore un moyen de prendre la parole publiquement. L’iconoclaste Reiser lui ouvre la voie. En 1975, il crée avec Jacques Pierre et Daniel Ledran [2] Le Téméraire, journal satirique fortement influencé par Hara Kiri et Charlie Hebdo.

Quéquette Blues, l’album fondateur de l’oeuvre de Baru porte en lui la plupart des thèmes à venir de son oeuvre

« Je dois à Reiser la formidable révélation de la puissance des images à mettre en scène le monde pour lui faire cracher sa vérité en flinguant tout ce qui fait écran. Pan sur la laideur, pan sur la bêtise, l’hypocrisie, les snobs, l’arrogance, la mesquinerie, (…) Reiser était à cette bande dessinée là, ce que Hendrix était à la Stratocaster : après eux plus rien ne pousse » [3]

En 1972-73, il passe deux années en Algérie pour son service militaire. L’indépendance algérienne sera le sujet du Chemin de l’Amérique qu’il réalisera plus tard avec Jean-Marc Thévenet.

Dans les années 1980, Baru trace sa route, il débute Quéquette Blues, publie deux albums chez Futuropolis, avant de jeter les bases de son road movie dessinée avec Cours Camarade, dont il reprendra la trame dans L’Autoroute du Soleil, réalisé en 1994 pour l’éditeur japonais Kodansha.

De 1999 à 2003, il revient sur son enfance avec Les Années Spoutnik, récit tendre sur une époque où Villerupt était la Moscou des pays lorrains.

Baru travaille en ce moment à la réalisation d’une saga familiale sur l’immigration italienne qui s’appellera Bella Ciao, et devrait être publiée chez Futuropolis à la fin de l’année.

Grâce à cette distinction, Baru va se retrouver pendant un an sous les feux de la rampe

Un auteur unanimement reconnu par ses pairs

Cette année, le festival avait projeté le documentaire de Jean-Luc Muller intitulé Génération Baru. On pouvait y entendre ô combien l’auteur lorrain inspire le respect à ses pairs. Après José Munoz en 2007, voici récompensé une personnalité révélée dans les années 80 et sans égale dans le paysage de la bande dessinée.

L’édition 2011 du Festival d’Angoulême s’annonce populaire et rock’n’roll. On ne s’en plaindra pas.

(par Morgan Di Salvia)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

En médaillon : Baru © Didier Pasamonik
Baru, sur ActuaBD, ce sont aussi des chroniques, des entretiens et des actualités :

> Les Années Spoutniks T4

> L’Enragé T1, T2

> Noir

> Pauvres Zhéros

>"Mon but est de raconter les gens face à l’histoire qui avance" (entretien en mars 2007)

> "Les Français ont oublié que des crises comparables se sont déjà déroulées précédemment " (entretien en mai 2006)

> Charleroi, ville populo, expose Baru

> Génération Baru, un documentaire de Jean-Luc Muller

[1les présidences successives de Dupuy & Berberian et Blutch

[2le coloriste de la plupart de ses albums.

[3Cité dans Jeux d’Influence, Editions P.L.G., Montrouge, France, 2001

✏️ Baru
 
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4 Messages :
  • Angoulême 2010 : le Grand Prix de la Ville va à Baru
    31 janvier 2010 21:13, par serpicco

    bravo à cet auteur puissant

    Répondre à ce message

  • Angoulême 2010 : le Grand Prix va à Baru
    1er février 2010 08:38, par Yvan

    Oui bravo ! De très chouettes albums..
    En attendant avec impatience le prochain chez Futuropolis.

    Répondre à ce message

  • Angoulême 2010 : le Grand Prix va à Baru
    1er février 2010 08:45, par narcisse

    Baru est un bon auteur. "La piscine de Micheville", "la route de l’amerique", ou "l’autoroute du soleil" sont des classiques mais ça reste malgré tout encore un grand prix franco français... Le festival n’a d’international que de nom. Combien d’auteurs non francophones ont eu le grand prix d’Angouleme...
    Il me semble aussi que le grand prix doit récompenser une oeuvre forte, et qui apporte beaucoup à la bd...
    A part Chris Ware, je ne vois pas qui fait autant avancer la bd actuellement...
    Le manque de courage du comité des grands prix est inquiétante..

    Répondre à ce message

    • Répondu par Oncle Francois le 2 février 2010 à  14:56 :

      Personnellement, je dirai que Baru mérite son prix, car il dessine depuis bientôt trente ans, et c’est un auteur complet dont les albums sont toujours restés lisibles. On sent chez lui une véritable attirance pour le social, qui ne sacrifie en rien aux effets de mode.

      Maintenant, si vous trouvez que le Prix d’Angoulême n’est pas assez international, il faudrait peut-être que nos "distingués" jurys se rendent dans une librairie pour voir ce qui se vend ou ce qui se lit sur place, notamment du coté des auteurs belges wallons. Ils y verraient les énormes oublis qui on marqué leurs distributions d’Alfred ou de Lynx. Je pense notamment à messieurs Van Hamme et Cauvin, Goscinny, Charlier et Greg. Des scénaristes à l’inspiration inépuisable qui ont contribué à forger la BD d’aujourd’hui. Bien évidemment, je sais que les trois derniers nous ont quitté. Alors pourquoi refuser le principe de prix posthumes ? Mieux vaut tard que jamais, une reconnaissance post-mortem permettrait déjà de réparer en partie les erreurs d’appréciation de ces sinistres assemblées. N’oublions pas les dessinateurs avant qu’ils ne rejoignent leurs collègues Tibet et Jacques Martin.

      Concernant les jeunes auteurs, dans un souci de réconciliation des générations, je leur conseillerai de suivre l’exemple de Bravo sur Spirou ou de Trondheim sur Lapinot (l’accélérateur atomique). Et de dédier leurs livres aux grands auteurs classiques qui les ont précédés, et sans lesquels ils ne seraient rien. Sfar n’a jamais caché l’admiration qu’il éprouve pour Fred, les autres n’ont qu’à rendre hommage à leurs auteurs favoris, cela changera des copains avec qui on partage un atelier ou avec qui on va boire un verre de bière !

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