À ce jour, la présence présidentielle reste hypothétique. Au quotidien régional Sud-Ouest, le délégué général du FIBD, Franck Bondoux, déclare : "J’ai croisé par hasard le président Macron au Salon du livre. J’en avais profité pour lui dire que nous l’attendions à Angoulême et il m’avait promis qu’il viendrait avant la fin de son mandat. Mais quand ? Je n’en sais rien." Le candidat Macron avait envisagé de venir en 2017 lors du Festival mais s’était ravisé à l’annonce de la venue de Jean-Luc Mélenchon.
Pour Franck Riester, c’est différent. Le ministre de la culture s’est fortement engagé dans l’année BD 2020 lancée en janvier dernier sur la suggestion du directeur général de la Cité de la bande dessinée, Pierre Lungheretti et de Laurence Cassegrain, directrice de projet auprès du directeur chargé du livre et de la lecture. Qui plus est, en pleine période d’élections municipales, alors que l’actuel maire d’Angoulême Xavier Bonnefont tente de se faire réélire sous la bannière du partir Agir dont le ministre de la culture est un des co-fondateurs, voilà encore une raison supplémentaire pour lui de se montrer.
Un rapport non consenti
Cela dit, la mésaventure de la cérémonie des vœux pourrait se répéter. D’abord parce que les auteurs sont très remontés contre le ministre. En cause, l’introuvable Rapport Racine réclamé récemment par Marion Montaigne, la présidente du jury du FIBD 2020 dans une lettre ouverte sur France Inter. Lors du lancement de BD 2020, le ministre de la culture avait déclaré l’avoir reçu et devoir en discuter avec son auteur, Bruno Racine, missionné pour faire le bilan de la situation des auteurs. Le ministère devait alors en tirer de quoi adapter les politiques publiques existantes en faveur des artistes, auteurs et créateurs.
Mais depuis, silence radio. Pourquoi ne sort-il pas ? "Parce qu’il est trop favorable aux auteurs" disent certains. C’est une hypothèse car il est clair que le Syndicat National de l’Édition est vent debout contre une initiative de l’État qui ajouterait des contraintes à une profession déjà fragile, d’autant que le cadre de la relation d’un auteur avec son éditeur est celui d’un indépendant face à un entrepreneur hors de toute subordination comme ce serait le cas d’un employé.
Le SNE se plaint aussi d’une désinformation qui laisserait entendre que l’éditeur est le seul à tirer des bénéfices d’une publication. De fait, d’autres acteurs : imprimeurs, libraires, distributeurs et même l’État émargent au compte d’exploitation d’un livre. Selon nos sources, une étude circule au SNE sur le détail de ce compte d’exploitation mais n’a pas été communiquée jusqu’ici. En face, les auteurs s’arc-boutent sur une revendication de droit d’auteur à 10% minimum. Pas sûr qu’elle soit entendue et les éditeurs s’inquiètent à ce que l’État in fine le lui impose en sus des charges sociales.
Aux dernières nouvelles, le rapport serait remis… en février, après le festival. Prudence est mère de sûreté…
Un mic-mac administratif
Mais ce rapport-arlésienne n’est pas la seule source de colère des auteurs. Depuis le 1er janvier 2020, c’est l’URSSAF qui collecte les cotisations et contributions sociales des artistes-auteurs, et non plus l’Agessa et la MDA (Maison des artistes). Or, le moins qu’on puisse dire, c’est que le système cafouille. L’organisme chargé du recouvrement, l’URSAFF Limousin, réclame des sommes forfaitaires qui n’ont parfois rien à voir avec le revenu des auteurs concernés, la régularisation leur incombant face à une administration aux abonnés absents. Dans le contexte d’une forte protestation sociale et d’une grève qui est la plus longue depuis des décennies, cela fait tache…
Bref, les auteurs se concertent entre eux pour savoir quelles actions ils envisageraient de mener à Angoulême. Certaines d’entre eux sont pour des actions plutôt radicales, d’autres tempèrent. De grands noms enfin envisagent de bouder ostentatoirement ces "réjouissances" de l’année BD 2020. Autant dire que les sentiments sont très partagés.
Les festivaliers redoutent de toutes manières cette visite présidentielle et ministérielle : elle démultipliera les contrôles de sécurité et rendra encore plus difficile la circulation dans la ville déjà très encombrée par le festival.
Tous ces éléments mis bout à bout font que l’exécutif risque de reporter sa visite angoumoisine à une autre fois.
(par Jaime Bonkowski de Passos)
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