On n’échappe pas à Titeuf qui est véritablement LA nouveauté de la rentrée. La marguerite a attendu 13 pétales pour proclamer : "à la folie !". Et la folie, on est près d’y être passée lorsque, se réveillant un beau matin, Titeuf s’aperçoit... qu’il est devenu une fille ! Comme dans la métamorphose de Kafka, le regard de ses proches a changé, d’ailleurs, ils l’appellent... Titeufette. La fable est croustillante et elle interroge la question de l’identité sexuelle, la sexualité étant, on le sait, une des grandes interrogations du gamin à la mèche blonde.
L’identité tout court, d’ailleurs puisqu’un nouveau personnage fait son entrée dans l’univers titeufien, une Black du nom de Ramatou qui n’est pas insensible au petit homme, lequel en est tout tourneboulé.
On reste séduit par la solidité de l’univers de Zep dont le dessin est toujours aussi inventif. Aucune baisse de forme, toujours la même intelligence, et ce regard gentiment corrosif, notamment avec ce nouveau personnage décapant quelque peu le discours formaté sur le commerce équitable et le développement durable : Tata Nature. Un must !
L’autre personnalité remarquable de la rentrée Glénat est sans conteste Jean-Blaise Djian. Cela fait des années que Djian roule sa bosse depuis que Régis Loisel lui a mis le pied à l’étrier avec La Bande à Renaud en 1986. Depuis, il a fait son chemin passant d’un éditeur à l’autre (Emmanuel Proust, Soleil, Delcourt, Vents d’Ouest...), et pas forcément les plus gros, même si son registre va de la SF au western, de la BD adulte à la fable pour la jeunesse.
On a commencé à vraiment le remarquer avec Le Grand Mort qu’il co-scénarise avec Loisel ou encore avec Les Quatre de Baker Street, une collaboration avec Olivier Legrand (scénario) et David Etien (dessins).
Cette rentrée BD 2012 montre qu’il est arrivé, comme tout bon vin, à maturation. Le voici avec Claude Pelet dans une nouvelle série ésotérico-historique dont Glénat a le secret : Le Destin des Algo-Berang.
Dans une France de la fin du 19e Siècle, deux familles parisiennes voisines se rapprochent, au point qu’une idylle se noue entre les plus jeunes d’entre eux. Mais un drame survient et les doutes se profilent : et si ce rapprochement n’était pas le fait du hasard ? Nous sommes dans une intrigue à la Balzac mâtinée de Sambre. La facture du dessin de Claude Pelet ajoute au classicisme de l’album qui figure parmi les bonnes surprises de la rentrée.
On retrouve Jean-Blaise Djian en tandem avec Olivier Legrand dans une nouvelle série qui donne une suite au récit mythique des Argonautes dans une histoire d’Heroïc Fantasy qui ne manque ni de souffle, ni d’action, ni de poésie. Le tome 1, Les Derniers Argonautes : Le Silence des Dieux, est très bien servi par le dessin et les couleurs de Nicolas Ryser, un dessinateur puissant qui mérite qu’on le tienne à l’œil.
Ces deux facettes de la rentrée Glénat montrent que l’éditeur grenoblois n’a pas perdu la main. Il reste un découvreur de talents, en particulier dans la veine populaire.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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