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Astérix, une étoile qui ne faiblit pas

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 4 décembre 2014                      Lien  
Alors que l'adaptation en dessins animés de l'emblématique "Domaine des Dieux" fait des débuts pétaradants en salle dans une production M6 Studios en 3D, l'étoile d'Astérix ne semble pas faiblir.
Astérix, une étoile qui ne faiblit pas
La 3D aime bien les gros...
© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

C’est une machine de guerre bien huilée : la fin de l’année 2013 était consacrée au lancement d’un tout nouvel album d’Astérix dont la réalisation, pour la première fois, n’était plus confiée à ses créateurs d’origine. Fin 2014, c’est le film d’Alexandre Astier et Louis Clichy tiré d’Astérix et le Domaine de Dieux qui fait l’affiche, en attendant le nouvel album qui devrait respecter une cadence d’une sortie tous les deux ans. Une bonne nouvelle pour Didier Conrad qui avait dû exécuter Astérix chez les Pictes en seulement quelques mois.

Les éditions Albert-René publient une nouvelle édition agrémentée d’un cahier indéit de 16 pages.

Là encore, la légion gallo-romaine montre son efficacité : Teasing savamment distillé, mise en avant d’auteurs charismatiques : le Alexandre Astier de Kaamelott et un des animateurs les plus doués de Pixar, le Français Louis Clichy.

Ici encore, nous avons une nouveauté : Astérix, adapté au cinéma depuis 1967, après avoir vécu le film d’animation en 2D et l’adaptation en prises de vue réelle, passe cette fois pour la première fois en 3D.

Et comme l’essentiel de l’album se déroule dans le village gaulois ou tout à côté, toute la galerie des personnages principaux d’Astérix peut être exploitée, suscitant une multitude d’actions secondaires. Le Domaine des Dieux est en effet le seul album où Rome, et pour cause, s’invite dans le village des irréductibles.

Eh oui, Astérix est notre Superman à nous...
© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

La 3D apporte une dimension inédite à l’univers d’Astérix : les personnages, même s’ils souffrent d’une esthétique graphique dépendante des logiciels et qui stéréotype quelque peu leurs traits (la filiation avec Pixar est évidente), gagnent une plasticité extraordinaire qui permet de restituer les qualités du dessin d’Uderzo : une science inouïe de la perspective et du placement d’un personnage dans l’espace qui permet à Astérix de jeter un Romain dans l’air, comme il le ferait d’une poupée de chiffons.

La 3D a un autre avantage : elle permet de conserver une base de données des personnages favorable aux économies d’échelle sur les productions futures. Il est plus que probable que M6 devrait bien se positionner pour les réalisations à venir dans le domaine de l’animation. On remarquera en souriant que l’un des coproducteurs du film n’est autre que Belvision, la société belge fondée par Raymond Leblanc, qui fut le producteur du premier film d’Astérix le Gaulois en 1967.

Autre pérennité d’Astérix : sa voix est assurée par Roger Carel qui l’incarnait déjà dans le premier dessin animé d’Astérix, il y a 47 ans !.

Affaire de fidélité

Cette longévité rappelle que toute l’histoire d’Astérix est une affaire de fidélité. Fidélité à l’esprit de René Goscinny qui disparaît en 1977, laissant Uderzo seul aux manettes ; fidélité de la reprise par Ferri et Conrad ; fidélité des adaptations cinématographiques par rapport à l’album ; fidélité au public enfin qui n’admettrait pas que l’on touche à "son" Astérix.

Pourtant, Astier et Clichy prennent des distances avec l’album : on ne trouvera pas dans le film la célèbre réplique "On ne parle pas sèchement à un Numide". Les réalisateurs mettent aussi en évidence, pour des raisons de dramaturgie, les failles de leurs personnages. Même Obélix, dans cette histoire, est réduit à l’impuissance aussi sûrement que Superman face à la kryptonite.

La 3D permet d’animer une quantité de personnages savoureux.
© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

Mais les codes sont respectés, ce qui vaut à ce film une critique favorable à peu près unanime et un succès public qui le place en tête du Box Office dès la première semaine d’exploitation.

Évidemment, un tel événement suscite une actualité éditoriale. Les éditions Albert René en profitent pour ressortir une nouvelle édition de l’album avec un dossier spécial de 16 pages.

Dans ce film, on ne parlera pas sèchement au Numide.
© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

Par ailleurs, l’essayiste Nicolas Rouvière, déjà auteur de deux ouvrages sur le Gaulois, a publié au printemps un nouvel ouvrage, Le Complexe d’Obélix, une relecture de l’œuvre à la lumière du chouette copain d’Astérix.

Ali Rebeihi, revient d’ailleurs samedi prochain, dans son émission Pop Fiction sur France Inter, une émission dont ActuaBD anime la chronique BD avec Olivier Delcroix du Figaro, sur ce film et sur le phénomène Astérix en général, avec un plateau d’invités dont Nicolas Rouvière fera partie.

Comment dessiner les personnages de face sans que leur nez ne leur cache le visage. La démonstration par Louis Clichy.
© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN :

- "Astérix au cinéma, Mission impossible ?" - Samedi - décembre 2014 à 20h00.
Mais on peut toujours podcaster l’émission sur LE SITE DE FRANCE INTER.

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© M6 Studio, Belvision, M6 Films et SND.

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14 Messages :
  • de personnages de perRsonnages savoureux
    poupée de chiffon sans s

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  • La 3D apporte une dimension inédite à l’univers d’Astérix : les personnages, même s’ils souffrent d’une esthétique graphique dépendante des logiciels... Logiciel, pinceau ou plume- les limites que vous évoquez émanent finalement des artistes. Chaque outil a ses contraintes. Je suis certain que les logiciels utilisés ici ont des possibilités infinies (c’est leur raison d’être d’ailleurs). Je dénote dans les images présentées ici une très bonnne modélisation mais des éclairages assez plat. Les artistes ont copié un peu trop pieusement l’univers limpide d’Uderzo. Manque de textures également dans ce que je vois. C’est en effet assez "clinique" et ça ne tient pas du logiciel, mais du choix des artistes impliqués dans ce projet.

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    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 4 décembre 2014 à  23:55 :

      "Chaque outil a ses contraintes. Je suis certain que les logiciels utilisés ici ont des possibilités infinies (c’est leur raison d’être d’ailleurs)"

      Tututu ! Il y a un effet "3D/Pixar" comme il y a un "effet Photoshop" et comme il y eut naguère un "effet aérographe", c’est à dire un moment où le procédé technique ne s’efface pas devant la création. Il est encore très présent ici et c’est peut-être ce qui vieillira le plus vite dans ce film.

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      • Répondu le 5 décembre 2014 à  00:34 :

        Ouhlala, quelles généralisations. On est d’accord que ce projet est loin d’être convaicant graphiquement. En résumé, vous rejetez la faute sur le logiciel (ou l’outil), tandis que je remets en question la direction artistique. Même "l’effet aérographe" que vous mentionnez a donné lieu à des créations exceptionnelles (Giger, Corben...) Ici, pour ce projet, je vois clairement -car je pratique la 3D- qu’on s’est beaucoup limité. C’est très minimaliste sur les éclairages et les textures. Temps, budget ? Certainement. Mais blâmer le logiciel ? C’est un peu aisé.

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        • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 5 décembre 2014 à  07:50 :

          Évidemment que je généralise un peu, mais vous-même, vous essayez de "résumer". Je crois, contrairement à ce que vous semblez suggérer, que le créateur n’est pas omniscient. Personne ne l’est, d’ailleurs. Soyez honnête : comme on n’utiliserait, dit-on, qu’une petite partie de notre cerveau, vous n’utilisez pas toutes les possibilités de votre logiciel à 100%.

          Peut-être parce que ce n’est pas utile à votre objectif (faire un dessin vite fait pour une pub ou une BD mal payée, par exemple), par manque de temps, par manque de formation à l’usage dudit logiciel... Nous sommes dans le même genre de rapport ici : le budget, les contraintes commerciales, les relations avec les ayants-droits, le manque de temps ont dicté des choix artistiques.

          Je n’accuse donc personne, au contraire : Clichy et son équipe se sont plutôt bien débrouillés avec un budget qui n’est pas hollywoodien. Je constate que cette création se repose beaucoup sur ses logiciels et que cela donne un "effet 3D", que l’on va sûrement trouver un jour très vintage, mais qui fait qu’une génération d’auteurs et de créations seront marqués une famille de logiciels, comme peuvent l’être Pong, Mario Bros, Prince of Persia et World of Warcraft dans le jeu vidéo, par exemple.

          Je n’oppose donc pas l’auteur à la technique. Je constate seulement que celle-ci détermine autant son travail que son environnement esthétique, économique et commercial.

          Autre exemple : La couleur directe de Bilal n’est pas possible financièrement avant 1965 car les scanners (et surtout leur coût, car la technique est déjà là) ne permettent pas encore cette approche graphique. Voilà le sens de ma remarque, allusive j’en conviens.

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          • Répondu par Guerlain le 5 décembre 2014 à  10:25 :

            il faut signaler certaines choses
            c’est Alexandre Astier qui a insisté pour adapter le domaine des dieux, qui n’était pas le premier choix des producteurs, pour des raisons , entre autres, économiques. En effet, les albums "à domicile" obligent de gérer toute la galerie de personnages du village, alors qu’un Astérix "en voyage" limite ces efforts. Moins de scènes avec ses personnages si emblématiques et donc demandant du soin à animer alors que des personnages "étrangers" peuvent être animés de manière plus générique.
            La conséquence de ce choix est l’absence de la femme d’Agecanonix qui aurait demandé une équipe particulière parce qu’elle pose des contraintes d’animation différente (réalisme contre "gros nez)
            et c’est Uderzo qui s’était jusqu’alors opposé à la réalisation d’Astérix en 3D, craignant que le résultat ne soit pas à la hauteur. Il a fini par accepter d’utiliser cette technique, qui se révèle très adaptée.
            Et Alexandre Astier est fou d’Astérix, comme l’était Chabat. Et comme Chabat, il a suffisamment d’humilité devant Goscinny et Uderzo pour se concentrer sur un seul album, qui offre suffisamment de matière pour alimenter tout un film, tout en conservant la fluidité narrative qui était mise à mal dans les autres films, à force de mélanger les intrigues. Astier garde un scénario fort et drôle, qu’il modernise un peu, qu’il étoffe mais en le respectant.

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            • Répondu par Gill le 7 décembre 2014 à  00:58 :

              le domaine des dieux, qui n’était pas le premier choix des producteurs, pour des raisons , entre autres, économiques. En effet, les albums "à domicile" obligent de gérer toute la galerie de personnages du village, alors qu’un Astérix "en voyage" limite ces efforts.

              Je ne vois pas en quoi un Astérix en voyage diminue le nombre de personnages et de décors complexes. Bien au contraire !

              Dans cette histoire, il y a 4 décors principaux : le village, la forêt, le premier bâtiment et le camp romain. Il suffit de les modeler une fois et on tourne autour autant qu’on le désire, rien de plus facile.

              Il y a aussi plein de romains quasi-identiques : là aussi, facilité. Restent quelques gaulois, esclaves et civils romains...

              Donc à mon avis, si Alexandre Astier a choisi cet album, c’est justement parce que, pour un premier film en 3D, il fallait limiter au maximum les décors pour limiter les frais (il doit bien le dire dans l’une de ses interviews).

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              • Répondu le 8 décembre 2014 à  09:39 :

                la galerie de personnages est beaucoup plus typée. CHaque personnage a une identité propre qu’il faut respecter alors que des "anonymes" sont plus génériques. Et chaque personnage du village doit avoir sa scène pour satisfaire tout le monde. Pas encore vu le film mais j’imagine qu’il doit y avoir la sempiternelle scène de bagarre générale. C’est du boulot :o)

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          • Répondu le 5 décembre 2014 à  15:56 :

            Mais c’est DEJA très vintage.

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        • Répondu par Vincent le 5 décembre 2014 à  09:27 :

          Vous avez raison. Cela quelques années (pas décennie), que les logiciels sont arrivés a "maturité". Je pense qu’ils ont dû trouver un compromis temps/finance/esthétique. Le logiciel y est pour rien.

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  • Pourquoi fallait-il absolument le réaliser en 3D ?
    Ils ont fait une étude de marché ?

    Est-ce qu’ils savent que pas mal de spectateurs ne supportent pas la 3D(nausée,mal de tête) ?

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  • Il y a des gauloises dans ce film ?
    (pas les cigarettes).
    Tout à faut d’accord avec la 3D. Etrange choix quand on sait les maux de tête et nausées occasionnées par la 3D (voir article dans Libé). Et je connais pas mal de gens qui n’accrochent pas à la 3D. Je peux comprendre l’effet d’Astérix plongeant sur nous le poing en l’air en 3D, Ca doit être surprenant mais qu’est qu’il en reste de cet effet-là en projection DVD ?

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  • Astérix, une étoile qui ne faiblit pas
    5 décembre 2014 15:36, par Sly

    Vu les commentaires, j’ai l’impression qu’il y a un malentendu entre les images de synthèse (en 3D) et l’effet de profondeur en 3D...

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  • Astérix, une étoile qui ne faiblit pas
    6 décembre 2014 15:58, par La plume occulte

    Ce film fait vraiment envie. La 3D on s’ en tape un peu mais les images proposées animées ou fixes sont réjouissantes.C’est trépidant, moderne et dans le rythme, on est semble-t-il dans la juste ligne, du Astérix tel qu’en lui-même, et c’est plutôt rare dans les adaptations que le gaulois a connu.Le film de Chabat était une purge qui n’avait d’astérix que le nom et on parle même pas du film suivant ;le dernier j’ai préféré passer à côté. Finalement seul le premier était dans le ton, et pas si mal.

    Dans ce film récent le talentueux Alexandre Astier à posé la main sur l’ensemble et ça se sent tout de suite , Louis Clichy à l’air de faire la paire. Astier a une formation musicale -comme Louis de Funès-et ça se sent dans la direction artistique des voix.Y’a de la cadence, de l’intonation, de la rupture, c’est dans la seconde,tout en rythme : édifiant !De plus la famille Astier, qui compte son content d’acteurs amoureux des mots, avait pour habitude de refaire à la maison, et pour son plaisir, les meilleures scènes de films dialogués par Michel Audiard , Henri Jeanson et Jacques Prévert, la sainte Trinité du verbe qui charpente un long métrage chez nous . Forcément ça forge un bagage. Et ça devient un bonne pioche qui sonne comme une évidence.

    La vidéo proposée où Clichy et Uderzo échangent fait plaisir. Voir le grand Albert, magicien du pinceau, dessinateur d’exception, qui, à côté de la figure médiatique et mondaine parisienne Goscinny, est parfois passé pour un second couteau est toujours un grand moment. De toute évidence il est de la génération "old school" côté communication, ce qui le différencie de certains énergumènes de la génération plus récente experts ès.La figure médiatique et mondaine parisienne Goscinny était lui aussi un excellent communicant, ce qui semble aller de soi.Mais lui la jouait collectif, nuance.

    Lui on le disait généreux...

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