"Attila" dans La Véritable Histoire vraie : l’Histoire en souriant

La série La véritable Histoire vraie est une petite trouvaille actuellement en cours de parution aux éditions Dupuis. Bernard Swysen en est le directeur de collection et le scénariste. Swysen n’en est pas à son coup d’essai en termes de bande dessinée historique puisqu’il s’était lancé dans l’aventure en solitaire en 2016 avec une biographie de Léonardo da Vinci, paru chez Joker Éditions.

Ce tome sur Attila, avec celui concernant Hitler, sont supposés être les numéros 5 et 6 de la série. Tous deux parus en mars dernier, ces deux albums paraissent avant les tomes 3 et 4, prévus pour le 10 mai 2019 et qui traiteront les personnages de Robespierre et de Torquemada. Cette étrangeté chronologique dans la parution des albums s’explique par un changement de dénomination de la série. En effet, les tomes 1 et 2, consacrés aux personnages de Dracula et de Caligula étaient parus sous le vocable Les Méchants de l’histoire en 2018. Changement de perspective désormais : on ne valorise plus les méchants, on raconte La véritable Histoire vraie. La série entend déconstruire les légendes entourant certains personnages historiques catalogués comme « grands méchants » de leur temps. Derrière les a priori de l’imaginaire collectif se cache bien souvent une réalité plus complexe.

Dès sa naissance Attila savait se faire entendre...

© Dupuis

Bernard Swysen n’entreprend pas seul cette épopée pédagogique puisqu’il s’alloue les services d’un dessinateur différent à chaque tome. Parmi ceux ayant déjà collaboré avec lui, on retrouve Ptiluc, Fredman, Julien Solé, ou encore Pixel Vengeur sur ce tome. Ce dernier s’est déjà forgé une réputation dans les magazines Fluide Glacial ou Le Psikopat illustré.

Cet album consacré à Attila est donc l’occasion pour le lecteur de se familiariser avec la vie de ce dernier, dans les détails, de sa naissance à sa mort. Son enfance, son éducation à Rome, son accession au trône, ses techniques militaires et diplomatiques, ses massacres… tout est passé en revue avec un humour tant graphique que littéraire.

Le personnage d’Attila reste celui des textes romains : celui d’un barbare assoiffé de sang, massacrant tout sur son passage. Bernard Swysen, au contraire, nous révèle ses talents diplomatiques, les jeux et enjeux politiques de l’époque entre les deux empires romains, d’Orient et d’Occident, et l’évolution psychologique du chef de guerre, la façon dont il en est venu à lui-même se considérer comme le « Fléau de Dieu ».

Aetius découvre les moeurs Huns puis vient le tour d’Attila de partir vivre chez les romains

© Dupuis

Le rire possède des vertus pédagogiques et nos deux auteurs l’ont bien compris. Cet album est indéniablement drôle que ce soit par ses anachronismes, comme cette improbable caricature de Churchill page 22, les jeux de mots de Swysen ou les jeux graphiques de Pixel Vengeur.

L’aspect parfois loufoque n’enlève toutefois rien à la qualité historique du travail réalisé par les deux auteurs. On ne peut que saluer la présence de notes relativisant certains propos et informant le lecteur des débats historiques en cours sur tel ou tel sujet. Cette crédibilité historique est renforcée par la présence d’une préface de l’historienne hongroise Edina Bozoky ou encore par la postface à l’ouvrage où figurent une carte et des textes contemporains d’Attila, traduits.

Une petite réussite qui devrait s’enrichir bientôt d’un Staline par Ptiluc et qui peut s’avérer un pendant humoristique à la collection "Ils ont fait l’Histoire", autrement plus sérieuse, chez Glénat.

© Dupuis