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Au Ministère de la Culture, le coup d’envoi de BD 2020

Par Jaime Bonkowski de Passos le 19 décembre 2019                      Lien  
BD 2020. Ce mercredi 18 décembre démarrait officiellement l’année de la BD 2020, initiative du Ministère de la culture destinée pour la promotion du 9e art sur tout le territoire français, en collaboration avec la Cité Internationale de la bande dessinée et de l’image et le CNL. C’est dans la Salle des maréchaux du ministère que Frank Riester a prononcé son discours lançant le top départ du projet. Revenons sur les principaux axes développés.
Au Ministère de la Culture, le coup d'envoi de BD 2020
"La France aime le 9e art" est le slogan de cette année. C’est vrai : elle arrive en 3e position dans la production française du livre.

Le ministre a d’abord longuement insisté sur le poids culturel de la BD en France. Rappelant quelques chiffres clefs : la bande-dessinée est le troisième secteur de l’édition en France, et près d’un livre acheté sur sept est une bande dessinée, il a ainsi pu démontrer l’importance d’offrir à cet art la considération qu’il mérite.

«  Tout au long de l’année 2020, nous allons promouvoir la bande dessinée », dit-il, l’heure est donc à la valorisation. L’ensemble des territoires de la métropole et d’outre-mer accueilleront différents programmes destinés à mettre en avant la bande dessinée de tous les horizons : expositions, festivals, rencontres avec les créateurs, Frank Riester a évoqué un programme garni de plus de 350 évènements répartis sur toute l’année, il faut bien le dire : jusqu’à présent très appuyés sur les structures existantes.

Le ministre souhaite également profiter de l’année de la BD 2020 pour s’attaquer à la complainte persistante de l’industrie : le statut des auteurs. Le manque de considération et de financement qu’ils subissent n’est plus à démontrer (nous vous invitons à lire ou relire cette interview d’Emmanuel Moynot, saisissant témoignage de la précarité dans laquelle beaucoup d’auteurs de bande dessinée sont contraints de vivre).

Frank Riester a déroulé les points forts de l’Année de la BD et annoncé l’arrivée prochaine du Rapport Racine sur le statut des auteurs de bande dessinée.

Frank Riester souhaite donc régler ce problème une fois pour toutes. Mais bien malheureusement, il n’a pas pu s’étendre sur les mesures concrètes qui seront prises. Les conclusions du rapport commandé à Bruno Racine sur la place des auteurs dans la société serviront de fondation aux mesures proposées, et à l’heure du discours, le ministre n’avait pas encore pu détailler ledit rapport, promettant sa publication dans quelques jours, et suppliant les journalistes de ne pas le harceler de questions car il n’avait pas encore rencontré son auteur !

Il a toutefois pu garantir l’inclusion dans le programme d’allocations pour l’équipement d’ateliers pour les auteurs mis en place par le Ministère de la culture : « En 2020, les auteurs de bande dessinée pourront se voir attribuer une aide à l’achat de matériel, à la hauteur de la réalité des besoins qui sont les leurs. » Et si ce premier pas apparaît certes bien insuffisant face à l’ampleur du problème, il est toutefois marqué dans la bonne direction.

Frank Riester a également annoncé le financement d’une étude qualitative, approfondie, prolongeant celle de 2015, dont le cahier des charges sera fixé en collaboration avec les syndicats d’auteurs, pour assurer une vision globale des plus précise sur la situation.

Enfin, il a affirmé son désir d’intégrer plus activement les auteurs dans les programmes de médiation culturelle des festivals liés à la BD, pour créer «  les conditions d’un lien, d’un échange, d’une interaction plus riche avec le public ». En clair, que leur participation à un festival soit assortie d’une prestation payée. Le statut des auteurs semble donc être le cheval de bataille du ministre pour l’année de la BD 2020, si l’on en croit cette déclaration.

Le dessinateur Jul, parrain de BD2020, à l’humour caustique.
L’affiche de l’Année de la BD, signée Joseph Falzon.

Après Frank Riester, le dessinateur Jul, un des parrains de l’évènement [1], a pris la parole le temps de quelques mots. Il a corrigé quelque peu son prédécesseur, qui faisait de BD 2020 un point de départ et de renouveau pour la bande dessinée, en affirmant qu’au contraire cet évènement était l’aboutissement des efforts de toute l’industrie depuis quinze ans. Il a ainsi salué le travail considérable de tous les acteurs de la BD qui, depuis des années, contribuent à l’expansion de cet art, en dépit du manque de reconnaissance et de financement.

Il a par ailleurs rappelé, non sans une pointe d’humour caustique, les conditions déplorables dans lesquelles dix ans plus tôt sont travail avait été accueilli par les mêmes institutions qui le reçoivent aujourd’hui. C’est donc presque à charge de revanche qu’il s’est tenu sur l’estrade pour rendre hommage à la bande dessinée, dans un discours plein de bons mots acérés. « Ça fait plaisir de passer de 2019 l’année du LBD à 2020 l’année de la BD » ou encore, parlant du Rapport Racine : « Il est comme le Marsupilami en Palombie : tout le monde en a entendu parler et personne ne l’a vu. »

À son discours a succédé la présentation de l’affiche officielle, dessinée par Joseph Falzon, l’auteur de Alt-Life (Sc. Thomas Cadène. Le Lombard), qui, en présentant toutes les étapes de création d’une bande dessinée, ne manqua pas de rappeler les difficultés rencontrées par les auteurs. Espérons que, dit-il, « comme l’a promis Frank Riester, après 2020, plus rien ne sera comme avant. »

(par Jaime Bonkowski de Passos)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

On peut retrouver le discours entier sur le site du Ministre de la culture.

[1Ils sont au nombre de quatre : Florence Cestac, Catherine Meurisse, Régis Loisel et Jul.

 
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14 Messages :
  • « Ça fait plaisir de passer de 2019 l’année du LBD à 2020 l’année de la BD »

    Incroyable ! On croirait entendre une blague de Guy Delcourt. Ils doivent avoir la même référence littéraire : l’almanach Vermot.

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  • "En 2020, les auteurs de bande dessinée pourront se voir attribuer une aide à l’achat de matériel, à la hauteur de la réalité des besoins qui sont les leurs"
    ça se mange et ça aide à se loger les gommes ?
    Sacré ministère de la culture toujours aussi drôle

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    • Répondu le 19 décembre 2019 à  19:56 :

      L’année de la BD s’annonce déjà comme l’année du gag !

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  • Au Ministère de la Culture, le coup d’envoi de BD 2020
    19 décembre 2019 20:46, par Laurent Colonnier

    L’année de la BD 2020 s’annonce comme une belle tartufferie réservée à quelques happy few (toujours les mêmes bien entendu). Il y aura d’un côté les petits fours et de l’autre les crève-la-dalle....

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    • Répondu par Arsouille le 21 décembre 2019 à  16:41 :

      S’il s’agit de rembourser le papier, les gommes et les crayons, c’est un peu léger....

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      • Répondu le 23 décembre 2019 à  09:45 :

        Vous oubliez le taille-crayon ? Vous n’imaginez pas le prix que ça coûte !

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        • Répondu le 24 décembre 2019 à  04:08 :

          Vous vivez à quelle époque ? On est en 2019, la plupart des dessinateurs de BD n’utilisent plus ni papier, ni gommes ni crayons, ni encre, ni peinture, en revanche des ordi, des scanners, des imprimantes, des tablettes, des stylets et des logiciels oui. Et ça coûte bonbon.

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          • Répondu par kyle william le 25 décembre 2019 à  10:42 :

            Pas la plupart.

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            • Répondu le 26 décembre 2019 à  03:55 :

              Si, la plupart, pas tous en tout cas, il y a quelques irréductibles dinosaures qui utilisent du papier, mais c’est une espèce en voie d’extinction.

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              • Répondu le 26 décembre 2019 à  09:45 :

                Il y a des tas d’auteurs qui utilisent et les techniques traditionnelles et les techniques informatiques. Les nouveaux outils ne remplacent pas les anciens, ils s’y ajoutent.

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                • Répondu par Auteur le 27 décembre 2019 à  04:24 :

                  Il y a surtout beaucoup d’auteurs qui n’ont pas du tout les moyens de s’équiper en informatique... Vous savez combien coûte une Cintiq (ou le genre), une blinde ! Les logiciels sont craqués, je ne connais aucun auteur qui achète une licence pour Illustrator ou Photoshop. Quand aux scanners, ceux de qualités sont chers, alors quand un auteur ou un éditeur dispose d’un en A3, il sert à beaucoup de monde (y compris à des auteurs qui ne sont pas publiés par cet éditeur).

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                  • Répondu le 27 décembre 2019 à  17:15 :

                    Eh oui ! La paupérisation des auteurs fait la fortune des éditeurs et ls ministres successifs sont complices de cette mascarade.
                    Les auteurs n’ont pas les moyens de s’acheter le matériel pour travailler parce que le prix des droits cédés sur les ouvrages est juste misérable. Les éditeurs doivent se foutre de la gueule des auteurs à leurs réunions du SNE. Un éditeur ne devrait pas être autorisé à acheter les droits d’un ouvrage à créer en-dessous de 50.000 euros pour un 48CC.
                    Quand j’entends des auteurs et des autrices qui acceptent 2500/3000 euros pour faire un bouquin de 100 pages. C’est pire que du masochisme, c’est de la démence. Non seulement ils se laissent exploiter mais ils participent à tirer les prix toujours vers le bas. Et les heureux bénéficiaires sont les éditeurs : faible prise de risque et dans le tas de bouquins achetés, un ou deux auront assez de succès pour leur garantir un gros bénéfice.
                    Ce n’est pas à l’État de payer du matériel aux auteurs, c’es taux éditeurs de payer décemment les gens qui bossent pour faire leur fortune pour qu’ils puissent s’acheter le matériel dont ils ont besoin pour travailler. Avec cette aide, le Ministre de la Culture se rend complice du jeu malsain des éditeurs.

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                    • Répondu le 28 décembre 2019 à  14:07 :

                      C’est comme si l’état offrait le vélo pour que les mecs aillent se faire exploiter par Uber Eat ou Delivero, c’est de la complicité d’esclavagisme (de même que le complaisant statut "d’auto-entrepreneur" qui n’a comme finalité de ne pas payer les charges sociales pour les employeurs).

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                      • Répondu le 28 décembre 2019 à  16:04 :

                        L’État est du côté des éditeurs, pas des auteurs. Voilà pourquoi la situation n’évolue pas depuis des lustres et n’évoluera pas. L’année BD2020 servira les intérêts des éditeurs en se servant des auteurs. Les éditeurs n’ont aucun intérêt à ce que les conditions d’une main d’œuvre si bon marché et que le prix d’achat de nouvelles œuvres soient revus à la hausse. Les auteurs doivent refuser une aide matérielle et ne demander qu’une réforme de leur statut. Une vraie réforme, une vraie définition moderne du droit d’auteur et une vraie définition de ce que doit être un revenu d’auteur.
                        Si l’État ne réforme pas le mode de rémunération des auteurs, si l’État ne dicte pas de nouvelles règles de répartition entre tous les acteurs de la profession- règles qui devraient correspondre à la réalité économique d’aujourd’hui - Alors, l’État ne joue pas son rôle d’arbitre et ne fait que le jeu des éditeurs. Cet État n’est même plus libéral, il est démissionnaire parce qu’ultra-libéral.
                        Les belles promesses annoncées il y a un an ne correspondent déjà plus aux éléments de langage du discours de Monsieur Riester. Les difficultés des auteurs ont été gommées au profit d’une promotion d’un art. Ce ne sont pas les éditeurs qui ont des difficultés. Majoritairement, ils se portent bien voire très bien. Cette année de la BD va cependant prioritairement leur profiter. Les auteurs se contenteront des miettes et viendront faire les singes pour amuser la galerie.
                        Voilà pourquoi je ne crois pas en ce discours d’inauguration de l’année de la BD.

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