Le ministre a d’abord longuement insisté sur le poids culturel de la BD en France. Rappelant quelques chiffres clefs : la bande-dessinée est le troisième secteur de l’édition en France, et près d’un livre acheté sur sept est une bande dessinée, il a ainsi pu démontrer l’importance d’offrir à cet art la considération qu’il mérite.
« Tout au long de l’année 2020, nous allons promouvoir la bande dessinée », dit-il, l’heure est donc à la valorisation. L’ensemble des territoires de la métropole et d’outre-mer accueilleront différents programmes destinés à mettre en avant la bande dessinée de tous les horizons : expositions, festivals, rencontres avec les créateurs, Frank Riester a évoqué un programme garni de plus de 350 évènements répartis sur toute l’année, il faut bien le dire : jusqu’à présent très appuyés sur les structures existantes.
Le ministre souhaite également profiter de l’année de la BD 2020 pour s’attaquer à la complainte persistante de l’industrie : le statut des auteurs. Le manque de considération et de financement qu’ils subissent n’est plus à démontrer (nous vous invitons à lire ou relire cette interview d’Emmanuel Moynot, saisissant témoignage de la précarité dans laquelle beaucoup d’auteurs de bande dessinée sont contraints de vivre).
Frank Riester souhaite donc régler ce problème une fois pour toutes. Mais bien malheureusement, il n’a pas pu s’étendre sur les mesures concrètes qui seront prises. Les conclusions du rapport commandé à Bruno Racine sur la place des auteurs dans la société serviront de fondation aux mesures proposées, et à l’heure du discours, le ministre n’avait pas encore pu détailler ledit rapport, promettant sa publication dans quelques jours, et suppliant les journalistes de ne pas le harceler de questions car il n’avait pas encore rencontré son auteur !
Il a toutefois pu garantir l’inclusion dans le programme d’allocations pour l’équipement d’ateliers pour les auteurs mis en place par le Ministère de la culture : « En 2020, les auteurs de bande dessinée pourront se voir attribuer une aide à l’achat de matériel, à la hauteur de la réalité des besoins qui sont les leurs. » Et si ce premier pas apparaît certes bien insuffisant face à l’ampleur du problème, il est toutefois marqué dans la bonne direction.
Frank Riester a également annoncé le financement d’une étude qualitative, approfondie, prolongeant celle de 2015, dont le cahier des charges sera fixé en collaboration avec les syndicats d’auteurs, pour assurer une vision globale des plus précise sur la situation.
Enfin, il a affirmé son désir d’intégrer plus activement les auteurs dans les programmes de médiation culturelle des festivals liés à la BD, pour créer « les conditions d’un lien, d’un échange, d’une interaction plus riche avec le public ». En clair, que leur participation à un festival soit assortie d’une prestation payée. Le statut des auteurs semble donc être le cheval de bataille du ministre pour l’année de la BD 2020, si l’on en croit cette déclaration.
Après Frank Riester, le dessinateur Jul, un des parrains de l’évènement [1], a pris la parole le temps de quelques mots. Il a corrigé quelque peu son prédécesseur, qui faisait de BD 2020 un point de départ et de renouveau pour la bande dessinée, en affirmant qu’au contraire cet évènement était l’aboutissement des efforts de toute l’industrie depuis quinze ans. Il a ainsi salué le travail considérable de tous les acteurs de la BD qui, depuis des années, contribuent à l’expansion de cet art, en dépit du manque de reconnaissance et de financement.
Il a par ailleurs rappelé, non sans une pointe d’humour caustique, les conditions déplorables dans lesquelles dix ans plus tôt sont travail avait été accueilli par les mêmes institutions qui le reçoivent aujourd’hui. C’est donc presque à charge de revanche qu’il s’est tenu sur l’estrade pour rendre hommage à la bande dessinée, dans un discours plein de bons mots acérés. « Ça fait plaisir de passer de 2019 l’année du LBD à 2020 l’année de la BD » ou encore, parlant du Rapport Racine : « Il est comme le Marsupilami en Palombie : tout le monde en a entendu parler et personne ne l’a vu. »
À son discours a succédé la présentation de l’affiche officielle, dessinée par Joseph Falzon, l’auteur de Alt-Life (Sc. Thomas Cadène. Le Lombard), qui, en présentant toutes les étapes de création d’une bande dessinée, ne manqua pas de rappeler les difficultés rencontrées par les auteurs. Espérons que, dit-il, « comme l’a promis Frank Riester, après 2020, plus rien ne sera comme avant. »
(par Jaime Bonkowski de Passos)
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On peut retrouver le discours entier sur le site du Ministre de la culture.
[1] Ils sont au nombre de quatre : Florence Cestac, Catherine Meurisse, Régis Loisel et Jul.
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