Des coulisses de la mode au suivi d’une utopique colonie de vacances franco-allemande (nous sommes encore dans l’Europe d’après guerre !) au début des luttes des droits civiques aux Etats-Unis, elle va peu à peu s’affirmer autant comme professionnelle que comme une femme libre, engagée et indépendante à une époque où la domination masculine et le poids des traditions pèsent très fort. Les rencontres avec Simone de Beauvoir, la famille Brown ou encore Lucinda Todd (militants de l’éducation et des droits civiques) vont contribuer à faire naître chez la jeune femme les sentiments d’humanité et un profond désir d’émancipation.
Récompensée à Angoulême en 2018, la première partie de cette belle adaptation du roman de Julia Billet avait permis de révéler le talent de la dessinatrice Claire Fauvel. Pour ce second opus c’est Mayalen Goust qui prend le relais dans un style différent mais tout aussi efficace dans la restitution de l’esprit d’un récit à mi chemin entre réalité et fiction, roman et biographie.
Déjà publiée chez ce même éditeur (notamment dans la série Kamarades, ou encore dans Alicia Prima ballerna Assoluta) cette autrice poursuit la mise en images du parcours singulier de l’héroïne. En jouant sur une alternance d’ambiances en gris coloré et d’aplats contrastés, son graphisme fluide ajoute de la légèreté à une narration fouillée et érudite. Fortement imprégnée du climat politique de cette époque si particulière, l’itinéraire de Rachel, désormais nommée Catherine nous trace le portrait d’une combattante pour sa liberté d’agir, engagée pour la défense des droits dans une période où la condition féminine demeure un lourd défi. Rappelons, par exemple, que les femmes ne disposeront du droit de vote qu’à partir de 1947.
Le mélange subtil entre réalité et fiction trouve son équilibre dans ce récit inspiré, aux accents de vérité et d’authenticité. Rappelons que le texte s’appuie en partie sur l’expérience de la mère de Julia Billet et rend hommage à tous ceux que la jeune femme a croisés durant ces années, notamment la Maison d’enfants de Sèvres, institution ayant sauvé et protégé plusieurs jeunes durant l’occupation. Ce second tome complète le beau portrait de femme commencé avec La Guerre de Catherine, tout en décrivant à la première personne les bouleversements du monde et de la vie des femmes dans cette période de reconstruction.
(par Patrice Gentilhomme)
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