Rui, un jeune japonais, débarque à Gotham City pour y retrouver ses parents, disparus il y plusieurs mois. Mais la ville est en proie à une criminalité phénoménale et l’adolescent fait rapidement la connaissance de Batman qui le sauve d’une agression dont il était victime, sitôt les limites de la cité franchies. Reste que Rui semble avoir plus d’un tour dans son sac, faisant montre de techniques ninjas (bien évidemment !). Ce qui tombe bien puisque Batman n’a plus de Robin sous la main, Jason Todd étant tombé sous les coups du Joker.
Tout allant décidément très vite pour Rui, le voilà embarqué dans une machination à la tête de laquelle nous retrouvons le Joker et Lex Luthor, et dont ses parents, et les recherches qu’ils menaient, constituent en quelque sorte le pivot. De quoi mobiliser non seulement Batman, mais aussi Superman, en attendant que le reste d’une Justice League qui paraît assez fraichement créée ne se trouve impliquée à son tour.
Avec une parution censée accompagner la sortie en salles du film Justice League, ce Batman & The Justice League en manga étonne autant qu’il détonne. Il étonne en ce qu’il offre une version manga, donc originale, graphiquement maîtrisée qui plus est, d’un univers comics classique et archi-connu.
Mais il détonne aussi car l’amateur de cet univers va avoir bien du mal à y retrouver ce qui en fait sa substance. On est assez loin, ici, à nos yeux, en termes de réussite, de ce que peut donner le Batman "franco-belge" de Marini.
Au fond, le titre donne l’impression de vouloir créer une brèche pour attirer le public manga, qu’il soit japonais, d’abord, ou peut-être aussi européen, vers le comics. Un manga comme tête de pont, ou passerelle, pour élargir, et rajeunir aussi sans doute, le lectorat potentiel, dans la dynamique que l’on escompte voir se créer autour des films de la franchise.
N’oublions pas que les échanges entre manga et comics sont d’actualité. Vient en effet de paraître une anthologie dédiée au phénomène L’Attaque des Titans, composée d’histoires courtes réalisées par différents noms du comics. Un volume qui, bien que décrié, nous a nous franchement séduits, au point de le faire apparaître dans nos tops annuels.
Mais pour l’heure, cela ne fonctionne pas. La narration manga, ultra-rapide et condensée, provoque des situations outrées, et le goût pour l’emphase et la posture que l’on observe dans le traitement des personnages, notamment celui des vilains, les rend malheureusement assez ridicules.
Nous sommes presque désolés d’arriver à ce constat, tant nous sommes admiratifs du travail que Shiori Teshirogi a effectué sur la franchise Saint Seiya, avec une série, Lost Canvas, formidable, et une suite, les Chronicles, globalement convaincante. D’ailleurs, et de manière troublante, ce Batman & the Justice League évoque par certains aspects ces dernières aventures dédiées aux Chevaliers d’Or. Peut-être la mangaka envisage-t-elle les membres de la Ligue à la manière des icônes de Masami Kurumada. C’est là peut-être que se situe un horizon pour voir cette nouvelle série trouver son chemin.
(par Aurélien Pigeat)
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