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Beineix signe un pacte avec le Diable

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 29 novembre 2005                      Lien  
« L'Affaire du Siècle », la BD de Jean-Jacques Beineix et Philippe de Dieuleveult, a fait couler beaucoup d'encre et davantage encore de pixels sur les forums du Net. Son premier album, édité par sa société de production Cargo Films conjointement avec Glénat, a été un OVNI éditorial qui a défrayé la chronique en 2004. Beineix est de retour, et son nouvel album va être édité au Diable Vauvert en janvier prochain.

Beineix, il ne la lâche pas, l’Affaire ! Jamais un auteur ne se sera fait autant agonir d’injures. Jamais il n’aura autant défrayé la chronique bédéphilique jusqu’à devenir un véritable phénomène. Il faut dire que ce premier album sentait le travail de débutant -et c’en était authentiquement un- et que des petits malins, peut-être activés par le réalisateur de 37°2 le Matin, se sont montrés particulièrement intrusifs dans les forums. La réaction a été à la mesure de la notoriété du cinéaste, tonitruante. Les relations avec l’éditeur Glénat qui coéditait l’album se sont sans doute dégradées à la suite du tollé général des milieux de la BD. Qu’à cela ne tienne, Beineix reprend ses billes et s’en va au Diable.

Éditer Beineix ? « Un rêve ! »

Beineix signe un pacte avec le Diable
Une vignette du tome 2
(c) Cargo Films.

Ce n’est pas qu’une figure d’esprit : le Diable-Vauvert est un honorable éditeur de la place parisienne publiant de la littérature française et étrangère, des essais, des beaux-livres, de la science-fiction et au catalogue duquel figurent aussi bien Pierre Bordage que Neil Gaiman. Ce label a aussi publié une BD de... Virginie Despentes, Trois Étoiles, un album mis en images par Nora Hamdi. « Le Diable-Vauvert n’est pas un éditeur de BD, nous dit l’éditrice de la maison Marion Mazauric dans son communiqué de presse, ni d’ailleurs un éditeur cantonné dans quelque genre que ce soit : plutôt un éditeur d’oeuvres modernes, contemporaines, des langages de l’écrit. À la fois chasseur et collectionneur de perles littéraires d’aujourd’hui. Nombre de ses textes empruntent aux rythmes narratifs et aux images de la BD. Comment comprendre Les Pieds Nickelés du Kuru de Thomas Gunzig si l’on n’a pas lu de BD ? »

Editer Beineix, pour elle, c’est « un rêve pour un éditeur de ma génération, qui, à 20 ans, a vu paraître Diva sur les écrans avec jubilation, alors que les académiques de tout poil et autres institutions du bon goût dénigraient son esthétique BD. La même époque où encenser King, Gibson, Tolkien ou Druillet, était encore jugé au mieux comme de l’infantilisme culturel, au pire comme une compromission aux oeuvres marchandes. En 1985, Beineix a sauté sur Marc Behm quand La Vierge de Glace était encore un manuscrit, et Mortelle Randonnée pas encore un film. Marc Behm, auteur d’un livre au vitriol culte dans mon Panthéon personnel, La Reine de la Nuit (chez Rivages, lisez-le !). En 1987, les éditions J’ai lu, où je débutais ma « carrière » d’éditeur, publient 37°2 le Matin, et c’est la même bataille d’Hernani en littérature, cette fois pour Djian... »

« Un tribut à la BD pour services rendus »

Le Diable-Vauvert,
comme le logo le démontre, soutient Cargo Films

L’éditrice a choisi son camp : « J’aime « L’Affaire du Siècle » dit-elle, et ce second volume, « Vampire à louer », construit sur le motif classique de la formation du héros, est digne des meilleures séries B. Trouvailles, clins d’oeil, suspense, Beineix et De Dieuleveult nous racontent magnifiquement cette histoire de bêtise, de racisme et de roublardise vampire. Et ils le font comme les cinéastes et les auteurs qu’ils sont. Productrices de choc, réalisateur, auteur, peintre, story-boardeur, coloriste : une équipe comme au cinéma, une bande archi-pro qui ne travaille qu’ensemble, une aventure, une vision de 20 ans. »

Quant aux remous créés par la publication du premier opus, elle s’en fiche : « L’Affaire du siècle n’est sans doute pas précisément « une affaire » : on a entre autres reproché à cette BD de n’être pas de la BD. Mais on a déjà reproché aux films de Beineix de n’être pas du cinéma, et aux livres du Diable de n’être pas de la littérature ! Je peux l’admirer, mais l’académisme m’ennuie. J’aime publier des livres qui contreviennent aux règles. Et j’aime suivre les auteurs les plus créatifs dans les chemins qu’ils choisissent, fussent-ils de traverse, surtout de traverse. J’aime aussi les séries, et j’adore quand les séries contournent ou s’amusent des lois du genre qu’elles honorent. On peut s’appeler Beineix et De Dieuleveult et vouloir oser, en toute modestie, une contribution d’auteur, audacieuse et enthousiaste, à un art qui vous a fabriqué. Quant à moi, la BD a façonné, élargi et ouvert mon paysage littéraire au même titre que la poésie, le cinéma, la science-fiction, l’épopée ou le roman. Pour l’éditeur comme pour son auteur, L’Affaire du siècle est donc à la fois un tribut à la BD pour services rendus, et un désir. Il était tellement légitime que deux producteurs indépendants s’associent ainsi sur un héritage et des convictions communes, pour donner chair à ce désir. Et si le Diable a, en accueillant ce projet produit par Cargo Films, une fierté, c’est bien celle d’avoir accordé aux auteurs, pour ce volume 2, la possibilité de travailler comme ils le concevaient : au résultat, on ne peut que s’en féliciter. »

Rendez-vous et verdict le 26 janvier 2006, en librairie.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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En médaillon : Jean-Jacques Beineix. Photo : D. Pasamonik.

 
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