Est-ce les incertitudes qui pèsent sur l’avenir éditorial du titre, ou la volonté d’épuiser (un peu trop ?) certaines recettes, qui expliquent ce souci de la BD de regarder en arrière ? BoDoï se fait l’écho ce mois ci de la BD nostalgique.
Ca commence avec un nouvel article consacré à la désormais sempiternelle querelle autour du passé d’Hergé. Une fois de plus, un ouvrage pointe les zones d’ombres de la jeunesse du papa de Tintin, on constatera les confrontations de deux points de vue sur "la question" : celui de Benoit Peteers et celui du dernier auteur en date : Maxime Benoit-Jeannin dont l’ouvrage "Les Guerres d’Hergé" ravive encore la polémique. La suite au prochain ouvrage sur le sujet ?
Qui a dit que les héros étaient fatigués ? Ils semblent tous décidés à reprendre du service ! Pour cela, les éditeurs ne semblent pas ménager leur peine : Corto Maltese, Les Chemins de Malefosse...surfant sur la nostalgie de leurs lecteurs, chacun essaie de remettre en selle des séries au succès déjà bien confirmé.
Au détour d’une brève, reprise d’un article d’Olivier Delcroix du Figaro dont nous avons également fait état dans nos colonnes, on apprend qu’un nouveau Corto serait sur les rails. Quel auteur va oser s’attaquer à la reprise d’un des personnages les plus emblématiques de la BD contemporaine ? Des noms circulent, mais le remplaçant d’Hugo Pratt n’est pas directement nommé. Les contacts sont pris, mais "pas question d’en révéler plus pour l’instant !" nous précise-t-on..
Un peu plus loin, c’est la réédition de l’intégrale de Tif et Tondu, qui donne l’occasion de regarder en arrière en compagnie de Maurice Rosy, scénariste de cette série historique qui fit les beaux jours des éditions Dupuis et qui, à cette occasion, fait quelques révélations sur les pratiques en cours à l’époque.
Nostalgie toujours, avec une belle présentation des carnets de croquis de Baudouin à l’occasion de la présentation du Petit train de la côte bleue, une exposition pleine de souvenirs et de nostalgie, de paysages emprunts de mélancolie, mais soutenue avec élégance par ce talent subtil.
Enfin la confrontation des deux événements majeurs propose de revenir sur les origines de séries cultes. On connaissait déjà les jeunesses de Blueberry, de l’incal et de quelques autres ; il faudra désormais compter avec les Méta-Barons dont le retour se fait par la création d’un cycle intitulé Castaka qui nous ramène à la naissance de la caste. L’événement est accompagné d’une rencontre avec le scénariste Jodorowsky qui, nous dit tout le bien qu’il pense de cette affaire. Les dessinateurs qui ont travaillé avec le scénariste en profitent pour compléter ce portrait à facettes.
Autre revenant, Dermaut propose avec Malfosse de nous faire découvrir les origines de Gunther et Pritz à travers cette nouvelle série dont le premier tome est publié dans la revue. Le dessin toujours somptueux et lumineux sert habilement un scénario co-écrit avec Xavier Gelot, un lecteur de la série passé de l’autre côté de la planche à la suite d’une improbable rencontre avec le dessinateur.
Côté série justement, on retrouve avec bonheur Le complexe du chimpanzé. Ici c’est le passé qui refait surface dans un XXIème siècle fort réaliste. Cette histoire de paradoxe temporel ménage le suspense et l’intime dans une ambiance de clair-obscur qui en renforce le caractère angoissant et le rend crédible.
Ce numéro se conclut avec la troisième série Smoke City qui trouve ici sa conclusion provisoire en prévision d’un dénouement encore plus sanguinolant. Il est vrai que nous sommes là dans une cité saturée de violence, de mafia et de flics désabusés.Ici, la nostalgie n’est plus de mise !
(par Patrice Gentilhomme)
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Bo-Doï n°105, en kiosque à partir du 23 février, 5,95 €.
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