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Bob De Groot : « J’ai sorti le champagne lorsque j’ai vu la planche d’essai de la reprise de Robin Dubois »

Par Nicolas Anspach le 22 août 2008                      Lien  
Après avoir dessiné 19 albums de {Robin Dubois}, {{Turk}} a cédé le dessin de cette série à un duo issu du studio Peyo. Habitués aux contraintes d’un univers existant, {{Ludo Borecki}} et {{Diaz}} ont endossé, avec un profond respect, les codes du créateur graphique de la série. {{Bob De Groot}} veille au grain, et continue à cultiver son sens du gag et du bon mot.
Bob De Groot : « J'ai sorti le champagne lorsque j'ai vu la planche d'essai de la reprise de Robin Dubois »
Robin Dubois par De Groot, Borecki & Diaz
Ed. Le Lombard

Diaz, vous avez repris le graphisme de la série Robin Dubois en 2007, près de dix ans après le dernier album signé par Turk.

Diaz : Cette reprise est née suite à ma relation avec Ludo Borecki qui devenait de plus en plus amicale. Nous nous sommes connus au Studio Peyo. Nous y passons beaucoup de temps ensemble à dessiner des Schtroumpfs. L’idée de faire quelque chose ensemble, après nos heures de travail, nous taraudait ! J’ai très vite pensé à Robin Dubois. J’adorais cette série lorsque j’étais enfant. Après avoir réalisé une planche test, nous nous sommes rendus chez Bob De Groot pour la lui montrer. Nous ne savions pas que cette série était à ce moment là au point mort. Après avoir vu cette planche, il a tout de suite sorti le champagne ! Mais c’était, sans doute, parce qu’il avait très soif (Rires). Il restait à convaincre Turk que nous étions l’équipe idéale…

Pourquoi avoir opté pour une reprise. Vous deviez déjà respecter des codes graphiques astreignants en dessinant les Schtroumpfs ?

D : Mais parce que j’avais beaucoup d’affinités pour Robin Dubois. Je n’aurais pas pu reprendre une série pour laquelle je n’avais pas de sympathie. J’étais prêt à m’intégrer dans un univers existant. Ce n’est pas donné à tout le monde de créer une série novatrice. Travailler sur un univers qui existe déjà est beaucoup plus confortable. … Mais aussi parfois difficile !

Vous ne souffrez pas d’un manque de reconnaissance, de ne pas être à l’avant-plan ?

D : Non. Le Studio Peyo agit avec beaucoup d’élégance. Nos noms sont mentionnés dans les albums. Il en va de même pour Robin Dubois, mis à part que celui-ci est mis sur la couverture. En fait, j’ai été, pendant de nombreuses années, éducateur. La BD est un hobby, qui s’est transformé en une profession. Je suis heureux de pouvoir l’exercer pleinement aujourd’hui.

De Groot : L’important est de faire ce que l’on aime, avant tout …

Scénario de Bob de Groot pour "Robin Dubois"

Bob de Groot, qu’est-ce que vous appréciez dans cette planche d’essai ?

DG : La filiation avec Peyo et Franquin. Ils étaient parfaits pour dessiner Robin Dubois car ils respectaient l’univers de cette série…

D : Nous n’avons pas notre propre style. Nous nous adaptons à celui des autres pour servir des histoires, tout en se faisant plaisir. Si j’avais continué à être lecteur de Robin Dubois, sans en être l’auteur, j’aurais été très critique par rapport à une reprise de la série. Ludo et moi-même le sommes donc tout autant, voire plus, par rapport à notre travail…

Bob de Groot, on assiste actuellement à votre renaissance. Pendant longtemps, vous n’étiez que le scénariste de Léonard…

DG : Oui. Je me suis secoué. Je réalise une série avec Bercovici (Père Noël & Fils) et une autre avec Godi (Le Bar des acariens) aux éditions Glénat. J’ai quand même réalisé quelques Lucky Luke pour Morris, entre des Léonard et des Robin Dubois. Aujourd’hui, j’ai retrouvé une envie de raconter des histoires. Un désir proche de celui que j’avais à vingt ans. Mis à part que j’ai l’expérience en plus ! Ce plaisir rejaillit sur mon travail. Je suis aujourd’hui heureux de retrouver Léonard après m’être séparé de lui pendant quelques mois pour me consacrer à mes autres séries…
J’ai d’autres projets humoristiques et réalistes que je compte bien signer un jour.

Extrait du T21 de "Robin Dubois"

Bob de Groot, vous étiez l’assistant de Michel Greg. Y a-t-il d’autres personnes qui ont compté plus particulièrement à vos yeux dans ce métier ?

DG : Maurice Tillieux ! J’ai travaillé avec lui pendant quelques mois sur Félix. Je devais rajouter deux centimètres de décors de chaque côté d’anciennes planches afin que celles-ci correspondent au format imposé par un éditeur. C’était un homme amusant, passionnant et un prodigieux conteur.
Hugo Pratt également ! Les Vénitiens ont un humour très fin, très subtil. Je me souviens des théories abracadabrantes qu’il inventait et racontait à ses amis pour les amuser. Il y mettait tellement de passion que nous doutions à certains moments… Ses propos semblaient tellement vrais !
Et puis Greg, bien entendu. Je l’ai beaucoup admiré. Cet homme a déniché beaucoup d’auteurs talentueux. Même s’il s’est peut-être trompé avec moi (Rires). Il ne laissait rien passer, ni coquille, ni erreur. Le mot « retard » n’existait pas pour lui. On travaillait parfois deux jours d’affilée, sans dormir, pour rattraper le retard. En travaillant avec lui, j’ai appris le sens de la rigueur !

Diaz, comment s’est déroulée votre formation au studio Peyo ?

D : Parmi les dessinateurs qui y travaillent, nous sommes les deux seuls, Ludo Borecki et moi-même, à ne pas avoir connu Peyo. Nous avons été formés par Alain Maury, Pascal Garray et De Coninck. Quand on les entend parler de l’univers des Schtroumpfs ou d’une technique graphique, on a presque l’impression que c’est Peyo qui partage avec nous ses secrets. Nous avons tous un profond respect pour son œuvre. Alain Maury, qui s’est éloigné du studio pour reprendre les 4 As, est devenu un ami. Je l’admire beaucoup...

Borecki, De Groot & Diaz
Photo (c) Nicolas Anspach

(par Nicolas Anspach)

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Photos (c) Nicolas Anspach
Illustrations (c) De Groot, Diaz, Borecki, Turk et Le Lombard.

 
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9 Messages :
  • J’aime cette humilité des dessinateurs ! Elle a tendance à devenir de plus en plus rare.

    Il y a de ces bandes dessinées qui plaisent surtout par leur dessin : "Robin Dubois" a longtemps eu la préférence des lecteurs du "Journal Tintin" avec un scénario pourtant répétitif et un humour un peu mécanique. Je pense que beaucoup d’entre eux n’achetaient pas les albums mais ils avaient plaisir à retrouver ce dessin-là dans un magazine !

    Aujourd’hui, les dessinateurs populaires issus d’écoles artistiques ou choisis par des éditeurs influencés par leurs amitiés avec de "véritables artistes" produisent des BD au style souvent plus adapté aux adultes (pour qui le dessin n’a qu’une importance secondaire mais qui apprécient les styles estrêmement personnels) qu’aux enfants (qui ont besoin d’être rassurés par certaines conventions de lisibilité, d’expressivité et de couleurs gaies et plaisantes... le tout apparaissant comme extrêmement banal, je sais, mais il suffit d’infimes variations sur cette base pour que tout change). Cette erreur se révèle dans les grandes réussites qui se dégagent du choix de départ (ex : Lou, les Nombrils, les Sisters, etc...)

    Je souhaite donc plein de succès à ces deux dessinateurs, avec et après leurs deux reprises ! Eux au moins, sont passés par la meilleure école qui soit.

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    • Répondu le 22 août 2008 à  16:06 :

      Ce sont des fonctionnaires du dessin, pas des artistes, il est un peu ridicule de les mettre en opposition avec des artistes ayant un univers et des choses à raconter, ça n’a simplement rien à voir.

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      • Répondu le 22 août 2008 à  21:46 :

        Un bon interprète a-t-il moins de talent ou de mérite qu’un bon compositeur ? C’est un débat stérile qui n’a pas lieu d’être.

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        • Répondu le 23 août 2008 à  01:10 :

          C’est bien ça, on ne compare pas André Rieu et Mozart.

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          • Répondu le 23 août 2008 à  09:43 :

            Ces ont cependant tous des artistes et pas des "fonctionnaires".
            La critique (surtout anonyme) est aisée et l’art est difficile... Et un bon interprète est tout aussi méritant qu’un bon compositeur.

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            • Répondu le 23 août 2008 à  16:04 :

              De Groot est un bon artisan et il a trouvé un bon repreneur pour sa petite entreprise.
              Mais j’ai beaucoup de mal à croire que quelqu’un pourrait reprendre la boutique d’un Spiegelmann...

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              • Répondu le 23 août 2008 à  20:40 :

                André Franquin n’a-t-il pas bien repris la belle petite boutique de Jijé (Spirou) pour la transcender et Tome et Janry n’en ont-ils pas fait tout autant ?... Ces "fonctionnaires" apprécieront vos propos.

                Un modeste artisan

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  • Agréable de voir cette planche, un dessin qui fait la part belle, non pas à l’auteur,mais bien à l’univers incarné.
    Retro ? non, juste un dessin qui respecte la base du métier de conteur, s’oublier, pour faire exister au mieux un univers...

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