Pour Bobby, ce boulot dans une librairie, c’est l’occasion à ne pas rater. Enfin, il peut échapper à son milieu, ses parents médiocres et incultes, l’ennui de sa campagne. Même s’il se contente d’un poste d’employé, sans vraiment utiliser ses connaissances littéraires, Bobby séduit : le patron d’abord, qui apprécie ses idées, et la fille de celui-ci, touchée par ses allures solitaires. Un boulevard pour Robert (qui déteste le prénom donné par ses parents) qui voit l’occasion de changer définitivement le cours de sa vie.
Tout paraît si ordinaire, si banal parfois dans cette histoire. Et pourtant le personnage de Hugues Barthe suscite une empathie poignante. Qu’il bataille pour se rêver en écrivain ou qu’il se révolte face à une solitude emprisonnante, il s’accroche à une forme ambitieuse de créativité. L’auteur ne l’épargne pourtant pas, pointant un certain égocentrisme et un côté stratège dans ses relations avec la famille miraculeuse qui l’adopte chaleureusement.
Au-delà d’un destin sobrement inédit, Barthe glisse également des observations sociologiques précieuses : le milieu des libraires, la jeunesse sans idéal, la génération des parents coincée dans ses frustrations. On attend presque, à travers le personnage du libraire/beau-père, un rebondissement spectaculaire, tant il met mal à l’aise avec sa bienveillance forcée. Une tension qui colle bien au malaise permanent de Bobby/Robert, qui finalement voit son but à portée de main, mais son malaise existentiel toujours aux aguets.
(par David TAUGIS)
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