Dans le riche dossier de vingt pages qui complète cette intégrale des deux tomes de Minoukinis (préalablement publiés chez Glénat en 1997 et 1998), Christian Darasse explique en détail la genèse de cette série :
« À l’époque, je venais d’arrêter « Le Gang Mazda », [dont] Philippe Tome avait scénarisé les quatre derniers [volumes…] On s’était très bien entendus tout au long de cette aventure commune, et donc […] il ne restait plus qu’à trouver un nouveau projet. […] On s’est mis à évoquer des tas de pistes jusqu’à ce qu’on rende à l’évidence : j’adore dessiner des femmes nues, et Philippe adore les regarder, huhu ! […] C’est comme ça qu’est venue l’idée des plages libres et des… En fait, je ne me rappelle jamais si on dit nudistes ou naturistes… »
Voilà donc un sujet sensible, sur lequel on aurait pu douter qu’on puisse faire un album drôle et tonique sans tomber dans le graveleux… Ce qui était vrai, car Darasse & Tome n’en ont pas seulement fait un album, mais deux ! L’expérience de Tome se fait sentir dès le début du premier album : une véritable troupe de théâtre est placée dans son contexte d’origine, avant de rejoindre cette fameuse plage libre sur laquelle ils vont vivre des aventures hors normes.
La saveur de ces personnages et le cocasse des situations comptent pour beaucoup dans la réussite de la série : une bande de noblions un peu pincés, un couple de Maghrebins arrivé là par erreur et dont la fille tente de goûter en secret cette ouverture à la nature, les fondateurs de la plage libre, un vendeur de maillots, un rasta qui fait du petit commerce, etc. Et toutes ces personnes évoquent les situations quotidiennes vécues dans le plus simple appareil, mais également des petites histoires coquines sans que le bon goût ne soit outrepassé.
Le dessin dynamique de Darasse contribue à la réussite de cette évocation rigolarde. Comme il le dit lui-même, ses petites femmes sont très sexy, mais il parvient surtout à dessiner des personnages nus (sans oublier les sexes masculins) sans jamais déraper ou tomber dans le vulgaire ! Petit bémol graphique : la sensation que les couleurs de Cécile écrasent parfois l’encrage du dessinateur. « Les films et les fichiers d’époque ayant disparu, nous explique Patrick Pinchart, l’éditeur de Sandawe, « Darasse s’est chargé de la re-numérisation à partir d’albums imprimés, ce qui donne cet aspect "vintage" qui n’est pas désagréable », justifie-t-il.
Ceci ne gâche pas le plaisir que l’on éprouve à la lecture de ces gags, qui rappellent l’esprit du Petit Spirou dans une version plus adulte… et sans vêtements !
(par Charles-Louis Detournay)
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