L’histoire débute en Juin 1993, lorsque Xavier Mussat s’installe pour trois ans à Angoulême pour y suivre un enseignement artistique. Alors que les élèves de sa promo lèvent le camp, "en un été", une fois le cursus achevé, Xavier, sans ressources financières ni perspectives professionnelles, décide de rester : "Angoulême m’offrait l’état de l’errance immobile" dit-il. Très rapidement cependant, Xavier trouve un travail, un vrai, avec des horaires, un bureau et des fiches de paie. Il devient animateur de dessins animés. Kirikou et la Sorcière de Michel Ocelot sera à la fois le plus beau projet et son dernier. Xavier quitte le studio, en tête : faire des bandes dessinées.
En parallèle de son nouvel objectif créatif, Xavier démarre un long processus de relations amoureuses toxiques. Alice, Julie, puis enfin, et surtout, Sylvia. Difficile de résumer en quelques phrases une relation psychologiquement très violente, destructrice et totalement irrationnelle dont l’auteur met pratiquement 200 pages à se sortir.
L’évolution du ressenti de Xavier, son état psychologique et ses pérégrinations mentales donnent lieu à des traductions graphiques remarquablement inventives. Oscillant entre le Graphic Novel à l’américaine et des partis-pris graphiques en noir et blanc qui ne sont pas sans rappeler Marjane Satrapi, Xavier Mussat passe d’un style à un autre avec une aisance insolente. Peu importe le véhicule tant que cela sert le récit, semble-t-il nous dire... Et comme il se dégage une maîtrise technique sans faille, il faudrait être fou pour bouder son plaisir !
Un bémol est à appliquer cependant pour certaines longueurs dans les divagations mentales et les différentes réflexions générales sur la vie, la mort et l’âge du capitaine qui font un peu perdre au lecteur le sens du propos. À force de vouloir tout dire, l’auteur s’éloigne parfois un peu de l’essentiel, ou même simplement du sujet.
Il n’en reste pas moins que le travail de Xavier Mussat dans cette Carnation est colossal, et que les quelques écueils narratifs relevés restent minimes. C’est du roman graphique comme on les aime...Notamment grâce au remarquable travail éditorial de Casterman (l’objet est une merveille), cet ouvrage est un des incontournables de la rentrée.
(par Gallien Chanalet-Quercy)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Participez à la discussion