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Christelle Pécout ("K-Schok") : "En France, on a une vision très cliché de la Corée du sud."

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 10 mars 2016                      Lien  
Publiant des bandes dessinées depuis plus de dix ans ("Lune d'ombre", avec Sylviane Corgiat et "Stellaires", Sylviane Corgiat et Patrick Galliano, aux Humanoïdes Associés ; un album avec Virginie Greiner : "Sorcières T. 2 : Hypathie", chez Dupuis), Christelle Pécout nous revient avec un album, "K-Shock", qui se passe au pays de ses origines, la Corée du Sud, dans le milieu de la musique. Rencontre.
Christelle Pécout ("K-Schok") : "En France, on a une vision très cliché de la Corée du sud."
K-Shock - Par Christelle Pécout - Ed. Glénat

Vous avez un nom français alors que vous êtes "couleur de peau : miel", pour faire allusion à la magnifique biographie de Jung adaptée à l’écran. Quel est votre parcours, à vous, comme enfant coréenne adoptée ?

J’ai été adoptée à cinq mois, et n’ai donc aucun souvenir ou aucun apprentissage de la langue coréenne. Ce que j’ai appris, c’est que chaque histoire de coréen(ne) adopté(e) est différente, quel que soit l’âge auquel on a été adopté. Ma sœur et moi sommes toutes deux adoptées et n’avons pas du tout vécu ce qu’a vécu Jung.

Mais, comme lui, je suis revenue en Corée via la bande dessinée. Pour en avoir parlé avec lui, je crois qu’on a une vision assez similaire de la Corée d’aujourd’hui.

Ce sont ces origines qui vous poussent à faire une histoire qui se passe en Corée ?

Oui voilà, mais pas seulement. Je me suis sentie légitime pour parler de la Corée actuelle. On peut voir K-Shock comme un prétexte pour revenir en Corée du sud, mais c’est aussi une vision française de la Corée d’aujourd’hui, à travers mes personnages, dans une BD destinée aux fans de culture pop coréenne, qui forment une communauté nombreuse sur Internet. Mais c’est aussi une façon pour un lecteur lambda d’entrer dans la culture de ce pays étonnant, qui s’ouvre au monde et où tout est à découvrir.

K-Shock - Par Christelle Pécout - Ed. Glénat

Vous avez fait un sacré détour avant de réaliser des bandes dessinées : la couture, le design de sites Internet... Pouvez-vous nous raconter ce cheminement ?

Je garde une culture du vêtement, d’ailleurs c’est très important en Corée du sud.
J’ai toujours dessiné, et je suis passée par l’école d’Angoulême. Pour Internet, c’était juste un passage dont je ne garde pas un bon souvenir. C’était normal pour moi de revenir à la BD ensuite.

Comment en êtes-vous arrivée à faire cet album sur la K-pop, c’est votre goût musical ?

Je suis beaucoup plus intéressée par le hip-hop ou rap coréen. Mais j’ai mes moments K-pop, et c’est un univers assez fascinant. J’ai d’ailleurs fait une playlist très large de ce que peut offrir musicalement le paysage coréen musical. Vous verrez que ça dépasse largement les clichés qu’on a sur la K-pop ou Psy, qui n’est d’ailleurs pas dans ma liste. Voici le lien

K-Shock - Par Christelle Pécout - Ed. Glénat - Repérage et case définitive.

Votre album nous fait découvrir les dessous de l’industrie musicale coréenne au travers d’un télé-crochet du genre Popstars, un truc très marqueté. Comment vous-êtes vous documentée sur ces milieux ?

Je regarde beaucoup d’émissions TV sud-coréennes sur Internet, via des plate-forme de traductions de fans ou sur les chaînes officielles de YouTube, comme les émissions 1N2D sur KBS ou Show Me The Money, le télé-crochet rap hyper populaire sur M-net, le MTV local. Il y a des milliers de fans de ces émissions dans le monde entier. Cela permet de comprendre comment fonctionnent les rapports sociaux hyper-hiérarchisés de la société sud-coréenne.

Je suis aussi allée dans des concerts de hip-hop coréen, cette scène est très active. J’ai aussi visité les endroits phares de la culture K-pop de Séoul.

Vous avez vécu en Corée, comme l’héroïne de votre album ? Parles-vous le coréen ?

Non pas du tout, mais j’y suis allée deux fois l’an dernier, je suis restée plusieurs semaines. Je ne parle pas du tout le coréen, Séoul est heureusement une ville où on peut parler anglais et se faire comprendre.

L’influence asiatique dans votre dessin n’est pas très évidente, comment gérez-vous ce choc graphique des cultures ?

Je n’ai pas cherché à imiter la BD coréenne ou asiatique. Malgré mes origines, ma culture BD ou graphique est mondiale. Autant les comics que les mangas ou la BD franco-belge.

Vous travaillez de façon traditionnelle, avec de l’encre et du papier, ou vous êtes de la génération "tout à l’écran" ?

Pour K-Shock, je suis passée au tout à l’écran. C’est plus rapide. Je travaille sur Cintiq. C’est plus pratique quand on se déplace, surtout en voyage. Mais je fais aussi du dessin traditionnel.

K-Shock - Par Christelle Pécout - Ed. Glénat - Repérage et case définitive.

Il y a un dossier très explicatif à la fin, quasiment pédagogique. Les Français ont une image faussée de la culture coréenne ?

En France, on a une vision très cliché de la Corée du sud. En fait, les Français ne connaissent pas ce petit pays. C’est pourquoi j’ai voulu aller un peu plus loin que Psy et Samsung. Mais cette expansion de la culture coréenne est passionnante à observer, justement. Quand on est là-bas, on comprend ce qui attire les nouveaux touristes, surtout la K-pop et les dramas (séries TV coréennes) chez les jeunes, le patrimoine culturel et la nourriture pour les touristes en général. C’est le nouvel Eldorado asiatique où les jeunes étrangers cherchent la réussite, mais une fois sur place, les choses deviennent très compliquées. C’est mon sujet.

Au Salon du Livre de Paris vous allez vous retrouver dans un panel avec des auteurs coréens dont certains vivent à Paris. Il y a quelques phénomènes qui sortent du lot. Connaissez-vous la scène coréenne de BD ?

Oui, je m’y intéresse énormément. Surtout que leur modèle économique du webtoon, la BD numérique sur smartphones est fascinant. Pas forcément rassurant pour nous, auteurs européens, mais c’est néanmoins probablement ce qui nous attend dans sept ans. Car technologiquement, nous avons entre sept et neuf ans de retard sur la Corée, qui est le laboratoire des tendances du monde. Je conseillerais donc de suivre le webtoon Misaeng, qui se déroule dans une entreprise, et qui a été adapté en drama. Il serait génial de l’éditer en France.

Y aura-t-il d’autres albums ? On s’est attaché à vos personnages...

Je l’espère, ce n’est pas prévu par Glénat actuellement, mais j’ai fait une fin ouverte et auto-conclusive.

Propos recueillis pas Didier Pasamonik

La Cintiq permet de travailler sa BD n’importe où, en voyage...
Photo : Chr. Pécout. DR

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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- Retrouvez Jung-Hyoun Lee, Park Kun-Wong, Hong Yeon Sik, Ancco, Park Kyungeun et Christelle Pécout sur la Scène BD de Livre Paris 2016 (S66) le jeudi 17 mars à 17h00. Modérateur : Laurent Melikian.
LIVRE-PARIS, du 17 au 20 mars 2016.
PARIS PORTE DE VERSAILLES – PAVILLON 1 BOULEVARD VICTOR, 75015 PARIS

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