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Christope Alliel et Clément Baloup (" Le Ventre de la hyène") : « Le thème des enfants-soldats participe pleinement à la trajectoire de notre héros. »

Par Christian MISSIA DIO le 28 juillet 2014                      Lien  
"Le Ventre de la hyène" est un roman graphique de cent-vingt pages dont l'action se passe en Afrique et à Marseille. Rencontre avec les auteurs de ce one shot paru aux éditions du Lombard.
Christope Alliel et Clément Baloup (" Le Ventre de la hyène") : « Le thème des enfants-soldats participe pleinement à la trajectoire de notre héros. »

Comment ce projet est-il arrivé jusqu’à vous ?

Christophe Alliel : Le projet est né d’une envie commune de travailler ensemble tout d’abord. Clément et moi produisons nos albums dans le même atelier à Marseille. Sommairement, le livre raconte le destin brisé de deux frères enrôlés comme enfants-soldats puis mercenaires.

Clément Baloup : Le projet est né au sein du Zarmatelier où, à l’époque, Christophe et moi nous croisions et échangions sur notre travail tous les jours de la semaine. Pour faire simple, j’étais catalogué dans un registre "intello" et Christophe dans un registre "action", mais au delà de ça, nos goûts sont éclectiques et travailler ensemble était la promesse d’un récit à la fois exigeant et populaire. Le simple fait de vivre à Marseille nous met en contact avec l’Afrique. L’origine du projet a aussi un rapport avec cette proximité. Personnellement, je travaille depuis un moment sur des histoires tragiques liées à la guerre et à l’exil.

Le Ventre de la Hyène
Christophe Alliel & Clément Baloup (c) Le Lombard

Pourquoi cette thématique des enfants-soldats ?

Christophe Alliel : L’idée première était de raconter une histoire qui avait pour fonds l’Afrique, l’envie de dessiner une histoire contemporaine s’y déroulant me titillait depuis un moment. Après plusieurs discussions, nous avons orienté le récit vers un aspect tragique et violent.

Clément Baloup
Photo DR

Clément Baloup : Le thème des enfants-soldats n’est pas le sujet central mais participe pleinement à la trajectoire de notre héros ; il y a aussi les printemps arabes, les réfugiés clandestins traversant la Méditerranée vers l’Europe et les quartiers dangereux de Marseille qui sont autant de thèmes forts qui ont nourri le récit. Toutes ces actualités brûlantes forment une trame sur laquelle évolue Talino, notre personnage principal. Mais son parcours est surtout un récit initiatique, invoquant des mythes universels aussi fort que Caïn et Abel.

Christophe Alliel : Le cheminement de notre récit nous a conduit naturellement à évoquer les enfants-soldats et les mercenaires puisque c’est le destin dans lequel ils sont prisonniers. L’histoire commence à Marseille et s’entrecoupe de flash-back en Afrique sur la vie de nos personnages.

Dans quel pays d’Afrique situez-vous l’histoire ?

Christophe Alliel : On se focalise sur le destin des deux frères, le récit voyage du Tchad aux pays arabes, pour terminer à Marseille. Mais juste pour clarifier notre point de vue sur Le Ventre de la hyène, nous ne situons pas l’action volontairement, nous ne voulions pas que notre récit s’intègre dans un conflit ou une histoire, car cela fausserait le message du livre.

Christophe Alliel
Photo : DR - Le Lombard

Clément, vous avez écrit un récit assez sombre et pessimiste. Le personnage de Talino a une vraie force de caractère mais certains de ses choix nous ont laissés un peu perplexes.

Clément Baloup : Les choix de Talino ne sont pas des actes de faiblesse et, sur le plan du récit, c’est à rapprocher aux tragédies grecques où la somme des actes vécus se traduit par une conclusion où le héros paie le prix fort.

Anouar est l’âme damné de son frère. Il est la cause de sa chute. Pourtant, on sent durant tout le récit qu’il tient beaucoup à lui. Pourriez-vous nous en dire plus sur sa personnalité ?

Clément Baloup : Anouar n’est pas juste un salaud, sa motivation profonde est plus complexe : il aime son frère, mais ne le comprend absolument pas !

D’où vient la légende de la hyène ?

Clément Baloup : C’est un composite, une re-création de contes authentiques que j’ai amalgamés et transformés pour servir spécifiquement notre projet. J’avais déjà procédé de la sorte avec mon album Le Vaurien dans lequel je m’appropriais des contes et légendes d’Asie du Sud-Est.

Christophe, comment avez-vous conçu la couverture de cette BD ?

Christophe Alliel : J’avais pour souhait de dessiner une couverture évoquant la prison psychologique dans laquelle se trouve Talino, il fallait que cette image soit lourde visuellement, que la composition ne laisse aucune échappatoire au personnage, que l’on ressente sa détresse au milieu des ruines. Pour cela j’ai été influencé par les affiches de films de Jacques Audiard qui sont toujours très juste en termes d’émotion et d’impact. L’image de couverture est une pause au milieu de cette violence, comme un cliché volé.

Quel est votre parcours à chacun et quels sont vos sources d’inspiration ?

Clément Baloup : J’ai étudié Arts-appliqués à Marseille, les Beaux-arts d’Angoulême et enfin les Beaux-arts à Hanoï, au Vietnam. J’ai commencé à gagner ma vie en travaillant pour la télévision, puis me suis consacré pleinement à la BD chez plusieurs éditeurs.

Qu’avez-vous fait à la télévision ?

Clément Baloup : J’étais à différent postes, notamment assistant directeur artistique. Mais, même si c’était intéressant, ce n’était pas mon truc.

Au niveau de mes influences, il y en a trop pour toutes les citer mais je peux simplement vous dire que je puise mon inspiration aussi bien dans le cinéma indépendant que dans les mangas d’auteur et la BD franco-belge.

Christophe Alliel : Quant à moi, j’ai d’abord suivi des études de graphisme puis je me suis lancé en BD juste après en commençant par des publications d’histoires courtes en presse. Rapidement, j’ai signé mon premier contrat d’édition pour une BD de SF à l’époque.

Mes influences sont et ont toujours été les grands maitres du manga japonais tels que Katsuhiro Otomo, Masamune Shirow ou encore Akira Toriyama. Par contre, mon virage franco-belge s’est fait très jeune grâce aux Spirou & Fantasio de Tome & Janry.

Quels sont vos prochains projets ?

Christophe Alliel : Pour le moment, je dessine le troisième volume de ma série Spynest, à paraitre début 2015.

Clément Baloup : Je poursuis ma série Mémoire de Viet Kieu chez mon éditeur la Boîte à bulles. Je travaille actuellement sur le tome 3. À part ça, j’ai d’autres albums traversés par les thèmes de l’exil...

Voir en ligne : Le Ventre de la Hyène sur le site du Lombard

(par Christian MISSIA DIO)

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