Publié depuis 2001 au Japon, Claymore est un shônen manga [1] fantastique qui se démarque par un casting essentiellement féminin. Le récit nous plonge dans un monde moyenâgeux de type européen où sévit un fléau bien particulier : des démons se nourrissant des entrailles des humains, et qui se cachent parmi la population en prenant les traits de simples habitants.
Les claymores sont des guerrières dont le sang a été mêlé à celui des démons. Grâce à cela, elles disposent d’une force et de capacités surhumaines, et sont seules capable de traquer et de tuer ces démons. Craintes et redoutées, on les distingue à leurs yeux argentés et à l’épée gigantesque qu’elles portent sur le dos –d’où leur nom : « claymore » [2].
Le manga suit l’histoire de Claire, une claymore, qui cherche à se venger du meurtre de son mentor, tuée par une autre claymore, Priscilla, qui s’est exaltée. C’est sur ce dernier concept que repose l’intrigue du manga.
En effet, les claymores peuvent perdre le contrôle de leur part démoniaque. Dans ce cas on parle « d’exaltation » et elles deviennent à leur tour des monstres affamés d’entrailles, à la puissance démesurée, reléguant les « démons » au statut d’enfantillage. Les exaltés, aux pouvoirs et aux capacités dépassant l’entendement, portent le titre d’Abyssal.
Les claymores se trouvent toutes être des femmes car les hommes subissant ce traitement s’exaltent systématiquement et très rapidement. Il existe ainsi quelques exaltés masculins, très âgés car « nés » à l’époque de la création de cet ordre, résultats des premières expérimentations qui ont mal tourné.
Les « démons » se trouvent rapidement relégués au second plan, le récit se focalisant sur la confrontation avec les exaltés, et les abyssales ; sans oublier les secrets entourant l’organisation des claymores. Ce qui intéresse Norihiro Yagi ce sont les histoires personnelles de ces guerrières, leur drame, leur malédiction, leur lutte intérieure et le paradoxe de leur destin : leurs plus grands ennemis étant ce qu’elles pourraient devenir si elles perdent le contrôle d’elle-même.
L’ambiance générale se veut désenchantée, cruelle et horrifique. Le récit, après un début jouant la carte du mystère, s’articule autour des combats, qui occupent la majeure partie des tomes. Les affrontements dans Claymore ne se résument pas à de l’action, mais sont également le lieu des drames et des évolutions des héroïnes de Norihiro Yagi. C’est lors des batailles qu’elles (re-)trouvent un sens à leur vie, à travers entre autres la camaraderie, un des thèmes essentiels de l’œuvre.
Le casting de la série convoque un personnel très nombreux, et le lecteur peut facilement se perdre parmi tous les personnages, d’autant que les physionomies de Norihiro Yagi ont tendance à se ressembler ! Son style épuré et simple s’avère très efficace pour installer une ambiance et mettre en scène les nombreuses scènes de bataille, mais côté visages, il souffre d’une certaine uniformisation.
Ce 24e tome continue de mettre en place ce qui semble être la bataille finale contre Priscilla, l’ultime exaltée à la puissance absurde. La confrontation avec l’abyssale Cassandra, contre laquelle les claymores s’allient à certaines exaltées, occupe la majeure partie du tome. À cela s’ajoute l’apparition d’une nouvelle « créature » qui fait face à Priscilla, et qui suscite de nouveaux mystères. Hormis ce dernier élément, le déroulement s’avère classique, et un peu prévisible, même si les exaltées et leurs métamorphoses grotesques assurent un excellent spectacle.
Un tome assez typique de la série, qui prend souvent le temps de s’arrêter sur les situations et les personnages pour les explorer en détail, même si cela se fait au détriment du rythme général. Cependant, ce procédé favorise aussi l’effet des basculements dramatiques qui peuvent s’inviter à tout moment dans le récit.
L’essentiel est que le destin de Claire et de ses compagnes continue de fasciner et de nous faire vibrer, même après tant d’années ! Et il nous tarde de voir Claire en découdre avec Priscilla !
(par Guillaume Boutet)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Claymore T24. Par Norihiro Yagi. Traduction Satoko Fujimoto & Anthony Prezman. Glénat Manga, Collection "Shônen". Sortie le 2 juillet 2014. 192 pages. 6,90 euros.
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[1] Shônen : désigne un type de manga ayant pour cible éditoriale les garçons adolescents.
[2] Une claymore est une grande épée à une main et demie ou 2 mains.