C’est en 1964 que la Belgique et la Turquie signent une convention bilatérale favorisant l’arrivée massive de travailleurs turcs pour occuper notamment des emplois dans les mines du Hainaut, du Limbourg et de la province de Liège.
Après la Seconde Guerre mondiale, la Belgique a besoin de main d’œuvre pour relancer son économie, en particulier dans le secteur minier. En 1946, l’État belge signe une convention avec l’Italie. Mais suite à la catastrophe du Bois du Cazier en 1956, Rome revendiquera de meilleures conditions de travail pour ses ressortissants. C’est alors que Bruxelles et les directions des mines se tourneront vers d’autres pays pour obtenir des travailleurs. Ce sera le cas avec l’Espagne dès 1956 et la Grèce l’année suivante. Le Maroc et la Turquie suivront au début des années 1960. Dans le même temps, au début des années 1950, la Turquie souhaitait entrer dans l’économie capitaliste mondiale. Pour cela, elle modernisa son secteur agricole, ce qui aura pour conséquence de désintégrer sa paysannerie. Le manque de débouchées suite à une industrie turque encore mal organisée entraina le chômage et la paupérisation de la population venue des campagnes. Des troubles sociaux et politiques éclatèrent dans tous le pays. C’est dans ce contexte tendu qu’une émigration turque s’organisa. D’abord en direction de l’Allemagne, ensuite vers les Pays Bas, la Belgique, l’Autriche ou encore la France [1]
Tantôt admirée, tantôt moquée, la Turquie a toujours eu une place à part dans l’imaginaire européen. Du XVI ème au XVIII ème siècle, l’Empire Ottoman exerce une grande fascination sur l’Europe. On admire sa culture, son raffinement synonyme de luxe et de volupté. Par contre, dès le Siècle des Lumières, la situation s’inverse. Le Turc est alors associé à la barbarie, à l’infidèle et à la tyrannie.
La BD n’échappe pas à la règle, bons et mauvais clichés parcours la représentation de cette immense pays, à cheval entre l’Europe et l’Asie. Certaines représentations sont plus surprenantes. Ainsi, dans l’album Bécassine chez les Turcs (1919), on s’étonne de l’allusion faite au génocide arménien dans une publication pour enfants !
C’est aussi à ce genre de découvertes que nous convient Alain Servantie et Didier Pasamonik, les commissaires de cette exposition organisée par Plateforme 50 et le Festival Istanbulles. De Corto Maltese à Largo Winch, de Natacha à Djinn. Bestsellers ou œuvres plus confidentielles, l’exposition Comics alla turca interroge notre rapport à l’autre, tout en nous faisant (re-)découvrir la richesse d’un medium trop souvent brocardé.
(par Christian MISSIA DIO)
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COMICS ALLA TURCA - Images et stéréotypes des Turcs dans la bande dessinée franco-belge
Du 22 mai au 15 juin 2014
Du mercredi au dimanche, de 13h à 18h - Fermé les jours fériés
Entrée libre
Maison du Folklore et des Traditions
Rue du Chêne 19
1000 Bruxelles
TEL : +32 (0)2/279.64.44
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Le dessin de l’affiche est tiré de "Dérive orientale" de Yann Locard (L’Employé du moi).
[1] Sources : Belgique-Turquie : 50 ans de migration. Étude réalisée par Quentin Schoonvaere (UCL), relue et commentée par Frank Caestecker (UGent) et Andrea Rea (ULB) pour le compte du Centre Interfédéral pour l’Égalité des Chances.
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