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Cours d’« Histoire » sous XANAX® avec Jeanne d’Arc

Par Marlene AGIUS le 25 août 2022                      Lien  
Si vous pensiez connaître l'Histoire de France, ou ce qu'est un travail d'historien, ou la France, ou même la BD, oubliez tout. Car oui, c'est encore une nouvelle bande dessinée sur notre pucelle nationale.

"Jehanne", graphie royaliste plutôt que médiévale, transforme ici cette pauvre Jeanette en héroïne chrétienne illuminée, elle qui voulait simplement s’habiller en homme, se raser la tête, et probablement fricoter avec Aliénor et autres Cunégondes.

C’est tout naturel car, Philippe de Villiers, Vendéen dans tous les sens du terme, fidèle compagnon de la Reconquista Zemmourienne, patron du Puy Du Fou et financeur de passé anachronique, est aussi un auteur de romans-phares tel son incontournable Roman de Jeanne d’Arc sur lequel est basée cette BD.

Cours d'« Histoire » sous XANAX® avec Jeanne d'Arc
La seule représentation de Jeanne d’Arc faite de son vivant (1529-1531), en marge d’un acte notarié parisien, conservé aux Archives nationales. Le clerc de notaire réalise ce dessin selon les dires et son imaginaire, sans avoir vu Jeanne

Inutile de parler plus longtemps de l’auteur qui, cela va de soi, n’a rien d’un historien, et plongeons plutôt au coeur de la BD.

Passons sur le fait que ’Jehanne’ d’Arc ait plutôt les traits de Mireille Darc, voire d’une sympathique Mélanie Laurent, nous pouvons constater que les éditions Plein Vent nous accordent en effet un livre plein de vent.

Le scénario adapté par Coline Dupuy, ancienne actrice au Puy Du Fou, et le dessin de l’italien Davide Perconti, confond téléfilm du Mardi soir et histoire événementielle, nous préparant à une douce montée en anxiolytiques qui nous accompagnera tout au long de la lecture.

Jehanne d’Arc © Plein Vent

Commençant à Domrémy et finissant au bûcher, nous découvrons avec joie - ouf ! - que Jehanne était véritablement pucelle et non de ces femmes de mauvaises moeurs.

Passons aussi sur le fait que l’album contient plus de fois le mot "Dieu" que la Bible, et nous découvrons avec émerveillement d’aussi essentiels dictons que "Les Français sont meilleurs à la chasse qu’à la pêche aux harengs", ou encore "Pas de folles filles ici !". Le tout rythmé par un jargon militaire du 16e siècle.

Toutes les BD d’histoire événementielle sont-elles mauvaises ? Non, sans doute... Mais ne faudrait-il pas adapter le test de Bechdel aussi aux bandes dessinées ? Au moins Jehanne a-t-elle le mérite d’être une héroïne... Elle a même été reprise dans la série BD Le Monde, le monde bien sûr étant celui où l’Histoire se cantonne à Jeanne, Clovis et les Gaulois.

Cette découverte vous conduira sûrement vers d’autres chefs-d’oeuvre telle l’adaptation manga de la Bible, et peut-être, qui sait, un nouveau roman graphique financé par Alain Soral ? Ou alors peut-être est-il temps de se tourner vers la micro-histoire, ou plus loin encore, hors de la BD nationale.

Toutes ces demandes nous en font poser une ultime : qui de nous est le véritable illuminé, Jehanne, les auteurs, ou nous ?

(par Marlene AGIUS)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782492547348

Histoire Biopic France
 
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9 Messages :
  • Cet article dit que Jeanne d’Arc portait des vêtements d’homme et s’était rasé la tête ; mais les « vêtements pour hommes » n’étaient que la tenue d’équitation du soldat qui lui avait été donnée pour des raisons pratiques, et elle a dit qu’elle avait continué à le porter en prison parce qu’elle pouvait lacer les pièces ensemble pour empêcher ses gardes de lui retirer ses vêtements. Sa tête n’était pas "rasée" et n’était pas aussi courte que le prétend la transcription du procès puisqu’elle n’aurait pas pu la garder aussi courte pendant un an en prison (les prisonniers n’avaient jamais le droit d’utiliser des ustensiles pointus). Des témoins oculaires ont déclaré que la transcription avait été falsifiée.

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    • Répondu par Milles Sabords le 26 août 2022 à  11:27 :

      Il faut savoir aussi qu’à cette époque, lorsque l’on porte un casque, une armure ou une cote de maille, les cheveux sont très court sur les côtés et à l’arrière du crâne, sinon, trop long, ils se prennent dans les différentes protections métalliques et c’est plutôt douloureux.

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    • Répondu par Milles Sabords le 26 août 2022 à  11:41 :

      Autre point, contrairement à mes confrères, je n’ai jamais fait l’erreur de dessinéer des combat de chevaliers en armure à pied, ou comme on le voit sur la couverture Glénat/Fayard, avec une Jeanne tellement à l’aise dans ses mouvements qu’on dirait qu’elle part à la plage. Les armures était lourdes, difficilement maniables, et plutôt prévues pour l’enfoncement des lignes ennemi en pleine charge à cheval. D’ailleurs, les chevaliers était souvent hissé sur leur monture par un système de harnais et de poulies. Le dessin réaliste requiert un minimum de recherches si l’on veut coller à son sujet. C’est comme ceux qui dessinent des types qui s’embrochent avec des lances qui traversent le corps de part en part, complètement impossible.

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      • Répondu par Laurent Colonnier le 26 août 2022 à  19:46 :

        Autre point, contrairement à mes confrères, je n’ai jamais fait l’erreur de dessinéer des combat de chevaliers en armure à pied

        Lol, le retour du mytho qui veut se faire passer pour un auteur de BD...

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        • Répondu par Milles Sabords le 2 septembre 2022 à  07:42 :

          Visiblement, vous parlez en connaissance de cause…

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      • Répondu par (.❛ ᴗ ❛.) le 27 août 2022 à  10:43 :

        Trop fort Milles Sabords !

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  • Quel bel article plein d’ouverture. Que dirait sa rédactrice devant le Jeanne de Bruno Dumont, adapté des écrits de Peguy ? Pas très Bechdel tout ça, ni très athé, ce qui vu l’époque et la prégnance de l’Eglise est parfaitement compréhensible. Faut arrêter de calquer la manière de penser des Urbains branchouilles de 2022 à toutes les époques et partout dans le monde, y compris en France.

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  • Cours d’« Histoire » sous XANAX® avec Jeanne d’Arc
    30 août 2022 12:24, par alain ANDREY

    Je n’en suis pas encore au chapître "Jeanne d’Arc", mais après avoir lu les 200 premières pages (introduction à ne pas manquer sur l’histoire et les historiens, à rapprocher des écrits de Paul Veyne), et aussi son "Histoire de Paris", je recommande "La guerre de 100 ans" de Jean Favier. Seul reproche que je ferais à ses ouvrages, le manque d’iconographie et de cartographie. Après, on pourra apprécier des interprétations plus engagées, partiales, illuminées, fantaisistes... Moi, j’ai un faible pour la
    Jehanne de F’MURR

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    • Répondu par Milles Sabords le 3 septembre 2022 à  05:14 :

      Pour moi, le sommet, ça reste la Jeanne de Paul Gillon.

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