Si le premier tome des aventures de Courtney Crumrin avait pu laisser penser au lecteur que la seule créature vraiment dangereuse était le gobelin dévoreur d’enfant vivant dans les bois (et sur lequel Courtney avait eu le dessus, faisant du petit monstre un allié objectif), le début de ce nouvel album le détrompera : une chose de la nuit nommée Tommy le Décharné revient, appelée par un mystérieux personnage. Et cette fois-ci, même les sorciers expérimentés ont du mal à protéger leur famille.
Ce n’est que le début d’une excellente intrigue qui verra Courtney assister à la nomination du nouveau chef des chats, avant de tomber sur un membre du peuple-fée, muet comme une carpe, beau comme un rêve, et pourchassé par l’assemblée des sorciers, persuadée qu’il a placé un sort sur l’un d’eux, sa maîtresse. Courtney, pourtant dissuadée par son oncle en bisbille avec l’assemblée, va donc essayer de venir en aide à la créature en fuite. Mais nous ne sommes pas dans une histoire de Walt Disney...
Ted Naifeh réussit dans ce deuxième volume à déstabiliser le lecteur, en lui proposant une galerie de personnages où les choses (de la nuit, et les autres) ne sont jamais ce qu’elles semblent être, et où les sorciers, tout magiciens qu’ils soient, sont traversés par les mêmes passions que les humains plus ordinaires. En somme, l’auteur donne à son personnage une leçon d’humanité qui, paradoxalement, va faire apparaître au grand jour ses capacités de sorcière, et sa dureté dans la vengeance.
Le dessin, toujours tout en angles et en ombres, prend donc ici des accents expressionnistes, dans sa mise à nu des caractères de chacun, monstres ou hommes. La séduction qu’opère cette peinture d’un monde crépusculaire, peuplé de créatures à la proches et lointaines de notre réalité, est un élément fondateur de l’attrait de cette série. Mais son refus du happy end, de la facilité scénaristique, devrait assurer sa persistance dans la mémoire des lecteurs, ainsi que leur envie de refaire un tour parmi les Choses de la Nuit.
(par François Peneaud)
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